ULaval:MED-1219/Santé autochtone

De Wikimedica
Ce guide d’étude a été élaboré par les volontaires de Wikimedica dans le cadre du cours MED-1219 à l'Université Laval et est basé sur le travail des responsables du cours. Il est fourni comme aide à l'étude et ne constitue pas un document officiel du cours.

En imposant les valeurs culturelles et les lois occidentales, le Canada a profondément influencé de nombreux déterminants de la santé des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Pour les Autochtones, la colonisation a provoqué une perte de leurs terres, de leurs ressources et de leur autonomie, ainsi qu’un bouleversement profond de leurs coutumes et de leurs valeurs.

Les Premières Nations relèvent de la compétence fédérale. Les gouvernements provinciaux s’assurent du bon fonctionnement des actions gouvernementales en milieu autochtone.

Commission de la Santé et des Services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador

Mission :

  • Promouvoir le mieux-être physique, mental, émotionnel et spirituel en favorisant l’accès à des programmes globaux de santé et de services sociaux adaptés aux cultures et sanctionnés par les autorités locales (ils sont là pour aider la communauté, mais c’est celle-ci qui est maître des décisions).
  • Aide les communautés qui le désirent à instaurer des programmes et des services globaux relatifs à la santé

Qui est inclus dans le terme autochtones

  • Indiens (Souvent appelés « Premières Nations »)
  • Métis
  • Inuits

Répartition géographique

Au Canada

  • 4% de la population : 1 400 685 autochtones
    • ~70% : Premières Nations
    • ~25% : Métis
    • ~5% : Inuits
  • Plus de 616 bandes des Premières Nations
  • Plus de 50 nations qui parlent près de 50 langues autochtones
    • Taille des nations : Varie entre 700 > 15 000 personnes
    • Taille des communautés:
      • 25% ont une population < 500
      • 55% ont une population < 1000

Au Québec

  • 1,2% de la population : 104 633 autochtones (~10% des autochtones du Canada)
    • 88% : Premières Nations
    • 12% : Inuits
  • 3 régions où l’on retrouve 50% de la population autochtone
    • Nord-du-Québec
    • Abitibi-Témiscamingue
    • Côte-Nord
  • 30% des membres des premières-nations vivent hors communauté.
    Nations (nb de communautés)
    • Famille Algonquine
      • Abénaki (2)
      • Algonquin (9)
      • Atikamekw (3)
      • Cri (9)
      • Innu (9)
      • Malécite (1)
      • Mi’gmaq (3)
      • Naskapi (1)
    • Famille iroquoïenne
      • Mohawk (3)
      • Wendat = Hurons (1)
    • Inuits (14): villages comptent entre 150-1625 habitants

Croissance de la population

  • 2x plus rapide que la population générale avec un taux de natalité 2x (1,5x selon le livre) plus élevé
  • Population jeune actuellement
  • Âge médian = 27 ans (v/s 40 dans la population générale)

Contexte historique

Colonisation suite à l’arrivée des Européens en Amériques. Alliances et droits sont issus de 70 traités entre 1701-1923

  • 1857 : Adoption de l’Acte pour encourager la civilisation graduelle qui vise à assimiler les Indiens
  • 1867 : Loi constitutionnelle (Acte de l’Amérique du Nord britannique)
  • 1869 : Loi sur les Indiens
    • 1876 : Modifié pour « Loi sur les sauvages »
    • 1880 : Modifié pour « Acte relatif aux sauvages »
    • 1951 : Nouvelles version (la dernière jusqu’à maintenant)
  • 1960 : Droit de vote aux élections fédérales
  • 1966 : Création du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien
  • 1969 : Droit de vote aux élections provinciales (un droit de vote partiel avait été accordé en 1885 puis retiré en 1896)
  • 1969 : Proposition du « Livre blanc » visant à l’abolition de la loi sur les Indiens
    • Déclaration portant sur les besoins éducatifs des Premières Nations
    • Mettre fin aux pensionnats!
  • 1975 : Convention de la Baie-James et du Nord québécois avec les Cris et les Inuits
  • 1978 (1976 selon les lectures) : Convention du Nord-Est québécois avec les Naskapis
  • 1984 : Loi sur les Cris et les Naskapis
  • 1996 : Rapport de la commission royale sur les peuples autochtones
    • Recommande que le gouvernement fédéral crée un Parlement autochtone dont la principale fonction serait de conseiller la Chambre des communes et le Sénat sur toute mesure législative et question constitutionnelle touchant les peuples autochtones
  • 2006 : Signature de la Convention de règlement sur les pensionnats Indiens

Loi sur les indiens

Au départ (1869), la loi visait à aider le gouvernement fédéral à assimiler les Premières Nations à la culture occidentale.

