« Hyperthermie maligne » : différence entre les versions
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{{Information maladie | {{Information maladie | ||
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| spécialités = Médecine d'urgence, Soins intensifs, Médecine interne | | spécialités = Médecine d'urgence, Soins intensifs, Médecine interne, Anesthésiologie | ||
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L'hyperthermie maligne (HM) est une maladie héréditaire autosomique dominante du muscle squelettique qui se présente classiquement comme une réponse hypermétabolique reliée à l'utilisation des agents volatils halogénés, à la succinylcholine, un relaxant musculaire dépolarisant, ou, plus rarement, à l'exercice vigoureux et à la chaleur. <ref name=":0">{{Citation d'un ouvrage|prénom1=Stacey|nom1=Watt|prénom2=Russell K.|nom2=McAllister|titre=StatPearls|éditeur=StatPearls Publishing|date=2021|pmid=28613578|lire en ligne=http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK430828/|consulté le=2021-05-28}}</ref> | L''''hyperthermie maligne''' (HM) est une maladie héréditaire autosomique dominante du muscle squelettique qui se présente classiquement comme une réponse hypermétabolique reliée à l'utilisation des agents volatils halogénés, à la succinylcholine, un relaxant musculaire dépolarisant, ou, plus rarement, à l'exercice vigoureux et à la chaleur. <ref name=":0">{{Citation d'un ouvrage|prénom1=Stacey|nom1=Watt|prénom2=Russell K.|nom2=McAllister|titre=StatPearls|éditeur=StatPearls Publishing|date=2021|pmid=28613578|lire en ligne=http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK430828/|consulté le=2021-05-28}}</ref> | ||
== Épidémiologie == | == Épidémiologie == | ||
L'incidence exacte de l'hyperthermie maligne est inconnue. En effet, il existe une variabilité interindividuelle importante et les patients doivent être exposés en moyenne trois fois à une anesthésie avant d'avoir une première crise <ref name=":8">{{Citation d'un article|prénom1=O|nom1=Bandschapp|prénom2=T|nom2=Girard|titre=Malignant hyperthermia|périodique=Swiss Medical Weekly|date=2012-07-31|issn=1424-7860|issn2=1424-3997|doi=10.4414/smw.2012.13652|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.4414/smw.2012.13652|consulté le=2021-05-18}}</ref><ref name=":2" /><ref name=":7" />. La prévalence de gens porteurs d'une prédiposition à l'hyperthermie maligne est d'environ 1: | L'incidence exacte de l'hyperthermie maligne est inconnue. En effet, il existe une variabilité interindividuelle importante et les patients doivent être exposés en moyenne trois fois à une anesthésie avant d'avoir une première crise <ref name=":8">{{Citation d'un article|prénom1=O|nom1=Bandschapp|prénom2=T|nom2=Girard|titre=Malignant hyperthermia|périodique=Swiss Medical Weekly|date=2012-07-31|issn=1424-7860|issn2=1424-3997|doi=10.4414/smw.2012.13652|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.4414/smw.2012.13652|consulté le=2021-05-18}}</ref><ref name=":2" /><ref name=":7" />. La prévalence de gens porteurs d'une prédiposition à l'hyperthermie maligne est d'environ 1:4000 et jusqu'à 1:3000 dans la population générale <ref name=":2" />. Selon la littérature, l'incidence d'un épisode clinique d'hyperthermie maligne est estimée de 1:250 000 jusqu'à 1: 10 000 anesthésies <ref>{{Citation d'un article|prénom1=Norman J.|nom1=Halliday|titre=Malignant Hyperthermia|périodique=Journal of Craniofacial Surgery|volume=14|numéro=5|date=2003-09|issn=1049-2275|doi=10.1097/00001665-200309000-00039|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1097/00001665-200309000-00039|consulté le=2021-05-13|pages=800–802}}</ref><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Helle|nom1=??rding|titre=Incidence of Malignant Hyperthermia in Denmark|périodique=Anesthesia & Analgesia|volume=64|numéro=7|date=1985-07-XX|issn=0003-2999|doi=10.1213/00000539-198507000-00009|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1213/00000539-198507000-00009|consulté le=2021-05-13|pages=700???704}}</ref>. | ||
Les enfants sont particulièrement à risque. Le groupe des 15 ans et moins comprendrait 52.1% de toutes les réactions d'hyperthermie maligne <ref name=":7">{{Citation d'un article|prénom1=Kimberly Prather|nom1=Strazis|prénom2=Anthony W.|nom2=Fox|titre=Malignant Hyperthermia|périodique=Anesthesia & Analgesia|volume=77|numéro=2|date=1993-08-XX|issn=0003-2999|doi=10.1213/00000539-199377020-00014|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1213/00000539-199377020-00014|consulté le=2021-05-02|pages=297–304}}</ref>. L'incidence chez les enfants serait donc de 1:30 000 contrairement à environ 1:100 000 chez les adultes <ref name=":0" />. Les hommes seraient plus à risque que les femmes | Les enfants sont particulièrement à risque. Le groupe des 15 ans et moins comprendrait 52.1% de toutes les réactions d'hyperthermie maligne <ref name=":7">{{Citation d'un article|prénom1=Kimberly Prather|nom1=Strazis|prénom2=Anthony W.|nom2=Fox|titre=Malignant Hyperthermia|périodique=Anesthesia & Analgesia|volume=77|numéro=2|date=1993-08-XX|issn=0003-2999|doi=10.1213/00000539-199377020-00014|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1213/00000539-199377020-00014|consulté le=2021-05-02|pages=297–304}}</ref>. L'incidence chez les enfants serait donc de 1:30 000 contrairement à environ 1:100 000 chez les adultes <ref name=":0" />. Les hommes seraient plus à risque que les femmes et ce, sans égard à l'origine ethnique. | ||
D'autres troubles sont également associés à | D'autres troubles sont également associés à un risque accru d'hyperthermie maligne dont <ref name=":2" />: | ||
# | # le spasme du muscle masséter induit par la succinylcholine (qui est une rigidité importante qualifiée de « ''jaws of steel'' » contrairement à la rigidité légère normalement attendue)<ref group="note">Celle-ci est une entité à par entière, mais elle peut aussi être un signe annonciateur de l'hyperthermie maligne.</ref> | ||
# la | # la myopathie congénitale à cores centraux (une myopathie rare et non progressive caractérisée par une hypotonie et une faiblesse des muscles proximaux) | ||
# le syndrome de King-Denborough (myotonie rare associée à de multiples caractéristiques physiques distinctes dont | # le syndrome de King-Denborough (myotonie rare associée à de multiples caractéristiques physiques distinctes dont un faciès dysmorphique, les plis épicantiques, la micrognathie, la clinodactylie, la lordose lombaire et la scoliose thoracique légère). | ||
D'autres myopathies, dont la myopathie à multi-minicore et la myopathie centronucléaire, ont possiblement une association avec l'hyperthermie maligne.<ref name=":0" /><ref name=":1">https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26238698</ref><ref name=":2">{{Citation d'un article|langue=en|prénom1=Henry|nom1=Rosenberg|prénom2=Neil|nom2=Pollock|prénom3=Anja|nom3=Schiemann|prénom4=Terasa|nom4=Bulger|titre=Malignant hyperthermia: a review|périodique=Orphanet Journal of Rare Diseases|volume=10|numéro=1|date=2015-12-XX|issn=1750-1172|pmid=26238698|pmcid=PMC4524368|doi=10.1186/s13023-015-0310-1|lire en ligne=http://www.ojrd.com/content/10/1/93|consulté le=2021-05-13|pages=93}}</ref> | D'autres myopathies, dont la myopathie à multi-minicore et la myopathie centronucléaire, ont aussi possiblement une association avec l'hyperthermie maligne.<ref name=":0" /><ref name=":1">https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26238698</ref><ref name=":2">{{Citation d'un article|langue=en|prénom1=Henry|nom1=Rosenberg|prénom2=Neil|nom2=Pollock|prénom3=Anja|nom3=Schiemann|prénom4=Terasa|nom4=Bulger|titre=Malignant hyperthermia: a review|périodique=Orphanet Journal of Rare Diseases|volume=10|numéro=1|date=2015-12-XX|issn=1750-1172|pmid=26238698|pmcid=PMC4524368|doi=10.1186/s13023-015-0310-1|lire en ligne=http://www.ojrd.com/content/10/1/93|consulté le=2021-05-13|pages=93}}</ref> | ||
