ULaval:MED-1208/Lithiases urinaires

De Wikimedica
Vous devez vous connecter pour voir ce modèle.

La lithiase urinaire, aussi appelée « calcul » ou « pierre », est un problème fréquent. En effet, la prévalence est de 2 à 3 %. Les taux de récidive de cette condition sont relativement hauts : 10 % à 1 an et 50 % à 10 ans. C’est donc un sujet qu’il ne faut pas prendre à la légère, étant donné la fréquence à laquelle nous risquons de le rencontrer.

Facteurs épidémiologiques

Facteurs extrinsèques Facteurs intrinsèques
  • Climat et saisons
    • Incidence accrue durant l’été
    • Incidence accrue en zone tropicale
  • Apport en liquide
    • Effet direct sur le volume urinaire quotidien
    • Inversement proportionnelle à l’incidence de calcul
  • Diète
    • Apport riche en purines (viande)
  • Occupation
    • Lié à la température ambiante, sudation et hydratation
    • Impact direct sur la diurèse quotidienne
  • Hérédité :
    • Antécédent familial positif augmente le risque de 25 fois
    • Maladies métaboliques héréditaires
  • Sexe (3 H : 1 F)
  • Race (Blancs >> noirs et asiatiques)
  • Âge (pic d’incidence entre 40 et 60 ans)

Physiopathologie

De façon simplifiée, la formation de lithiase s’effectue en quatre étapes principales :

  1. Sursaturation
    • État nécessaire à la précipitation éventuelle d’un sel
  2. Cristallisation
    • Précipitation d’un sel et formation de structure cristalline
    • Croissance progressive de la grosseur des cristaux
    • Certains constituants de l’urine inhibent cette formation (citrate et magnésium)
  3. Agrégation
    • Accolement physique de cristaux
    • L’agrégation des cristaux peut prendre plusieurs formes. Lorsque les cristaux impliqués sont de même nature, l’agrégation est homogène ; lorsqu’ils sont de nature différente (cristaux différents ou structures non cristallines comme débris cellulaires), on parle alors d’agrégation hétérogène.
  4. Rétention
    • Le fait que les cristaux restent à l’intérieur du système excréteur leur permet d’atteindre une taille plus importante.
    • Certaines malformations urinaires favorisent la rétention des cristaux par une stase urinaire (ex. obstruction de la jonction urétéro‐pyélique).

Rappelons-nous aussi que la solubilité des solutés contenus dans l’urine dépend :

  • du pH urinaire ;
  • de la température ;
  • de la concentration des ions urinaires principaux.

Types de calculs urinaires

Oxalate de calcium (70‐80 %)

  • Plusieurs anomalies métaboliques favorisent la formation de ce type de calcul :hypercalciurie, hyperoxalurie, hypocitraturie.
  • Ces calculs sont visibles sur une radiographie standard : ils sont radio‐opaques.
Les calculs d'oxalate de calcium sont radio-opaques

Acide urique (5‐10 %)

  • Trois anomalies métaboliques possibles
    • pH urinaire acide persistant
    • volume urinaire faible
    • hyperuricosurie
  • Son incidence est en augmentation en raison de l’augmentation :
    • de l’obésité et du diabète de type 2 ;
    • de l’apport alimentaire trop riche en purines (viande).
  • Non visible sur une radiographie standard (radio-transparente), mais visible sur la TDM.

Struvite ou lithiase d’infection (10 %)

  • Cristaux de struvite
    Plus fréquent chez la femme
  • Associé à des infections urinaires chroniques causées par des bactéries produisant de l’uréase (scinde l’urée)
    • Urée = 2 NH4+  +  2 HCO3-
  • Cristaux de phosphate‐ammonium‐magnésium
  • Formation lente qui souvent épouse les contours des voies urinaires (calcul coralliforme)
  • Radio‐opaque
  • Germes producteurs d’uréase : Proteus sp., parfois Klebsiella, Pseudomonas et Staphylocoques peuvent être impliqués.

