ULaval:MED-1208/Infection urinaire

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Quelques généralités

  • Fichier:Fréquence de l'infection urinaire selon le sexe et l'âge (graphique).png
    Dans ce graphique, on peut voir le spectre de l'infection urinaire en fonction de l’âge et du sexe. L’âge est sur l’axe horizontal. L’axe vertical est la prévalence des infections symptomatiques.
    Fichier:Prévalence des infections urinaires chez la femme en fonction de l'âge (graphique).png
    Ce graphique illustre la prévalence des infections urinaires chez la femme en fonction de l’âge. De manière générale, on remarque que la prévalence est faible en bas âge, mais augmente brusquement entre 18-24 ans, coïncidant avec le début des rapports sexuels. On remarque aussi qu’à partir de 24 ans environ, le pourcentage de la population atteinte augmente de manière linéaire.
    L'urine est stérile en temps normal
  • Bactériurie: présence de bactéries dans l'urine, qui n'implique pas nécessaire une infection
  • Infection: Inflammation d'un tissu ou organe causée par un microorganisme
  • Infection urinaire non-compliquée: limitée à l'arbre urinaire bas, sans anomalie anatomique, chez femme en âge de procréer
  • Infection compliquée: implique la présence d'une anomalie qui affecte l'efficacité du traitement (homme, enfant, femme enceinte, sonde urinaire, infection urinaire haute, anomalie anatomique urinaire, diabète et immunosuppression)

De manière générale, on remarque que la prévalence est faible en bas âge, mais augmente brusquement entre 18-24 ans, coïncidant avec le début des rapports sexuels. On remarque aussi qu'à partir de 24 ans environ, le pourcentage de la population atteinte augmente de manière linéaire.

Microorganismes les plus fréquents

Truc mnémotechnique
SEEK PP (Microorganismes rencontrés dans l'infection urinaire)
  • Staph
  • Entérocoque
  • E. Coli
  • Klebsiella
  • Proteus
  • Pseudomonas
  • Entérobactérie (90%)
    • E.Coli, Klebsiella, Proteus
  • Cocci gram positif
    • Staphylococcus saprophyticus
    • Entérocoque faecalis
  • Pseudomonas
  • Truc mnémotechnique: SEEK PP -> Staph, Entérocoque, E.Coli, Klebsiella, Proteus, Pseudomonas
  • Autres germes rencontrés moins fréquemment

    • Levures (Candida albicans)
    • Adénovirus (Mycobacterium tuberculosis et avium intracellulaire)
    • Parasites (schistosomiase)

    Pathogénèse

    Il y a trois manières d'acquérir une infection urinaire

    • Par voie rétrograde
      • C'est le mécanisme habituel
      • La flore digestive remonte l'urètre vers la vessie
    • Par voie hématogène
      • C'est rare!
      • Associé à M. Tuberculosis
      • Associé à S. aureus chez utilisateurs de drogues IV (UDIV)
    • Nosocomiale (acquis à l'hôpital)
      • Critères
        • Absence IVU à l'admission
        • Apparaît >48h après l'admission
        • Cathéter vésical souvent impliqué

    Étapes clés de la pathogénèse

    Fichier:E. Coli adhérant à une cellule épithéliale (illustration).png
    • Adhérence bactérienne
    • Réceptivité épithéliale (vestibule vaginal et vessie)
    • Internalisation dans les cellules urothéliales superficielles
    • Multiplication des bactéries
    Fichier:Antigènes sur une bactérie (illustration).png

    Facteurs bactériens

    Certaines souches sont plus virulentes en raison de leurs:

    • Pili
    • Antigènes membranaires (O)
    • Antigènes capsulaires (K)
    • Antigènes flagellaires (H)

    Facteurs de l'hôte

    Facteurs protecteurs

    • Longueur urétrale chez l'homme
    • Sécrétions prostatiques
    • pH acide et bactéries inhibitrices du vagin (lactobacilles)
    • Osmolarité élevée de l'urine
    • Vidange vésicale
    • Immunoglobulines

    Les lactobacilles sont de bonnes bactéries présentes en quantité abondante chez une femme avec des taux d’oestrogènes normaux. Ces bactéries consomment du glycogène qu’elles transforment en acide lactique. Ceci rend le pH vaginal plus acide et moins propice à la croissance des bactéries provenant de la flore entérique. L’hypoestrogénisme (ménopause) altère la flore bactérienne vaginale, en causant une diminution de la synthèse du glycogène. Le glycogène est la source nutritive des lactobacilles.