== Étiologies == | == Étiologies == | ||
L'hyperthermie maligne est considérée comme une maladie pharmacogénétique qui se produit lorsque des patients génétiquement prédisposés sont exposés à des conditions environnementales | L'hyperthermie maligne est considérée comme une maladie pharmacogénétique qui se produit lorsque des patients génétiquement prédisposés sont exposés à des conditions environnementales favorisant la relâche accélérée de calcium par le réticulum sarcoplasmique des myocytes. Ces conditions incluent : <ref name=":2" /><ref>{{Citation d'un article|prénom1=P.M.|nom1=Hopkins|titre=Malignant hyperthermia: pharmacology of triggering|périodique=British Journal of Anaesthesia|volume=107|numéro=1|date=2011-07|issn=0007-0912|doi=10.1093/bja/aer132|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1093/bja/aer132|consulté le=2021-05-13|pages=48–56}}</ref><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Dawei|nom1=Jiang|prénom2=Wenqian|nom2=Chen|prénom3=Jianmin|nom3=Xiao|prénom4=Ruiwu|nom4=Wang|titre=Reduced Threshold for Luminal Ca2+ Activation of RyR1 Underlies a Causal Mechanism of Porcine Malignant Hyperthermia|périodique=Journal of Biological Chemistry|volume=283|numéro=30|date=2008-07|issn=0021-9258|doi=10.1074/jbc.m801944200|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1074/jbc.m801944200|consulté le=2021-05-13|pages=20813–20820}}</ref> | ||
* les {{Étiologie | nom = gaz anesthésiques halogénés|principale=0}} ( | * les {{Étiologie | nom = gaz anesthésiques halogénés|principale=0}} (excluant le protoxyde d'azote et le xénon) | ||
* la {{Étiologie | nom = succinylcholine|principale=0}} | * la {{Étiologie | nom = succinylcholine|principale=0}} | ||
* la {{Étiologie | nom = chaleur environnementale|principale=0}} et l'{{Étiologie | nom = activité physique vigoureuse|principale=0}}.<ref group="note">L'exposition de patients susceptibles à un exercice intense, à la chaleur ou à des températures corporelles internes élevées (par exemple, des infections) peut précipiter cette crise. Il s'agit principalement d'études animales ou de rapport de cas. Des recherches sont actuellement en cours pour évaluer ce lien possible.</ref><ref name=":0" /><ref name=":2" /> | * la {{Étiologie | nom = chaleur environnementale|principale=0}} et l'{{Étiologie | nom = activité physique vigoureuse|principale=0}}.<ref group="note">L'exposition de patients susceptibles à un exercice intense, à la chaleur ou à des températures corporelles internes élevées (par exemple, des infections) peut précipiter cette crise. Il s'agit principalement d'études animales ou de rapport de cas. Des recherches sont actuellement en cours pour évaluer ce lien possible.</ref><ref name=":0" /><ref name=":2" /> | ||
Le principal site de mutation lié à l'hyperthermie maligne se trouve au niveau du gène du récepteur des canaux Ca2+ de la membrane du réticulum sarcoplasmique (nommés canaux la ryanodine RYR1) <ref name=":2" />. D'autres loci génétiques ont été identifiés, tels que CACNA1S | Le principal site de mutation lié à l'hyperthermie maligne se trouve au niveau du gène du récepteur des canaux Ca2+ de la membrane du réticulum sarcoplasmique (nommés canaux la ryanodine RYR1) <ref name=":2" />. D'autres loci génétiques ont été identifiés, tels que CACNA1S, une mutation dans le canal DHPR, un canal des tubules-T du sarcolemme qui transfère les changements de voltage au récepteur RYR1), ainsi les loci CASQ1, STAC3, JSPR1 ont été identifiées comme impliqués dans l'hyperthermie maligne.<ref name=":0" /> Jusqu'à 70% des familles susceptibles à l'hyperthermie maligne ont une des 400 mutations identifiées du RYR1 et associées à l'hyperthermie maligne. <ref>{{Citation d'un lien web|titre=Supplemental Information 3: Perl script to parse ClinVar entries.|url=http://dx.doi.org/10.7717/peerj.8106/supp-3|site=dx.doi.org|consulté le=2021-05-21}}</ref> | ||
== Physiopathologie == | == Physiopathologie == | ||
Chez un individu en santé, l'acétycholine initie un potentiel d'action le long du sarcolemme jusqu'aux tubules transverses (tubules-t) et active les récepteurs de la dihydropyridine ou DHPR (des canaux calciques voltage-dépendants)<ref name=":5">{{Citation d'un article|langue=en|titre=A comprehensive review of malignant hyperthermia: Preventing further fatalities in orthopedic surgery|périodique=Journal of Orthopaedics|volume=15|numéro=2|date=2018-06-01|issn=0972-978X|pmid=29881197|pmcid=PMC5990300|doi=10.1016/j.jor.2018.05.016|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0972978X18301259|consulté le=2021-05-18|pages=578–580}}</ref>. Ceci permet l'ouverture des canaux RYR1 adjacents au niveau du réticulum sarcoplasmique, ce qui mène à une libération de calcium dans le cytosol et à la contraction musculaire. La relaxation des fibres musculaires est facilitée par le retour du calcium dans le réticulum sarcoplasmique par les pompes ioniques sarco/endoplasmique CA2+/ATPase (SERCA)<ref name=":5" />. | |||
Chez un individu en santé, l'acétycholine initie un potentiel d'action le long du sarcolemme | |||
Dans l'hyperthermie maligne, la libération de calcium dans le cytosol par les canaux RYR1 mutés est tellement importante que les pompes SERCA sont incapables de compenser, mènant à une augmentation des niveaux de calcium intracellulaires, ainsi qu'à une rigidité musculaire persistante. Cette contraction musculaire soutenue produit une déplétion d'adénosine triphosphate (ATP) et augmente considérablement la consommation d'oxygène et la production de dioxyde de carbone et de chaleur, amenant une hypercapnie, l'hyperthermie et éventuellement l'acidose respiratoire et métabolique. L'épuisement des réserves d'ATP conduit à une défaillance de l'intégrité de la membrane (rhabdomyolyse) et à des fuites de contenu cellulaire tel que le potassium (hyperkaliémie), la créatinine kinase et la myoglobine dans la circulation. Il peut s'en suivre des arythmies cardiaques, une insuffisance rénale aiguë, une CIVD et la mort.<ref name=":3">{{Citation d'un article|prénom1=F.|nom1=Altamirano|prénom2=S.|nom2=Riazi|prénom3=C. A.|nom3=Ibarra Moreno|prénom4=N.|nom4=Kraeva|titre=Is malignant hyperthermia associated with hyperglycaemia?|périodique=British Journal of Anaesthesia|volume=122|numéro=1|date=2019-01|issn=1471-6771|pmid=30579418|pmcid=6972230|doi=10.1016/j.bja.2018.09.014|lire en ligne=https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30579418/|consulté le=2021-05-21|pages=e3–e5}}</ref><ref name=":4">{{Citation d'un article|prénom1=R. T.|nom1=Dirksen|prénom2=P. D.|nom2=Allen|prénom3=J. R.|nom3=Lopez|titre=Understanding malignant hyperthermia: each move forward opens our eyes to the distance left to travel|périodique=British Journal of Anaesthesia|volume=122|numéro=1|date=2019-01|issn=1471-6771|pmid=30579410|doi=10.1016/j.bja.2018.10.026|lire en ligne=https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30579410/|consulté le=2021-05-21|pages=8–9}}</ref><ref name=":0" /><ref name=":5" /><ref name=":2" /> | |||
'''Schématisation de la physiopathologie de l'hyperthermie maligne''' | |||
{{Flowchart | {{Flowchart | ||
| Start -> | | Start -> Z | ||
| | | Z -> B | ||
| group G = Nécessite | | Z -> A | ||
| group G = Nécessite : | |||
| A.group = G | | A.group = G | ||
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Ligne 47 : | Ligne 54 : | ||
| C -> D | | C -> D | ||
| D -> E | | D -> E | ||
| E -> | | E -> F | ||
| | | F -> G | ||
| | | F -> H | ||
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| | | G1 -> I | ||
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| | | G5 -> I | ||
| | | H -> H1 | ||
| | | H -> H2 | ||
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| | | H2 -> H3 | ||
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| | | H3 -> I | ||
| | | H1 -> I | ||
| H5 -> I | |||
| Start = Hyperthermie maligne | | Start = Hyperthermie maligne | ||
| A = | | Z = Mutation et exposition | ||