La nouvelle et dernière version, datant de 1951 avec des amendements en 1985, modifie la définition du statut d’Indien et élimine certaines dispositions discriminatoires.

  • Confère aux Indiens, un statut particulier.
  • Définit certaines obligations du gouvernement fédéral
  • Établit les paramètres relativement à la gestion des réserves, de l’argent et des autres ressources des Indiens

S’applique seulement pour les indiens inscrits, les indiens non-inscrits, les métis et les Inuits ne sont pas régis par cette loi

Les Cris et les Naskapis ont leur propre loi qui remplace la loi sur les indiens (adoptée en 1984)

2 Conventions importantes au Québec

Signatures de 24 communautés avec les gouvernements du Québec et du Canada

1975 : Convention de la Baie-James et du Nord québécois avec les Cris et les Inuits

  • Représente le premier traité signé par le Québec avec le gouvernement canadien et les autochtones au Canada
  • Accorde aux Cris et aux Inuits des responsabilités en matière d’éducation, de services de santé et services sociaux, d’administration de chasse, pêche et piégeage

1978 (76 selon lecture) : Convention du Nord-est québécois avec les Naskapis. Accorde au Naskapis les mêmes privilèges qu’aux Cris et aux Inuits

Noter que les Inuits ont fait le choix d’être rattachés essentiellement aux institutions québécoises et de ne pas être soumis à la loi fédérale

Pensionnats indiens

Importante tentative d’assimilation. De nombreux enfants ont été forcés de quitter leurs familles et leurs communautés pour fréquenter ces écoles. Il était interdit aux élèves de parler leur langue maternelle, et ils devaient respecter des valeurs et des normes très différentes des leurs, notamment en matière d’éducation.

  • ~1874 : Instauration du programme
  • 1920 : Obligation pour tous les enfants âgés de 7-15 ans d’être scolarisés dans les pensionnats indiens
  • 1931 : Instauration de 80 pensionnats indiens à travers le Canada

Jusqu’en 1969, les pensionnats étaient organisés et administrés par le gouvernement canadien et les églises. C’est la proposition du « Livre blanc » par la fraternité des Indiens du Canada qui mena progressivement le Canada à confier l’administration des programmes d’enseignement des écoles primaires et secondaires aux communautés à partir de 1973.

  • 1996 : Fermeture des pensionnats

Taux de mortalité des enfants dans les pensionnats : 25-47%

Au Canada, près de 150 000 Premières Nations et Inuits ont fréquenté un pensionnat au cours de leur vie. Environ 90 000 survivants aujourd’hui

Chez les peuples indigènes, l’héritage des pensionnats se manifeste par la perte d’identité, l’aliénation et le cynisme envers le reste de la société

Des excuses officielles ont été formulées le 11 juin 2008

Il n’existe aucun établissement post-secondaire autochtone au Québec. Les étudiants autochtones doivent donc se déplacer en milieu urbain pour étudier et expérimentent donc un déracinement tant individuel que socio-économique et familial qui les amène bien souvent à abandonner leurs études

Un établissement existe en banlieue de Montréal, à Odanak (institution Kiuna) : enseignement des Sciences humaines qui tient compte de la réalité culturelle, sociale et des intérêts des membres des Premières Nations.

Quelques-uns des impacts intergénérationnels des pensionnats indiens

  • « Plusieurs de ces enfants ont été confrontés de manière significative à des traumatismes de toutes sortes : Abus physiques, sexuels, psychologiques, culturels et spirituels »
    Perte identitaire et culturelle : Coutumes, langue maternelle…
  • Spiritualité : Imposition de valeurs religieuses
  • Mode de vie traditionnel : Transmission des savoirs, modèles de la société allochtone
  • Abus de drogues et d’alcool, violence…
  • Maladies physiques chroniques : État spirituel et émotionnel
  • Coupure des liens familiaux
  • Santé individuelle et collective : Destruction des réseaux de soutien social
  • Conséquences importantes et dramatiques, tant à l’échelle sociale qu’individuelle

Différences marquées chez les Premières Nations

  • Espérance de vie de 6-7ans moindre
  • 4x plus exposée à l’inaccessibilité et aux carences en ce qui a trait aux soins de santé et de services sociaux
  • 2-3x plus sujette à l’obésité et à l’embonpoint
  • 2-3x plus à risque d’être diabétique
  • 8-10x plus à risque d’avoir la tuberculose
  • 3-5x plus à risque de vivre des situations de pauvreté, de négligence et de placements
  • 5x plus exposée au suicide