    Facteurs de risque physiologiques

    • Urètre féminin court
      • Le chemin à parcourir pour les bactéries est beaucoup plus court chez la femme que chez l'homme
    • Relations sexuelles (femme)
      • Cystite «de la lune de miel»
      • Facteur mécanique (microlésions causées par les relations sexuelles)
    • Antigènes sur les cellules urothéliales
    • Hypoestrogénisme (ménopause)
      • Modification de la flore de lactobacilles et du pH vaginal

    Facteurs de risque pathologiques

    • Diabète mellitus
      • Le glucose présent dans les urines peut servir de nourriture aux bactéries, ce qui favorise leur prolifération
    • Immunosuppression
    • Reflux vésico-urétéral
      • Rend les pyélonéphrites plus fréquentes, car l'urine va à rebours de la vessie vers les reins
    • Troubles de la vidange vésicale
      • Résidu vésical post-mictionnel: l'urine résiduelle dans le vessie après une miction représente un milieu favorable pour la prolifération bactérienne.

    Voici quelques pathologies causant une vidange vésicale incomplète

    • Obstruction infra-vésicale
      • HBP
      • Sténose de l'uretère
      • Dyssynergie vésico-sphinctérienne
      • Cystocèle importante
    • Atteinte de la contractilité vésciale
      • Diabète mellitus
      • Sclérose en plaque
      • Post chirurgie pelvienne

    Tests diagnostiques

    Méthodes d'échantillonnage

    • Mi-jet
      • On urine la moitié de notre miction dans la cuvette pour nettoyer l'urètre. On recueille comme échantillon la seconde moitié.
      • Contamination fréquente
        • Prépuce
        • Introïtus vaginal
    • Cathétérisme vésical
    • Ponction sus-pubienne
      • Très précis
      • Plus insavif
      • Habituellement utilisé chez le jeune enfant

    Diagnostic paraclinique

    Analyse d'urine (sommaire et microscopie)

    • Bâtonnet (sommaire d'urine)
      • Leucocytes
      • Nitrites
      • Hématies
    • Microscopie
      • Leucocytes
        • >5 par champ est anormal
        • Dans l'infection, souvent >15-50 par champ
      • Hématies
        • ≥3 par champ est anormal = hématurie microscopique
        • >15 par champ est fréquent lors d'une infection urinaire
      • Bactéries

    Culture d'urine

    • Le standard de pratique, mais résultats dans ≥48 heures
      • Significatif seulement si un seul germe présent et > 108 par litre
    • 107-108 chez 20-40% des femmes avec IVU
    • Faux négatifs lorsque...
      • Petites mictions fréquentes
      • Obstruction du segment urinaire infecté (par exemple une lithiase qui bloque un uretère qui est infecté en amont de la lithiase)

    La cystite

    • 30% des femmes au cours de leur vie[note 1]
    • 20% de celles-ci auront récidive(s)
    • Considéré chez la majorité des patients comme une infection non-compliquée

    Symptômes

    • Pollakiurie
    • Impériosité
    • Brûlements mictionnels
    • Douleur sus-pubienne
    • Absence de fièvre
    • Hématurie

    Diagnostic

    • SMU
    • DCA
      • Obligatoire pour tous les patients?
        • Tous les hommes
        • Tous les enfants
        • Les femmes si:
          • Infections à répétiiton (proche dans le temps)
          • Diabétique
          • Immunosupprimé
          • Manipulation urologique récente

    Traitement chez la femme (non-compliquée)

    • Antibiotique bactéricide > bactériostatique
      • Si TMP-SMX ou quinolone = 3 jours
      • Si autre antibiotique = 7 jours
      • Choix empirique selon résistance locale (<10%):
        • TMP-SMX
        • Fluoroquinolone
        • Nitrofurantoïne
    • Antispasmodique vésical
      • Oxybutinine ou autre agent anticholinergique

    Traitement si autres circonstances

    • Entre autres hommes et enfants
    • Immunosuppression et diabète mal contrôlé
    • Pour 7 jours plutôt que 3 jours
    • Antibiotique bactéricide > bactériostatique

    Investigation complémentaire

    Quand?