| A = Substance (gaz et succinylcholine) | |||
| B = Condition environnementale | | B = Condition environnementale | ||
| C = Prolonge l'ouverture du canal RYR | | C = Prolonge l'ouverture du canal RYR | ||
| D = Relâche soutenue de Ca2+ dans le cytoplasme | | D = Relâche soutenue de Ca2+ dans le cytoplasme | ||
| E = Dépasse la capacité de recaptage via SERCA | | E = Dépasse la capacité de recaptage via SERCA | ||
| | | F = Contraction musculaire soutenue | ||
| | | G = Rhabdomyolyse | ||
| | | H = Hypermétabolisme | ||
| | | G1 = CIVD | ||
| | | G2 = Augmentation des CK | ||
| | | G3 = HyperK | ||
| | | G4 = IRA | ||
| | | G5 = Arythmie | ||
| | | I = Mort | ||
| | | H1 = Hyperthermie | ||
| | | H2 = Augmentation des besoins en O2 | ||
| | | H3 = Acidose métabolique | ||
| | | H4 = Augmentation du CO2 | ||
| H5 = Acidose respiratoire | |||
}} | }} | ||
== Présentation clinique == | == Présentation clinique == | ||
=== Facteurs de risque === | === Facteurs de risque === | ||
Plusieurs facteurs de | Plusieurs facteurs de risque de l'hyperthermie maligne ont été identifiés : | ||
* l'{{Facteur de risque | nom = âge}}, surtout chez la population pédiatrique | * l'{{Facteur de risque | nom = âge}}, surtout chez la population pédiatrique | ||
* le {{Facteur de risque | nom = sexe masculin}} | * le {{Facteur de risque | nom = sexe masculin}} | ||
Ligne 98 : | Ligne 106 : | ||
=== Questionnaire === | === Questionnaire === | ||
La crise d'hyperthermie maligne est difficile à reconnaitre étant donné la variabilité de sa présentation<ref name=":2" /><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Frank|nom1=Schuster|prénom2=Norbert|nom2=Roewer|prénom3=Daniel|nom3=Schneiderbanger|prénom4=Stephan|nom4=Johannsen|titre=Management of malignant hyperthermia: diagnosis and treatment|périodique=Therapeutics and Clinical Risk Management|date=2014-05|issn=1178-203X|doi=10.2147/tcrm.s47632|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.2147/tcrm.s47632|consulté le=2021-05-18|pages=355}}</ref>. Toutefois, plusieurs éléments clés aident au diagnostic. Il faut savoir que l'hyperthermie maligne peut survenir à tout moment au cours des périodes peropératoire et postopératoire, et ce, jusqu'à 1 heure après l'arrêt de l'administration des agents volatils <ref name=":0" /><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Ronald S.|nom1=Litman|prénom2=Christopher D.|nom2=Flood|prénom3=Richard F.|nom3=Kaplan|prénom4=Yung Ly|nom4=Kim|titre=Postoperative Malignant Hyperthermia|périodique=Anesthesiology|volume=109|numéro=5|date=2008-11-01|issn=0003-3022|doi=10.1097/aln.0b013e31818958e5|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1097/aln.0b013e31818958e5|consulté le=2021-05-17|pages=825–829}}</ref>. Il faut aussi garder en tête que jusqu'à 90% des patients n'ont pas d'antécédents familiaux clairs d'hyperthermie maligne. | |||
Les patients atteints d'hyperthermie maligne peuvent se plaindre <ref name=":2" /><ref name=":5" />: | Les patients atteints d'hyperthermie maligne peuvent se plaindre <ref name=":2" /><ref name=":5" />: | ||
* de {{Symptôme | nom = dyspnée}} | * de {{Symptôme | nom = dyspnée}} | ||
Ligne 105 : | Ligne 115 : | ||
* de {{Symptôme | nom = spasmes musculaires}}. | * de {{Symptôme | nom = spasmes musculaires}}. | ||
=== Examen clinique === | === Examen clinique === | ||
À l'examen clinique incluant les paramètres de monitoring lors de la chirurgie, il est possible de retrouver les éléments suivants : | À l'examen clinique, incluant les paramètres de monitoring lors de la chirurgie, il est possible de retrouver les éléments suivants : | ||
* aux {{Examen clinique|nom=signes vitaux}} : | * aux {{Examen clinique|nom=signes vitaux}} : | ||
** une {{Signe clinique|nom=tachypnée}} | ** une {{Signe clinique|nom=tachypnée}} | ||
** une {{Signe clinique|nom=hypoxémie}} | ** une {{Signe clinique|nom=hypoxémie}} | ||
** une {{Signe clinique|nom=hypercapnie}} au moniteur de | ** une {{Signe clinique|nom=hypercapnie}} au moniteur de CO<sub>2</sub>, soit l'augmentation du [[End-tidal CO2|end-tidal CO<sub>2</sub>]] (EtCO<sub>2</sub>) malgré une augmentation de la ventilation minute<ref group="note">Une augmentation du ETCO2 est sensible pour l'HM, mais peut être graduelle, voire masquée par l'augmentation de la ventilation minute si la succinylcholine n'est pas utilisée. Dans un contexte d'arrêt cardiaque, la saturation en O2 et le ETCO2 vont chuter rapidement.</ref> <ref>{{Citation d'un article|prénom1=A. N.|nom1=Pollock|prénom2=E. E.|nom2=Langton|prénom3=K.|nom3=Couchman|prénom4=K. M.|nom4=Stowell|titre=Suspected Malignant Hyperthermia Reactions in New Zealand|périodique=Anaesthesia and Intensive Care|volume=30|numéro=4|date=2002-08|issn=0310-057X|issn2=1448-0271|doi=10.1177/0310057x0203000410|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1177/0310057x0203000410|consulté le=2021-05-17|pages=453–461}}</ref><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Steven ML|nom1=Karan|prénom2=Frank|nom2=Crowl|prénom3=Sheila M.|nom3=Muldoon|titre=Malignant Hyperthermia Masked by Capnographic Monitoring|périodique=Anesthesia & Analgesia|volume=78|numéro=3|date=1994-03-XX|issn=0003-2999|doi=10.1213/00000539-199403000-00029|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1213/00000539-199403000-00029|consulté le=2021-05-17|pages=590???592}}</ref> | ||
**une {{Signe clinique|nom=tachycardie}} | **une {{Signe clinique|nom=tachycardie}} | ||
**de l'{{Signe clinique|nom=hypotension}} | **de l'{{Signe clinique|nom=hypotension artérielle}} | ||
**une absence de pouls si arrêt cardiaque | |||
**de l'{{Signe clinique|nom=hyperthermie}} : | **de l'{{Signe clinique|nom=hyperthermie}} : | ||
*** celle-ci peut être marquée avec une augmentation de 1 à | *** celle-ci peut être marquée avec une augmentation de 1 à 2 °C chaque 5 minutes et atteindre 44°C | ||
*** la vitesse d'augmentation de la température est plus | *** la vitesse d'augmentation de la température est plus significative que la valeur du pic de températur | ||
* à l'{{Examen clinique|nom=examen cutané}} : | * à l'{{Examen clinique|nom=examen cutané}} : | ||
** de la {{Signe clinique|nom=sudation}} | ** de la {{Signe clinique|nom=sudation}} | ||
** un {{Signe clinique|nom=érythème généralisé}} | ** un {{Signe clinique|nom=érythème généralisé}} | ||
** une {{Signe clinique|nom=cyanose marbrée}} (signe tardif) | ** une {{Signe clinique|nom=cyanose|affichage=cyanose marbrée|texture=marbrée}} (signe tardif) | ||
* à l'{{Examen clinique|nom=examen neurologique}} : | * à l'{{Examen clinique|nom=examen neurologique}} : | ||
** une {{Signe clinique|nom=rigidité musculaire généralisée}} ou un {{Signe clinique|nom=spasme du muscle masseter}}<ref group="note">Le spasme du muscle masséter avec la succinylcholine est un signe précoce chez plusieurs patients.</ref>. | ** une {{Signe clinique|nom=rigidité musculaire généralisée}} ou un {{Signe clinique|nom=Trismus (signe clinique)|affichage=spasme du muscle masseter}}<ref group="note">Le spasme du muscle masséter avec la succinylcholine est un signe précoce chez plusieurs patients.</ref>. | ||
== Examens paracliniques == | == Examens paracliniques == | ||
=== Laboratoires === | === Laboratoires === | ||
Lors d'un épisode présumé ou suspecté, les examens de laboratoire suivants sont requis : | |||
* une {{Examen paraclinique | nom = FSC | indication = Indication}} : | * une {{Examen paraclinique | nom = FSC | indication = Indication}} : | ||
** une anémie et thrombocytopénie secondaire à une CIVD sont à rechercher | ** une anémie et thrombocytopénie secondaire à une CIVD sont à rechercher | ||
* les {{Examen paraclinique | nom = électrolytes | indication = Indication}} | * les {{Examen paraclinique | nom = électrolytes | indication = Indication}} : | ||
** l'{{Signe paraclinique | nom = hyperkaliémie}}, secondaire à la rhabdomyolyse | |||
* les {{Examen paraclinique | nom = CK }} et la {{Examen paraclinique | nom = myoglobine sérique }} | |||