Cystine (1‐2 %)

  • Désordre héréditaire autosomal récessif
  • Défaut de réabsorption tubulaire d’acides aminés (cystine, ornithine, lysine, arginine)
  • Solubilité de la cystine très faible à pH urinaire habituel
  • Radio‐transparente

Mode de présentation

Colique néphrétique

  • Présentation clinique la plus classique d’un calcul urétéral
  • Douleur unilatérale
    • Début brutal, très intense, en coup de poignard
    • Loge rénale (angle costo‐vertébral)
    • Aucune position confortable (patient agité)
  • Irradiation selon le niveau d’obstruction
    • Uretère proximal
      • Flanc et quadrant inférieur
    • Uretère moyen
      • Région inguinale, testicule, grande lèvre
    • Jonction urétéro-vésicale
      • Le calcul doit traverser la paroi de la vessie et causera des symptômes vésicaux irritatifs (ténesme, mictions urgentes, pollakiurie).
  • Douleurs peuvent mimer d’autres pathologies
    • Pathologies vertébro‐musculaires
    • Problème vésical ou annexiel (trompe‐ovaire)
    • Appendicite
    • Cholécystite
    • Pancréatite
  • Symptômes associés
    • Nausées et vomissements
    • Iléus paralytique (arrêt réflexe du transit digestif)
    • Envies fréquentes d’uriner.
  • Mécanismes de formation de la douleur
  • Obstruction subite du flot urinaire :
    • L’urolithiase migre subitement dans l’uretère ;
  • Hyperpression en amont de l’obstruction :
    • Le rein continue à produire de l’urine ;
  • Contractions spastiques de l’uretère.
  • Zones de rétrécissement d’un uretère normal
    • Jonction urétéro‐pyélique
    • Croisement avec vaisseaux iliaques
    • Jonction urétéro‐vésicale
      • Endroit où l’uretère a le plus faible calibre.
  • Autres causes possibles de colique néphrétique
    • La lithiase urinaire n’est pas la seule pathologie pouvant causer une colique néphrétique. Elle est par contre la plus fréquente.

Hématurie

  • Macroscopique ou microscopique
  • Souvent, aucun autre symptôme accompagnateur
  • Lithiase habituellement dans le calice / bassinet
  • N’obstrue pas le flot urinaire
  • Engendre inflammation et frottement
  • Toujours éliminer autre cause pour l’hématurie (cancer) en effectuant le bilan complet

Infection urinaire

Chronique ou récidivante Infection grave ou septicémie
  • Calcul d’infection (struvite)
    • Bactéries scindant l’urée
    • Formation lente et progressive du calcul
  • Infection chronique ou rebelle aux antibiotiques est souvent le seul signe présent.
  • L’obstruction urétérale peut se compliquer :
    • d'une pyélonéphrite (infection du rein) ;
    • d’une contamination de l’urine en amont de l’obstruction.
  • Équivalent d’un abcès
  • Évolution rapide vers un état de choc septique
  • Urgence urologique de drainer le rein obstrué
    • Cathéter double J ou tube de néphrostomie.

Découverte fortuite

Décrite fortuitement lors d’une imagerie effectuée dans un autre contexte (TDM, RX abdo, écho)

Calcul vésical

  • Fichier:Calculs vésicaux (radiographie).png
    Calculs vésicaux
    Physiopathologie différente de la lithiase rénale
    • Associé à une mauvaise vidange vésicale et une stase urinaire
  • Symptômes irritatifs
    • Brûlure mictionnelle
    • Mictions fréquentes
    • Douleurs pelviennes
    • Hématurie
  • Symptômes obstructifs
    • Jet urinaire interrompu

Investigation

Examens biologiques Imagerie
  • Sommaire et microscopie des urines
    • Hématurie microscopique
  • Culture d’urine
    • Éliminer une infection
  • Créatinine
    • Évaluation de la fonction rénale
  • Formule sanguine et température
    • S’assurer qu’il n’y ait pas d’infection concomitante
  • RX de l’abdomen
  • Échographie
  • TDM sans contraste intraveineux
    • Examen de choix
    • Tous les types de calculs y sont visibles
    • Permet bonne évaluation du diagnostic différentiel possible

Dépistage d’un problème métabolique

  • Il arrive parfois que l’on recherche des anomalies métaboliques pouvant expliquer la formation de calculs.
  • Le dépistage est effectué chez des individus récidivistes.
  • On procède la plupart du temps à un bilan biologique :
    • le dosage urinaire et sérique de différentes substances ;
    • l’analyse du calcul.
  • Les résultats du bilan peuvent orienter vers des traitements spécifiques visant à freiner la formation des lithiases.