    • Infection chez l'homme
    • Infection chez l'enfant (voir plus loin)
    • Plus de 4 infections durant 12 mois consécutifs chez la femme

    Que faire?

    • Échographie rénale et pelvienne (à vessie vide) pour évaluer le résidu post-miction
    • Examen physique:
      • Femme = urètre et vagin (cystocèle)
      • Homme = prostate et organes génitaux externes

    Prévention

    • Hygiène
    • Proanthocyanidines (canneberge)
    • Probiotiques
    • Prévention pour cystites à répétition:
      • Corriger problème anatomique/fonctionnel
      • Antibioprophylaxie
        • Post-coïtale
        • Mini-dose d'antibiotique quotidiennement
      • Antibiothérapie dès l'apparition des symptômes
      • Remplacement oestrogénique local si ménopausée

    Circonstances particulières

    Enfance et infection urinaire

    • Attention! Symptomatologie non spécifique en bas âge (<5 ans): il faut être très suspiceux!
    • Culture via ponction sus-pubienne vs sac collecteur
    • Traitement x 7 jours
      • <3 mois: amoxicilline
      • >3 mois: TMP-SMX
    • Échographie rénale et cystographie mictionnelle chez tous
      • Sauf chez fillette d'âge scolaire (>5 ans) sans antécédent, avec cystite
      • Afin d'éliminer reflux vésico-urétéral ou autre anomalie urologique congénitale qui favorise infection urinaire

    Bactériurie asymptomatique

    • Femme en bonne santé: pas de traitement
    • Homme, enfants ou malade chronique
      • Refaire un contrôle de la culture d'urine
      • Si persiste:
        • Traitement antibiotique
        • Rechercher cause anatomique (échographie):
          • Rétention
          • Reflux
          • Obstruction de la jonction urétéro-pyélique
          • Lithiase coralliforme du rein
    • Traiter si manipulation urologique planifiée

    Bactériurie asymptomatique et grossesse

    • Hydronéphrose se développe lors de la grossesse
    • Bactériurie asymptomatique a plus tendance à causer pyélonéphrite (PNA)
      • Bactériurie 4 à 7% (bactériurie pas plus fréquente, mais risque accru!)
      • 25 à 35% des bactériuries non traitées évoluent vers PNA
      • Danger pour le foetus:
        • Prématurité
        • Mortalité prénatale
    • Traitement de 7 jours:
      • Pas de quinolones
      • Nitrofurantoïne durant 2 premiers trimestres
      • Éviter TMP-SMX durant 1er et 3e trimestre
      • Pénicilline/céphalosporine utilisable en tout temps
    • Contrôle de culture d'urine à la fin du traitement

    Cathétérisme vésical

    • 1 cathétérisme = 2-4% de contamination
    • Cathéter à demeure
      • 5% par jour de contamination pour l'homme
      • 10% par jour de contamination pour la femme
    • 40% des infections en milieu hospitalier
    • Germe souvent multi-résistant
    • Pas de traitement, saufs si symptomatique ou si manipulation urologique envisagée
    • Cathétérisme intermittent préférable
    • Contrôle de la culture quelques jours après le retrait de la sonde
      • Considérer antibioprophylaxie au retrait de la sonde, si présente depuis plusieurs jours/semaines

    Pyélonéphrite aiguë (PNA)

    Signes et symptômes

    • Symptômes urinaires bas (50%)
    • Fièvre +/- frissons
    • Douleur au flanc unilatéral (punch rénal +)
    • No/Vo

    Test diagnostique

    • Culture d'urine obligatoire
    • FSC et hémocultures
    • Échographie rénale chez tous les patients
      • Sauf si femme (<65 ans) en bonne santé par ailleurs
    • TDM abdo-pelvienne si soupçon de colique néphrétique (obstruction urétérale)

    Traitement

    • Agent bactéricide x 14 jours
      • Seul exception: 7 jours pour une jeune patiente, sans anomalie anatomique, traitée avec quinolone.