* une {{Examen paraclinique | nom = créatininémie }} | * une {{Examen paraclinique | nom = créatininémie }} | ||
** une IRA est une complication fréquente | ** une IRA est une complication fréquente | ||
* des tests de coagulation ({{Examen paraclinique | nom = INR }}, {{Examen paraclinique | nom = TCA }}, {{Examen paraclinique | nom = D-dimère }}, {{Examen paraclinique | nom = fibrinogène }}) | * des tests de coagulation ({{Examen paraclinique | nom = INR }}, {{Examen paraclinique | nom = TCA }}, {{Examen paraclinique | nom = D-dimère }}, {{Examen paraclinique | nom = fibrinogène }}) | ||
** vérifier la coagulation régulièrement | ** vérifier la coagulation régulièrement | ||
Ligne 139 : | Ligne 149 : | ||
** une {{Signe paraclinique | nom = acidose respiratoire}} due à l'{{Signe paraclinique | nom = hypercapnie}} | ** une {{Signe paraclinique | nom = acidose respiratoire}} due à l'{{Signe paraclinique | nom = hypercapnie}} | ||
** une {{Signe paraclinique | nom = acidose métabolique}} avec diminution des bicarbonates | ** une {{Signe paraclinique | nom = acidose métabolique}} avec diminution des bicarbonates | ||
* une {{Examen paraclinique | nom = analyse d'urine | indication = Indication}} | * une {{Examen paraclinique | nom = analyse d'urine | indication = Indication}} pour vérifier la présence d'une {{Signe paraclinique | nom = myoglobinurie}}. | ||
=== Tests de susceptibilité génétique === | === Tests de susceptibilité génétique === | ||
Ce sont des tests à faire en dehors de la période aiguë. | |||
{| class="wikitable" | {| class="wikitable" | ||
|+Tests de susceptibilité génétique<ref name=":2" /> | |+Tests de susceptibilité génétique<ref name=":2" /> | ||
Ligne 150 : | Ligne 161 : | ||
| | | | ||
* Représente l'étalon d'or pour le diagnostic de l'hyperthermie maligne | * Représente l'étalon d'or pour le diagnostic de l'hyperthermie maligne | ||
* Est un test de contracture ''in vitro'' qui vise à exposer un échantillon de fibres musculaires à l'halothane et à la caféine pour déterminer la réponse musculaire aux anesthésiques halogénés. | * Est un test de contracture ''in vitro'' qui vise à exposer un échantillon frais de fibres musculaires prélevé dans un grand muscle, habituellement le quadriceps, et ce, dans un centre désigné, à l'halothane et à la caféine pour déterminer la réponse musculaire aux anesthésiques halogénés. | ||
* Deux protocoles sont utilisés : le protocole IVCT par le European Malignant Hyperthermia group (EMHG) et le protoocle CHCT par le North American Malignant hyperthermia group (NAMHG). Ils ont respectivement une sensibilité de 99% et 97%, alors que leur spécificité est de 94% et 78%. | * Deux protocoles sont utilisés : le protocole IVCT par le European Malignant Hyperthermia group (EMHG) et le protoocle CHCT par le North American Malignant hyperthermia group (NAMHG). Ils ont respectivement une sensibilité de 99% et 97%, alors que leur spécificité est de 94% et 78%. | ||
* Avec le protocole EMHG, un individu est considéré comme susceptible à l'hyperthermie maligne si le test à la caféine et/ou à l'halothane est (sont) positif(s). | * Avec le protocole EMHG, un individu est considéré comme susceptible à l'hyperthermie maligne si le test à la caféine et/ou à l'halothane est (sont) positif(s). | ||
Ligne 159 : | Ligne 170 : | ||
* Les tests génétiques pour les mutations du RYR1 ou d'autres variantes génétiques associées associées à la MH deviennent de plus en plus utiles à mesure que les tests s'améliorent et que les mutations sont identifiées. | * Les tests génétiques pour les mutations du RYR1 ou d'autres variantes génétiques associées associées à la MH deviennent de plus en plus utiles à mesure que les tests s'améliorent et que les mutations sont identifiées. | ||
* La recherche de tous les variants du gène RYR1 connus a une sensibilité d'environ 70% <ref name=":2" /><ref>{{Citation d'un article|titre=Keyword Index to Volume 11|périodique=European Journal of Human Genetics|volume=11|numéro=12|date=2003-11-27|issn=1018-4813|issn2=1476-5438|doi=10.1038/sj.ejhg.5201123|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1038/sj.ejhg.5201123|consulté le=2021-05-20|pages=982–985}}</ref><ref>{{Citation d'un article|langue=en|prénom1=Dorota|nom1=Fiszer|prénom2=Marie-Anne|nom2=Shaw|prénom3=Nickla A.|nom3=Fisher|prénom4=Ian M.|nom4=Carr|titre=Next-generation Sequencing of RYR1 and CACNA1S in Malignant Hyperthermia and Exertional Heat Illness|périodique=Anesthesiology|volume=122|numéro=5|date=2015-05-01|issn=0003-3022|pmid=25658027|pmcid=PMC4472733|doi=10.1097/ALN.0000000000000610|lire en ligne=https://pubs.asahq.org/anesthesiology/article/122/5/1033/12429/Next-generation-Sequencing-of-RYR1-and-CACNA1S-in|consulté le=2021-05-20|pages=1033–1046}}</ref><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Yoshitatsu|nom1=Sei|prénom2=Nyamkhishig N.|nom2=Sambuughin|prénom3=Edward J.|nom3=Davis|prénom4=Daniel|nom4=Sachs|titre=Malignant Hyperthermia in North America|périodique=Anesthesiology|volume=101|numéro=4|date=2004-10-01|issn=0003-3022|doi=10.1097/00000542-200410000-00005|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1097/00000542-200410000-00005|consulté le=2021-05-20|pages=824–830}}</ref> | * La recherche de tous les variants du gène RYR1 connus a une sensibilité d'environ 70% <ref name=":2" /><ref>{{Citation d'un article|titre=Keyword Index to Volume 11|périodique=European Journal of Human Genetics|volume=11|numéro=12|date=2003-11-27|issn=1018-4813|issn2=1476-5438|doi=10.1038/sj.ejhg.5201123|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1038/sj.ejhg.5201123|consulté le=2021-05-20|pages=982–985}}</ref><ref>{{Citation d'un article|langue=en|prénom1=Dorota|nom1=Fiszer|prénom2=Marie-Anne|nom2=Shaw|prénom3=Nickla A.|nom3=Fisher|prénom4=Ian M.|nom4=Carr|titre=Next-generation Sequencing of RYR1 and CACNA1S in Malignant Hyperthermia and Exertional Heat Illness|périodique=Anesthesiology|volume=122|numéro=5|date=2015-05-01|issn=0003-3022|pmid=25658027|pmcid=PMC4472733|doi=10.1097/ALN.0000000000000610|lire en ligne=https://pubs.asahq.org/anesthesiology/article/122/5/1033/12429/Next-generation-Sequencing-of-RYR1-and-CACNA1S-in|consulté le=2021-05-20|pages=1033–1046}}</ref><ref>{{Citation d'un article|prénom1=Yoshitatsu|nom1=Sei|prénom2=Nyamkhishig N.|nom2=Sambuughin|prénom3=Edward J.|nom3=Davis|prénom4=Daniel|nom4=Sachs|titre=Malignant Hyperthermia in North America|périodique=Anesthesiology|volume=101|numéro=4|date=2004-10-01|issn=0003-3022|doi=10.1097/00000542-200410000-00005|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1097/00000542-200410000-00005|consulté le=2021-05-20|pages=824–830}}</ref> | ||
* Les nouveaux tests se font par séquençage nouvelle génération de l'exome entier ou des exons <ref name=":2" />. Le séquençage de l'exome entier a une meilleure sensibilité, car il recherche | * Les nouveaux tests se font par séquençage nouvelle génération de l'exome entier ou des exons <ref name=":2" />. Le séquençage de l'exome entier a une meilleure sensibilité, car il recherche toutes les mutations associées à l'hyperthermie maligne qui sont connues. | ||
* Ce test est beaucoup moins invasifs et requiert une moindre organisation de déplacement pour le patient, puisque c'est l'échantillon qui se déplace. | |||
|} | |} | ||
Ligne 173 : | Ligne 185 : | ||
|- | |- | ||
!Rigidité | !Rigidité | ||
|A) Rigidité musculaire généralisée (en l'absence de frissonnements | |A) Rigidité musculaire généralisée (en l'absence de frissonnements dûs à l'hypothermie, ou durant ou immédiatement après l'émergence d'une anesthésie par agents volatils) | ||
B) Spasme du muscle masseter survenant rapidement après l'administration de succinylcholine | B) Spasme du muscle masseter survenant rapidement après l'administration de succinylcholine | ||
|A) 15 | |A) 15 | ||
Ligne 210 : | Ligne 222 : | ||