Complications

  • Douleurs incoercibles (nécessité de prendre des narcotiques en continue)
  • Infection urinaire et urosepsis: traitement double J ou néphrostomie
  • Insuffisance rénale aiguë dans les deux situations suivantes :
    • IRC préexistante
    • Patient avec un rein unique
  • Chez un patient avec une insuffisance rénale chronique et une obstruction persistante non identifiée
    • Calcul coralliforme
    • Lithiase urétérale non traitée

Règle d’or

  • Les patients avec des complications nécessitent un traitement chirurgical définitif : ils sont non candidats au traitement conservateur.

Il existe deux traitements d'urgence disponibles, qui sont parfois nécessaires en attendant le traitement chirurgical définitif :

  • la néphrostomie percutanée (sous anesthésie locale, mettre un tube dans un calice en passant à travers la peau et le parenchyme rénal) ;
  • le double J (en salle d’op, par approche endoscopique vésicale).

Il est aussi intéressant de voir le taux d’expulsion spontanée de la lithiase. Cela explique pourquoi pour de petites lithiases, on laisse souvent le temps faire son travail…

Taille Taux d'expulsion à 4 semaines
< 4 mm 90%
4-6mm 40-60%
8mm 20%
Localisation
Uretère supérieur 40%
Uretère inférieur 85%

Traitement

  • Contrôle de la douleur
    • Narcotiques et AINS
  • Confirmer le diagnostic d’urolithiase obstructive
    • Éliminer autre étiologie
    • Tomodensitométrie abdominale et pelvienne
  • Éliminer une complication associée
  • Évaluer si le patient est candidat pour un traitement conservateur (80 % du temps)
    • Conditions
      • Patient bien soulagé avec analgésie orale
      • Absence de complication
      • Expulsion spontanée anticipée (≤ 6‐8 mm)
    • Le traitement conservateur consiste en
      • Analgésie (AINS ± narcotique)
      • Thérapie médicale favorisant l’expulsion
        • Agent alpha‐bloquant (ex. tamsulosin)
      • Filtration des urines par le patient
      • Hydratation normale
      • Réévaluation par imagerie après 3‐4 semaines si la lithiase n’a pas été expulsée
    • On considère le traitement comme un échec si l’urolithiase est présente après 4 semaines.
      • Il n’y a pas de bénéfice à attendre plus longtemps.
      • On peut endommager la fonction du rein de façon permanente si l’obstruction persiste > 4 semaines ; on décide alors d’y aller avec le traitement chirurgical.
  • Si le candidat n’est pas candidat pour un traitement conservateur, opter pour un traitement chirurgical (20 %).
    • Indications
      • Complications (telles que décrites ci-haut)
      • Calcul coralliforme ou lithiase de gros volume
      • Échec au traitement conservateur
      • Rein unique
    • Types de chirurgies possibles
      • Lithotripsie par onde de choc extracorporelle (LOCEC)
      • Urétéroscopie avec fragmentation de la lithiase
      • Néphrolithotomie percutanée
  • Prévention d’une récidive
    • Recommandations diététiques générales
      • Hydratation +++
      • Diminuer consommation de sel
      • Diminuer l’apport en purine (viande, volaille, poisson)
      • Apport adéquat en calcium
    • Traitement spécifique si anomalie métabolique identifiée
      • Cette portion ne sera pas abordée

Lithotripsie par ondes de choc extracorporelles

Urétéroscopie

Urétéroscopie

Néphrolithotomie percutanée