Tous les domaines sont touchés de façon importante : Certaines disparités ont tendance à s’amplifier au lieu de se résorber…

Premières Nations et DPJ

(données de 2005)

  • Taux d’incarcération est 5-6x supérieur à la moyenne nationale
  • 4x plus de signalements retenus
    • Motif de prise en charge : Négligence
  • 8x plus de placements
  • 11,61% des enfants ont connu un épisode de placement au cours de la dernière année
  • 80% des enfants placés se retrouvent en famille d’accueil

Organisation des services de santé et services sociaux

  • Nations conventionnées: Le financement des services de santé et des services sociaux offerts est assumé par le Québec
  • Nations non conventionnées
    • Prise en charge des services de santé par les centres de santé ou poste de soins infirmiers des communautés
    • Les services de santé offerts consistent principalement en des programmes de santé communautaires axés sur la promotion de la santé et la prévention des maladies. Ces services sont financés par Santé Canada.

Déterminants de la santé et sociaux

  • Gouvernance : Approche unilatérale et sous-financement
  • Ressources humaines : Pénurie de professionnels en santé et services sociaux, difficultés d’embauche et de rétention du personnel au sein des communautés
  • Autres :
    • Revenu familial
    • Économie et emploi
    • Insécurité alimentaire
    • Qualité de l’eau potable
    • Logement
    • Scolarisation / Enseignement dans la langue maternelle / Décrochage scolaire
    • Habitudes de vie
    • Phénomène de migration
    • Exclusion sociale
    • Aspect historique…

Influence de la culture sur la santé

  • Bonnes et mauvaises habitudes de vie
  • Croyances et attitudes relatives à la santé : Comprend ce qu’une personne perçoit comme étant une maladie exigeant un traitement, et les soins et mesures préventives qu’elle est prête à accepter
  • Réaction au fait d’être malade
  • Type de communication: Langue, mode de pensée, situations (femme pas à l’aise de parler devant son mari, patient non à l’aise à s’exprimer devant le médecin…)
  • Statut

Impacts sur la pratique

  • Pratique élargie en région éloignée : responsabilités, variété…
  • Médecine traditionnelle
  • Accès à la formation
  • Technologie de l’information
  • Roulement de personnel
  • Gérer les différences
    • Adaptation : Langue, dialogue, vitesse
    • Comprendre la réalité : Historique et actuelle
    • Approche : Respect
  • Vie en communauté
    • Ouverture à une nouvelle culture
    • S’intégrer
    • Apprivoiser l’isolement
    • Petit milieu

Le clinicien doit être sensible aux réalités culturelles s’y adapter, puis acquérir une compétence culturelle pour que sa pratique soit assurée d’une sécurité culturelle. Le contraste entre l’approche autochtone et l’approche occidentale de la guérison peuvent représenter un défi pour les praticiens de la médecine occidentale lorsqu’ils cherchent à répondre aux besoins des patients autochtones.

Compétence culturelle

Le praticien respecte et apprécie la diversité qui existe dans la société. Il reconnaît les différences, mais ne se sent pas menacé par elles. La compétence culturelle désigne les aptitudes requises par le praticien pour que le patient se sente en sécurité.

Sécurité culturelle

Désigne un échange médecin-patient où le patient se sent respecté et libre d’agir, et estime que l’on reconnaît sa culture et son savoir. Elle a trait aux sentiments du patient lorsqu’il a recours à des soins de santé.

L’ONSA (l’organisation nationale de la santé autochtone) offre des directives pour garantir la sécurité culturelle :

  1. Portent sur la disponibilité de salles pour les autochtones dans les hôpitaux
  2. Nécessité de permettre aux patients autochtones d’avoir accès à des cérémonies, des chansons et des prières
  3. Respect du besoin des patients de s’entourer d’objets cérémoniaux
  4. Nécessité d’offrir des renseignements et du soutien à la famille
  5. Directives pour l’élimination approprié des restes humains
  6. Consignes à suivre lorsqu’un patient meurt

Lecture sur l’importance des histoires

Il est important de voir nos patients dans leur propre contexte et dans leurs propres histoires. Les narrations, les intrigues, l’importance de l’écoute, l’importance des histoires et leur valeur dans une relation efficace entre patients et médecins est essentielle à la pratique médicale. Si nous écoutons attentivement les histoires de nos patients et demandons des questions pour clarifier leur récit, la narration et l’intrigue apparaîtront clairement.

La médecine nous enseigne le raisonnement par déduction, en rassemblant les renseignements pour les réduire en un seul diagnostic, mais parfois il est utile d’utiliser une approche par induction, le problème d’une personne peut se produire à plus grande échelle.