D) PaCO2 > 65 mmHg en ventilation spontanée | D) PaCO2 > 65 mmHg en ventilation spontanée | ||
E) Hypercapnie inappropriée (selon le jugement de l'anesthésiologiste) | E) Hypercapnie inappropriée et progressive (selon le jugement de l'anesthésiologiste) | ||
F) Tachypnée inappropriée | F) Tachypnée inappropriée | ||
Ligne 228 : | Ligne 240 : | ||
de la température | de la température | ||
|A. Augmentation rapide inappropriée de la température (selon le jugement de l'anesthésiologiste) | |A. Augmentation rapide inappropriée de la température (selon le jugement de l'anesthésiologiste) | ||
B. | B. Augmentation de la température au-delà de 38.8 oC de façon inapropriée dans la période péri-opératoire | ||
|A) 15 | |A) 15 | ||
B) 10 | B) 10 | ||
Ligne 267 : | Ligne 279 : | ||
== Diagnostic == | == Diagnostic == | ||
L'hyperthermie maligne devrait être fortement suspectée durant un épisode aigu en présence de signes et symptômes compatibles chez des gens ayant reçu des | L'hyperthermie maligne devrait être fortement suspectée durant un épisode aigu en présence de signes et symptômes compatibles chez des gens ayant reçu des déclencheurs reconnus. Il n'existe pas de test spécifique confirmant l'hyperthermie maligne en aigu. Le diagnostic est alors clinique et présomptif en l'absence d'une autre cause probable. | ||
Les examens paracliniques peuvent supporter le diagnostic, mais ne sont pas nécessaires. | Les examens paracliniques peuvent supporter le diagnostic, mais ne sont pas nécessaires. | ||
Ligne 284 : | Ligne 296 : | ||
* la {{Diagnostic différentiel | nom = thyrotoxicose}} | * la {{Diagnostic différentiel | nom = thyrotoxicose}} | ||
* le {{Diagnostic différentiel | nom = phéochromocytome}} | * le {{Diagnostic différentiel | nom = phéochromocytome}} | ||
* l'{{Diagnostic différentiel | nom = hyperthermie | * l'{{Diagnostic différentiel | nom = hyperthermie iatrogénique}} | ||
* le {{Diagnostic différentiel | nom = syndrome neuroleptique malin}} | * le {{Diagnostic différentiel | nom = syndrome neuroleptique malin}} | ||
* le {{Diagnostic différentiel | nom = syndrome sérotoninergique}} | * le {{Diagnostic différentiel | nom = syndrome sérotoninergique}} | ||
Ligne 306 : | Ligne 318 : | ||
== Traitement == | == Traitement == | ||
Le traitement de l'hyperthermie maligne doit être débuté rapidement lorsque celle-ci est suspectée. | Le traitement de l'hyperthermie maligne doit être débuté rapidement lorsque celle-ci est suspectée. Un meilleur pronostic pour les patients est associé à la rapidité du diagnostic, au traitement rapide par le dantrolène et à la prévention agressive de l'élévation rapide et progressive de la température centrale en utilisant des mesures de refroidissement.<ref name=":9">{{Citation d'un article|prénom1=Marilyn Green|nom1=Larach|prénom2=Barbara W.|nom2=Brandom|prénom3=Gregory C.|nom3=Allen|prénom4=Gerald A.|nom4=Gronert|titre=Malignant hyperthermia deaths related to inadequate temperature monitoring, 2007-2012: a report from the North American malignant hyperthermia registry of the malignant hyperthermia association of the United States|périodique=Anesthesia and Analgesia|volume=119|numéro=6|date=2014-12|issn=1526-7598|pmid=25268394|doi=10.1213/ANE.0000000000000421|lire en ligne=https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25268394/|consulté le=2021-05-21|pages=1359–1366}}</ref><ref name=":0" /> | ||
{| class="wikitable" | {| class="wikitable" | ||
|+Traitements de l'hyperthermie maligne<ref name=":2" /><ref name=":0" /> | |+Traitements de l'hyperthermie maligne<ref name=":2" /><ref name=":0" /> | ||
! | !Intervention | ||
! | !Description | ||
|- | |- | ||
!{{Traitement | nom = Arrêt de l'agent déclencheur}} | !{{Traitement | nom = Arrêt de l'agent déclencheur}} | ||
| | | | ||
* Arrêter les agents inhalés et/ou ajouter les filtres de charbon | * Arrêter les agents inhalés et/ou ajouter les filtres de charbon activé dans le circuit anesthgésique | ||
* Ne pas répéter l'administration de succinylcholine | * Ne pas répéter l'administration de succinylcholine | ||
* Utiliser des agents anesthésiques sécuritaires pour le reste de la chirurgie | * Utiliser des agents anesthésiques sécuritaires pour le reste de la chirurgie | ||
* | * En per-opératoire, avertir le chirurgien et compléter la chirurgie le plus rapidement possible. | ||
|- | |- | ||
!Soins de support | !Soins de support | ||
Ligne 332 : | Ligne 344 : | ||
** D'autres mesures plus invasives peuvent être utilisées (drain thoracique, sonde vésicale) | ** D'autres mesures plus invasives peuvent être utilisées (drain thoracique, sonde vésicale) | ||
** Arrêter le refroidissement à 38,5 °C | ** Arrêter le refroidissement à 38,5 °C | ||
*Maintenir un | *Maintenir un débit urinaire de 2 mL/kg avec : | ||
**{{Traitement | nom = Mannitol}} (3g de mannitol sont inclus dans chaque flacon de dantrolène) | **{{Traitement | nom = Mannitol}} (3g de mannitol sont inclus dans chaque flacon de dantrolène) | ||
**{{Traitement | nom = Furosémide}} | **{{Traitement | nom = Furosémide}} | ||
Ligne 342 : | Ligne 354 : | ||
**Ne pas utiliser des bloqueurs des canaux calciques à cause du risque d'hyperkaliémie et d'hypotension <ref name=":0" /><ref name=":1" /> | **Ne pas utiliser des bloqueurs des canaux calciques à cause du risque d'hyperkaliémie et d'hypotension <ref name=":0" /><ref name=":1" /> | ||
**Faire les manoeuvres de l'ACLS au besoin | **Faire les manoeuvres de l'ACLS au besoin | ||
**La plupart des arythmies | **La plupart des arythmies répondent au traitement de l'hyperkaliémie et de l'acidose | ||
*Traiter l'hyperkaliémie si arythmie ou potassium > 6 mEq / L | *Traiter l'hyperkaliémie; si arythmie ou potassium > 6 mEq / L | ||
**Chlorure de calcium 0.5 à 1 g IV ou gluconate de calcium 1.5 à 3 g IV, à répéter après 5 minutes si changement à l'ECG persistent | **Chlorure de calcium 0.5 à 1 g IV ou gluconate de calcium 1.5 à 3 g IV, à répéter après 5 minutes si changement à l'ECG persistent | ||
**Bicarbonates de sodium 1 à 2 mEq/kg IV sur 5 à 10 minutes (maximum 100 mEq par dose)<ref group="note">Ne pas administrer dans la même ligne que le calcium.</ref> | **Bicarbonates de sodium 1 à 2 mEq/kg IV sur 5 à 10 minutes (maximum 100 mEq par dose)<ref group="note">Ne pas administrer dans la même ligne que le calcium.</ref> | ||
**Insuline et dextrose : vérifier le glucose q heure. | **Insuline et dextrose : vérifier le glucose q heure. | ||
***10 unités IV d'insuline régulière avec 50 mL de dextrose 50% | ***10 unités IV d'insuline régulière avec 50 mL de dextrose 50% | ||
*Traiter l'acidose métabolique si déficit en base ≥8 mEq/L | *Traiter l'acidose métabolique; si déficit en base ≥8 mEq/L | ||
**Bicarbonates de sodium 1 à 2 mEq/kg IV sur 5 à 10 minutes (maximum 100 mEq par dose) | **Bicarbonates de sodium 1 à 2 mEq/kg IV sur 5 à 10 minutes (maximum 100 mEq par dose) | ||
|- | |- | ||
Ligne 355 : | Ligne 367 : | ||
* Administrer le dantrolène à une dose de 2,5 mg / kg iv | * Administrer le dantrolène à une dose de 2,5 mg / kg iv | ||
* 1 mg/kg q 4-8h pour 24-48h une fois l'événement initial contrôlé | * 1 mg/kg q 4-8h pour 24-48h une fois l'événement initial contrôlé | ||
*Si détérioration : bolus de 2.5mg/kg | *Si détérioration : répéter un bolus de 2.5mg/kg | ||
* Cette étape est critique dans le traitement de l'hyperthermie maligne. Il s'agit du seul médicament spécifique utilisé pour traiter une crise d'hyperthermie maligne. | * Cette étape est critique dans le traitement de l'hyperthermie maligne. Il s'agit du seul médicament spécifique utilisé pour traiter une crise d'hyperthermie maligne. | ||
* Répéter chaque 10 à 15 minutes jusqu'à ce que la réaction cesse. | * Répéter chaque 10 à 15 minutes jusqu'à ce que la réaction cesse. | ||
* Il n'y a pas de dose maximale, mais le diagnostic devrait être reconsidéré si > 10 mg/kg | * Il n'y a pas de dose maximale, mais le diagnostic devrait être reconsidéré si > 10 mg/kg sont nécessaires. | ||