    Complications

    • Bactériémie
    • Choc septique
    • Abcès rénal

    Pyonéphrose

    • Pyélonéphrite associée à un système pyélocicatriciel obstrué
    • Traitement
      • Antibiothérapie
      • Drainage:
        • Néphrostomie percutanée (antégrade)
        • Double J (rétrograde)
    • À référer rapidement à l'urologue (urgence)!

    Abcès rénal

    Épidémiologie

    Fichier:Abcès rénal (TDM).png
    • Surtout chez les patients immunosupprimés, UDIV, malades chroniques

    Pathogénèse

    • Par voie hématogène
      • S.aureus
      • Culture d'urine négative
    • Par voie rétrograde
      • Pyélonéphrite compliquée
      • À suspecter si ne s'améliore pas sous traitement ≥72h
        • Imagerie à répéter (écho ou TDM)
      • Mauvais antibiotique
      • Obstruction associée

    Traitement

    • Antibiothérapie à poursuivre
    • Drainage
      • Percutané
      • Chirurgical

    Prostatite aiguë

    Signes et symptômes

    • Symptômes urinaires bas
    • Fièvre et frissons
    • Difficultés mictionnelles/rétention urinaire
    • Douleurs pelviennes/abdominales possibles
    • Toucher rectal
      • Douleur exquise
      • Prostate chaude et enflée

    Investigations

    • SMU-DCA
    • Hémocultures
    • FSC

    Traitement

    • Immédiat
    • Antibiotiques IV large spectre au départ (ampi/genta)
    • Pour les patients très malades et septiques:
      • Réanimation liquidienne si nécessaire
      • Hospitalisation parfois nécessaire
    • Si vidange vésicale problématique:
      • PAS DE SONDE URÉTRALE
      • Cathétérisme intermittent
      • Installer une cystostomie sus-pubienne
    • En externe:
      • Antibiotiques pour 4 semaines
      • Fluoroquinolone est le traitement de choix:
        • Ciprofloxacine
        • Levoflaxacin
      • TMP-SMX en deuxième choix
      • Émollients fécaux
      • Alpha-bloquants et AINS aident généralement
      • Contrôle de la culture est essentiel
    Fichier:Prostatite aiguë (TDM).png

    Complications possibles

    • Prostatite chronique bactérienne
      • Persistance de la bactérie (prostate non-stérilisée)
      • Cause possible d'infections à répétition chez l'homme
    • Abcès prostatique
      • Se manifeste généralement par une non-réponse au traitement après une réponse initiale
      • Drainage nécessaire
        • Transurétral
        • Transrectal
        • Transpérinéal

    Épididymite aiguë

    Fichier:Épididymite (illustration).png

    Symptômes

    • Douleur et gonflement de l'épididyme
    • Symptômes urinaires possibles
    • Pathogénèse rétrograde via vas déférent

    Facteurs de risque

    • Comportements sexuels à risque
    • Sonde vésicale à demeure/ instrumentation urologique
    • Vessie neurogène
    Fichier:Épididymite.png

    Investigation

    • SMU-DCA, recherche gonocoque/chlamydia si à risque
    • Échographie scrotale si doute d'abcès associé
    Fichier:Anatomie organes génitaux masculins.png

    Traitement

    • Si> 35 ans ou enfant:
      • Flore entérique
      • Traitement antibiotique de 10 jours avec quinolone
    • Si < 35 ans ou comportements sexuels à risque:
      • Gonocoque et chlamydia
      • Ceftriaxone 250 mg IM x 1 PLUS doxycycline 100 mg po bid x 10 jours
    • Traitement de confort:
      • Support scrotal, repos au lit, glace, analgésique, AINS

    Notes

    1. Pour votre connaissance personnelle : En moyenne, chaque épisode de cystite survenant chez les jeunes femmes est associé à (Foxman B., Am JPublic Health, 1985) 6,1 jours de symptômes, 1,2 jour d’absentéisme à l’école ou au travail, 2,4 jours d’activités restreintes 0,4 jour d’alitement.