* Le dantrolène agit en inhibant la libération d'ions | * Le dantrolène agit en inhibant la libération d'ions calciques du réticulum sarcoplasmique. Son mécanisme d'action consiste à antagoniser les récepteurs de la ryanodine, ce qui diminue le couplage excitation-contraction des cellules musculaires. | ||
|} | |} | ||
== Suivi == | == Suivi == | ||
Une fois le patient stabilisé, il doit être conduit à l'unité de soins intensifs pendant au moins 24 heures pour une surveillance notamment des signes de recrudescence (principalement ré-augmentation de la température) <ref name=":2" />. Les patients les plus à risque de recrudescence sont ceux qui ont une masse musculaire importante ou qui ont subi | Une fois le patient stabilisé, il doit être conduit à l'unité de soins intensifs pendant au moins 24 heures pour une surveillance, notamment des signes de recrudescence (principalement ré-augmentation de la température) <ref name=":2" />. Les patients les plus à risque de recrudescence sont ceux qui ont une masse musculaire importante ou qui ont subi plus de 150 minutes d'exposition anesthésique avant le déclenchement de l'hyperthermie maligne. <ref name=":0" /> En moyenne, 20% des patients auront une récurrence de l'épisode et elle survient, en moyenne, 13 heures après l'épisode initial <ref name=":10">{{Citation d'un article|prénom1=James M.|nom1=Burkman|prénom2=Karen L.|nom2=Posner|prénom3=Karen B.|nom3=Domino|titre=Analysis of the Clinical Variables Associated with Recrudescence after Malignant Hyperthermia Reactions|périodique=Anesthesiology|volume=106|numéro=5|date=2007-05-01|issn=0003-3022|doi=10.1097/01.anes.0000265148.86566.68|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.1097/01.anes.0000265148.86566.68|consulté le=2021-05-21|pages=901–906}}</ref><ref name=":8" />. | ||
Les patients devraient être surveillés pour l'apparition d'une CIVD, d'un syndrome du compartiment et de l'insuffisance rénale aiguë. | Les patients devraient être surveillés pour l'apparition d'une CIVD, d'un syndrome du compartiment et de l'insuffisance rénale aiguë. L'administration de dantrolène peut être cessée lorsque les critères suivants sont atteints <ref name=":10" />: | ||
* Stabilité métabolique pour 24 heures | * Stabilité métabolique pour 24 heures | ||
* Température centrale < 38°C | * Température centrale < 38°C | ||
* Créatine kinase | * Créatine kinase en diminution | ||
* Pas d'évidence de myoglobinurie | * Pas d'évidence de myoglobinurie | ||
* Absence de rigidité musculaire. | * Absence de rigidité musculaire. | ||
Ligne 383 : | Ligne 395 : | ||
* l'{{Complication | nom = infarctus du myocarde}} | * l'{{Complication | nom = infarctus du myocarde}} | ||
* l'{{Complication | nom = ischémie mésentérique aiguë}} | * l'{{Complication | nom = ischémie mésentérique aiguë}} | ||
* un {{Complication | nom = syndrome du compartiment}} | * un {{Complication | nom = syndrome du compartiment}} secondaire à l'oedème des muscles profonds | ||
* l'{{Complication | nom = oedème pulmonaire}} | * l'{{Complication | nom = oedème pulmonaire}} | ||
* la {{Complication | nom = mort}}. | * la {{Complication | nom = mort}}. | ||
== Évolution == | == Évolution == | ||
Une guérison complète peut se produire si les signes et les symptômes de | Une guérison complète peut se produire si les signes et les symptômes de l'hyperthermie maligne sont reconnus précocement et si un traitement approprié est instauré. Cependant, une défaillance de plusieurs organes et la mort peuvent encore survenir, même avec un traitement rapide. Le taux de mortalité actuel est inférieur à 5% .<ref name=":0" /> | ||
== Prévention == | == Prévention == | ||
Après un épisode aigu d'hyperthermie maligne, | Après un épisode aigu d'hyperthermie maligne, il est conseillé au patient de subir un test de susceptibilité génétique pour confirmer le diagnostic <ref name=":2" />. | ||
Ces patients devraient éviter les déclencheurs potentiels <ref name=":2" />. Ils devraient idéalement être vus en évaluation pré-opératoire pour | Ces patients devraient éviter les déclencheurs potentiels <ref name=":2" />. Ils devraient idéalement être vus en évaluation pré-opératoire pour toute chirurgie élective. Ils peuvent être opérés sous anesthésie locale ou régionale sans problème. Si une sédation ou une anesthésie générale est nécessaire, ils devraient être pris en charge avec des relaxants musculaires non-dépolarisants ainsi que des agents anesthésiques IV. | ||
Les membres de la famille des patients souffrant d'hyperthermie maligne doivent être informés de l'aspect génétique de la maladie <ref name=":2" />. On devrait également leur offrir un dépistage génétique. Si jamais celui-ci s'avère négatif, la biopsie musculaire devrait être considérée pour le test de contracture halothane-caféine. | Les membres de la famille des patients souffrant d'hyperthermie maligne doivent être informés de l'aspect génétique de la maladie <ref name=":2" />. On devrait également leur offrir un dépistage génétique. Si jamais celui-ci s'avère négatif, la biopsie musculaire devrait être considérée pour le test de contracture halothane-caféine. | ||
Bien qu'il ait été fréquemment pratiqué dans le passé, le | Bien qu'il ait été fréquemment pratiqué dans le passé, le traitement prophylactique des patients susceptibles à l'hyperthermie maligne avec du dantrolène ne joue aucun rôle dans leurs soins et ne doit pas être proposé. Ces patients devraient plutôt recevoir une anesthésie sans élément déclencheur. <ref name=":0" /> | ||
Finalement, les personnes connues pour n'importe quelle forme de myopathie ne devraient pas recevoir de succinylcholine et les agents inhalés devraient être utilisés avec prudence. Les patients de moins de 12 ans ne devrait pas non plus recevoir | Finalement, les personnes connues pour n'importe quelle forme de myopathie ne devraient pas recevoir de succinylcholine et les agents inhalés devraient être utilisés avec prudence. Les patients de moins de 12 ans ne devrait pas non plus recevoir de succinylcholine pour les procédures électives afin d'éviter une possible hyperkaliémie chez un patient avec une dystrophie musculaire non diagnostiquée. | ||
== Notes == | == Notes == |
Dernière version du 19 avril 2024 à 13:55
Maladie | |||
Caractéristiques | |||
---|---|---|---|
Signes | Hypercapnie, Hypoxémie, Tachycardie , Tachypnée , Cyanose , Érythème généralisé, Rigidité musculaire généralisée, Trismus , Hypotension artérielle , Diaphorèse , ... [+] | ||
Symptômes |
Spasmes musculaires, Dyspnée , Rigidité musculaire, Palpitations , Diaphorèse | ||
Diagnostic différentiel |
Sepsis, Rhabdomyolyse, Hyperthyroïdie, Phéochromocytome, Syndrome de Prader-Willi, Hémorragie intracrânienne, Dystrophie musculaire, Agent de contraste, Coup de chaleur, Ostéogenèse imparfaite, ... [+] | ||
Informations | |||
Terme anglais | Malignant hyperthermia | ||
Wikidata ID | Q1585081 | ||
SNOMED CT ID | 405501007 | ||
Spécialités | Médecine d'urgence, Soins intensifs, Médecine interne, Anesthésiologie | ||
|
L'hyperthermie maligne (HM) est une maladie héréditaire autosomique dominante du muscle squelettique qui se présente classiquement comme une réponse hypermétabolique reliée à l'utilisation des agents volatils halogénés, à la succinylcholine, un relaxant musculaire dépolarisant, ou, plus rarement, à l'exercice vigoureux et à la chaleur. [1]
Épidémiologie
L'incidence exacte de l'hyperthermie maligne est inconnue. En effet, il existe une variabilité interindividuelle importante et les patients doivent être exposés en moyenne trois fois à une anesthésie avant d'avoir une première crise [2][3][4]. La prévalence de gens porteurs d'une prédiposition à l'hyperthermie maligne est d'environ 1:4000 et jusqu'à 1:3000 dans la population générale [3]. Selon la littérature, l'incidence d'un épisode clinique d'hyperthermie maligne est estimée de 1:250 000 jusqu'à 1: 10 000 anesthésies [5][6].
Les enfants sont particulièrement à risque. Le groupe des 15 ans et moins comprendrait 52.1% de toutes les réactions d'hyperthermie maligne [4]. L'incidence chez les enfants serait donc de 1:30 000 contrairement à environ 1:100 000 chez les adultes [1]. Les hommes seraient plus à risque que les femmes et ce, sans égard à l'origine ethnique.
D'autres troubles sont également associés à un risque accru d'hyperthermie maligne dont [3]:
- le spasme du muscle masséter induit par la succinylcholine (qui est une rigidité importante qualifiée de « jaws of steel » contrairement à la rigidité légère normalement attendue)[note 1]
- la myopathie congénitale à cores centraux (une myopathie rare et non progressive caractérisée par une hypotonie et une faiblesse des muscles proximaux)
- le syndrome de King-Denborough (myotonie rare associée à de multiples caractéristiques physiques distinctes dont un faciès dysmorphique, les plis épicantiques, la micrognathie, la clinodactylie, la lordose lombaire et la scoliose thoracique légère).
D'autres myopathies, dont la myopathie à multi-minicore et la myopathie centronucléaire, ont aussi possiblement une association avec l'hyperthermie maligne.[1][7][3]
Étiologies
L'hyperthermie maligne est considérée comme une maladie pharmacogénétique qui se produit lorsque des patients génétiquement prédisposés sont exposés à des conditions environnementales favorisant la relâche accélérée de calcium par le réticulum sarcoplasmique des myocytes. Ces conditions incluent : [3][8][9]
- les gaz anesthésiques halogénés (excluant le protoxyde d'azote et le xénon)
- la succinylcholine
- la chaleur environnementale et l'activité physique vigoureuse.[note 2][1][3]
Le principal site de mutation lié à l'hyperthermie maligne se trouve au niveau du gène du récepteur des canaux Ca2+ de la membrane du réticulum sarcoplasmique (nommés canaux la ryanodine RYR1) [3]. D'autres loci génétiques ont été identifiés, tels que CACNA1S, une mutation dans le canal DHPR, un canal des tubules-T du sarcolemme qui transfère les changements de voltage au récepteur RYR1), ainsi les loci CASQ1, STAC3, JSPR1 ont été identifiées comme impliqués dans l'hyperthermie maligne.[1] Jusqu'à 70% des familles susceptibles à l'hyperthermie maligne ont une des 400 mutations identifiées du RYR1 et associées à l'hyperthermie maligne. [10]
Physiopathologie
Chez un individu en santé, l'acétycholine initie un potentiel d'action le long du sarcolemme jusqu'aux tubules transverses (tubules-t) et active les récepteurs de la dihydropyridine ou DHPR (des canaux calciques voltage-dépendants)[11]. Ceci permet l'ouverture des canaux RYR1 adjacents au niveau du réticulum sarcoplasmique, ce qui mène à une libération de calcium dans le cytosol et à la contraction musculaire. La relaxation des fibres musculaires est facilitée par le retour du calcium dans le réticulum sarcoplasmique par les pompes ioniques sarco/endoplasmique CA2+/ATPase (SERCA)[11].
Dans l'hyperthermie maligne, la libération de calcium dans le cytosol par les canaux RYR1 mutés est tellement importante que les pompes SERCA sont incapables de compenser, mènant à une augmentation des niveaux de calcium intracellulaires, ainsi qu'à une rigidité musculaire persistante. Cette contraction musculaire soutenue produit une déplétion d'adénosine triphosphate (ATP) et augmente considérablement la consommation d'oxygène et la production de dioxyde de carbone et de chaleur, amenant une hypercapnie, l'hyperthermie et éventuellement l'acidose respiratoire et métabolique. L'épuisement des réserves d'ATP conduit à une défaillance de l'intégrité de la membrane (rhabdomyolyse) et à des fuites de contenu cellulaire tel que le potassium (hyperkaliémie), la créatinine kinase et la myoglobine dans la circulation. Il peut s'en suivre des arythmies cardiaques, une insuffisance rénale aiguë, une CIVD et la mort.[12][13][1][11][3]
Schématisation de la physiopathologie de l'hyperthermie maligne
Présentation clinique
Facteurs de risque
Plusieurs facteurs de risque de l'hyperthermie maligne ont été identifiés :
- l'âge, surtout chez la population pédiatrique
- le sexe masculin
- la présence de masse musculaire importante
- l'exposition répétée aux agents anesthésiants volatils halogénés ou à la succinylcholine
- les chirurgies musculosquelettiques.
Questionnaire
La crise d'hyperthermie maligne est difficile à reconnaitre étant donné la variabilité de sa présentation[3][14]. Toutefois, plusieurs éléments clés aident au diagnostic. Il faut savoir que l'hyperthermie maligne peut survenir à tout moment au cours des périodes peropératoire et postopératoire, et ce, jusqu'à 1 heure après l'arrêt de l'administration des agents volatils [1][15]. Il faut aussi garder en tête que jusqu'à 90% des patients n'ont pas d'antécédents familiaux clairs d'hyperthermie maligne.
Les patients atteints d'hyperthermie maligne peuvent se plaindre [3][11]:
- de dyspnée
- de palpitations
- de sudation excessive
- de rigidité musculaire généralisée
- de spasmes musculaires.
Examen clinique
À l'examen clinique, incluant les paramètres de monitoring lors de la chirurgie, il est possible de retrouver les éléments suivants :
- aux signes vitaux :
- une tachypnée
- une hypoxémie
- une hypercapnie au moniteur de CO2, soit l'augmentation du end-tidal CO2 (EtCO2) malgré une augmentation de la ventilation minute[note 3] [16][17]
- une tachycardie
- de l'hypotension artérielle
- une absence de pouls si arrêt cardiaque
- de l'hyperthermie :
- celle-ci peut être marquée avec une augmentation de 1 à 2 °C chaque 5 minutes et atteindre 44°C
- la vitesse d'augmentation de la température est plus significative que la valeur du pic de températur
- à l'examen cutané :
- de la sudation
- un érythème généralisé
- une cyanose marbrée (signe tardif)
- à l'examen neurologique :
Examens paracliniques
Laboratoires
Lors d'un épisode présumé ou suspecté, les examens de laboratoire suivants sont requis :
- une FSC :
- une anémie et thrombocytopénie secondaire à une CIVD sont à rechercher
- les électrolytes :
- l'hyperkaliémie, secondaire à la rhabdomyolyse
- les CK et la myoglobine sérique
- une créatininémie
- une IRA est une complication fréquente
- des tests de coagulation (INR, TCA, D-dimère, fibrinogène)
- vérifier la coagulation régulièrement
- diminution du fibrinogène avec augmentation des D-dimères, augmentation de l'INR et augmentation du TCA si CIVD
- un gaz :
- une hypoxémie avec augmentation des lactates
- une acidose respiratoire due à l'hypercapnie
- une acidose métabolique avec diminution des bicarbonates
- une analyse d'urine pour vérifier la présence d'une myoglobinurie.
Tests de susceptibilité génétique
Ce sont des tests à faire en dehors de la période aiguë.
Test | Description |
---|---|
Tests de contracture halothane-caféine |
|
Test de génétique moléculaire |
|
Approche clinique
Un score clinique a été développé pour aider au diagnostic de l'hyperthermie maligne [21]. Celui-ci a été développé à l'aide d'un consensus d'experts.
Critère | Indicateur | Points | Maximum
par critère |
---|---|---|---|
Rigidité | A) Rigidité musculaire généralisée (en l'absence de frissonnements dûs à l'hypothermie, ou durant ou immédiatement après l'émergence d'une anesthésie par agents volatils)
B) Spasme du muscle masseter survenant rapidement après l'administration de succinylcholine |
A) 15
B) 15 |
15 |
Lyse musculaire | A) Élévation des CK > 20 000 unités après l'anesthésie incluant la succinylcholine
B) Élévation des CK > 10 000 unités après une anesthésie sans succinylcholine C) Urines couleur cola durant la période post-opératoire D) Myoglobine urinaire > 60 microgramme/L E) Myoglobine sérique > 170 microgramme/L F) Potassium sérique > 6 mEq/L (en l'absence d'insuffisance rénale) |
A) 15
B) 15 C) 10 D) 5 E) 5 F) 3 |
15 |
Acidose respiratoire | A) ETCO2 > 55 mmHg avec contrôle approprié de la ventilation
B) PaCO2 > 60 mmHg avec contrôle approprié de la ventilation C) ETCO2 > 60 mmHg en ventilation spontanée D) PaCO2 > 65 mmHg en ventilation spontanée E) Hypercapnie inappropriée et progressive (selon le jugement de l'anesthésiologiste) F) Tachypnée inappropriée |
A) 15
B) 15 C) 15 D) 15 E) 15 F) 10 |
15 |
Augmentation
de la température |
A. Augmentation rapide inappropriée de la température (selon le jugement de l'anesthésiologiste)
B. Augmentation de la température au-delà de 38.8 oC de façon inapropriée dans la période péri-opératoire |
A) 15
B) 10 |
15 |
Implication cardiaque | A. Tachycardie sinusale inappropriée
B. Tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire |
A) 3
B) 3 |
3 |
Note : Si plus d'un indicateur est présent pour un critère, on compte seulement les points du score le plus haut. Les points ne s'additionnent pas pour un même critère.
Points | Probabilité d'hyperthermie maligne |
---|---|
0 | Presque jamais |
3-9 | Improbable |
10-19 | Peu probable |
20-34 | Probable |
35-49 | Très probable |
50+ | Presque certain |
Diagnostic
L'hyperthermie maligne devrait être fortement suspectée durant un épisode aigu en présence de signes et symptômes compatibles chez des gens ayant reçu des déclencheurs reconnus. Il n'existe pas de test spécifique confirmant l'hyperthermie maligne en aigu. Le diagnostic est alors clinique et présomptif en l'absence d'une autre cause probable.
Les examens paracliniques peuvent supporter le diagnostic, mais ne sont pas nécessaires.
Le score clinique pour l'hyperthermie maligne peut être utilisé durant une crise aiguë, bien qu'il soit parfois utilisé en rétrospective pour évaluer la probabilité qu'il s'agissait véritablement d'une crise d'hyperthermie maligne.
Le diagnostic définitif repose sur les tests de susceptibilité génétique.
Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel pour l'hyperthermie maligne comprend les éléments suivants : [1][3]
- une anesthésie insuffisante
- une analgésie insuffisante
- une ventilation insuffisante
- une absorption de CO2 durant une laparoscopie
- un sepsis
- la thyrotoxicose
- le phéochromocytome
- l'hyperthermie iatrogénique
- le syndrome neuroleptique malin
- le syndrome sérotoninergique
- une réaction transfusionnelle
- la rhabdomyolyse induite par l'anesthésie
- un défaut d'équipement de ventilation
- la réinhalation (rebreathing)
- une intoxication à la cocaïne
- une intoxication à la MDMA
- une intoxication aux méthamphétamines
- une hémorragie intracrânienne
- une dystrophie musculaire
- un syndrome de Freeman-Sheldon
- une ostéogenèse imparfaite
- le syndrome de Prader-Willi
- le syndrome de Wolf-Hirschhorn.
En dehors de la salle d'opération, on peut penser aux diagnostics suivants :
- une hyperthermie à l'effort
- un coup de chaleur
- une injection d'agent de contraste dans le LCS[1].
Traitement
Le traitement de l'hyperthermie maligne doit être débuté rapidement lorsque celle-ci est suspectée. Un meilleur pronostic pour les patients est associé à la rapidité du diagnostic, au traitement rapide par le dantrolène et à la prévention agressive de l'élévation rapide et progressive de la température centrale en utilisant des mesures de refroidissement.[22][1]
Intervention | Description |
---|---|
arrêt de l'agent déclencheur |
|
Soins de support |
|
dantrolène |
|
Suivi
Une fois le patient stabilisé, il doit être conduit à l'unité de soins intensifs pendant au moins 24 heures pour une surveillance, notamment des signes de recrudescence (principalement ré-augmentation de la température) [3]. Les patients les plus à risque de recrudescence sont ceux qui ont une masse musculaire importante ou qui ont subi plus de 150 minutes d'exposition anesthésique avant le déclenchement de l'hyperthermie maligne. [1] En moyenne, 20% des patients auront une récurrence de l'épisode et elle survient, en moyenne, 13 heures après l'épisode initial [23][2].
Les patients devraient être surveillés pour l'apparition d'une CIVD, d'un syndrome du compartiment et de l'insuffisance rénale aiguë. L'administration de dantrolène peut être cessée lorsque les critères suivants sont atteints [23]:
- Stabilité métabolique pour 24 heures
- Température centrale < 38°C
- Créatine kinase en diminution
- Pas d'évidence de myoglobinurie
- Absence de rigidité musculaire.
Complications
Les complications de l'hyperthermie maligne comprennent: [1][3]
- la rhabdomyolyse
- l'insuffisance rénale aiguë
- l'acidose respiratoire et l'acidose métabolique
- la coagulation intravasculaire disséminée surtout lorsque la température dépasse 41°C
- des dommages cérébraux
- l'hémorragie interne
- l'insuffisance cardiaque
- l'infarctus du myocarde
- l'ischémie mésentérique aiguë
- un syndrome du compartiment secondaire à l'oedème des muscles profonds
- l'oedème pulmonaire
- la mort.
Évolution
Une guérison complète peut se produire si les signes et les symptômes de l'hyperthermie maligne sont reconnus précocement et si un traitement approprié est instauré. Cependant, une défaillance de plusieurs organes et la mort peuvent encore survenir, même avec un traitement rapide. Le taux de mortalité actuel est inférieur à 5% .[1]
Prévention
Après un épisode aigu d'hyperthermie maligne, il est conseillé au patient de subir un test de susceptibilité génétique pour confirmer le diagnostic [3].
Ces patients devraient éviter les déclencheurs potentiels [3]. Ils devraient idéalement être vus en évaluation pré-opératoire pour toute chirurgie élective. Ils peuvent être opérés sous anesthésie locale ou régionale sans problème. Si une sédation ou une anesthésie générale est nécessaire, ils devraient être pris en charge avec des relaxants musculaires non-dépolarisants ainsi que des agents anesthésiques IV.
Les membres de la famille des patients souffrant d'hyperthermie maligne doivent être informés de l'aspect génétique de la maladie [3]. On devrait également leur offrir un dépistage génétique. Si jamais celui-ci s'avère négatif, la biopsie musculaire devrait être considérée pour le test de contracture halothane-caféine.
Bien qu'il ait été fréquemment pratiqué dans le passé, le traitement prophylactique des patients susceptibles à l'hyperthermie maligne avec du dantrolène ne joue aucun rôle dans leurs soins et ne doit pas être proposé. Ces patients devraient plutôt recevoir une anesthésie sans élément déclencheur. [1]
Finalement, les personnes connues pour n'importe quelle forme de myopathie ne devraient pas recevoir de succinylcholine et les agents inhalés devraient être utilisés avec prudence. Les patients de moins de 12 ans ne devrait pas non plus recevoir de succinylcholine pour les procédures électives afin d'éviter une possible hyperkaliémie chez un patient avec une dystrophie musculaire non diagnostiquée.
Notes
- ↑ Celle-ci est une entité à par entière, mais elle peut aussi être un signe annonciateur de l'hyperthermie maligne.
- ↑ L'exposition de patients susceptibles à un exercice intense, à la chaleur ou à des températures corporelles internes élevées (par exemple, des infections) peut précipiter cette crise. Il s'agit principalement d'études animales ou de rapport de cas. Des recherches sont actuellement en cours pour évaluer ce lien possible.
- ↑ Une augmentation du ETCO2 est sensible pour l'HM, mais peut être graduelle, voire masquée par l'augmentation de la ventilation minute si la succinylcholine n'est pas utilisée. Dans un contexte d'arrêt cardiaque, la saturation en O2 et le ETCO2 vont chuter rapidement.
- ↑ Le spasme du muscle masséter avec la succinylcholine est un signe précoce chez plusieurs patients.
- ↑ Ne pas administrer dans la même ligne que le calcium.
Références
- Cette page a été modifiée ou créée le 2021/01/31 à partir de Malignant Hyperthermia (StatPearls / Malignant Hyperthermia (2020/03/24)), écrite par les contributeurs de StatPearls et partagée sous la licence CC-BY 4.0 international (jusqu'au 2022-12-08). Le contenu original est disponible à https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28613578 (livre).
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