ULaval:MED-1206/Microbiologie et infectiologie/SIDA

De Wikimedica

Origine du virus

Définitions

VIH Virus de l’Immunodéficience Humaine
Séropositif pour le VIH Personne infectée par le VIH
Infection opportuniste Infection chez une personne immunodéficiente causée par un germe qui s’établit à cause de cette immunodéficience.
SIDA Syndrome d’Immunodéficience Acquise. Forme extrême de l’infection par le VIH. Se manifeste par une immunodéficience profonde qui rend les patients susceptibles aux infections opportunistes ou à certains néoplasies.
Lymphocyte CD4 Lymphocyte préférentiel infecté par le VIH. Responsable de la régulation de la réponse immune et nécessaire pour l’induction de la réponse immune à un Ag.
Décompte lymphocytaire Dénombrement des lymphocytes dans une prise de sang. Donne le décompte absolu de lymphocytes CD4 et le % que cela représente sur le total des lymphocytes et par rapport aux autres lymphocytes. Ce décompte mesure le degré de dommage au SI par le VIH.
Charge virale Décompte des particules du VIH dans le sang par PCR. Elle mesure le potentiel de destruction du SI par le VIH.  
Génotypage Détection des mutations de résistance aux différents antirétroviraux sur les gènes du virus.
Reconstitution immunitaire Augmentation du nombre de lymphocytes (CD4 et CD8) et de la proportion de cellules naïves suivant l’initiation du traitement antirétroviral.    

Historique

1908 :   Apparition. Dérivé d’un virus simien isolé du chimpanzé (SIV)

1959 :   Premier sérum avec Ac contre le VIH. Premier cas décrit avec présentation clinique compatible au SIDA (Angleterre)

1968 :   Premier cas de SIDA aux USA

1981 :   Premier cas de SIDA à Atlanta. Initialement nommé le GRID (hommes homosexuels)

1982 :   Définition nosologique adoptée et on donne le nom de SIDA. On découvre la transmission sexuelle et par le sang.

1983 :   Identification du virus comme agent étiologique du SIDA

1986 :   Identification de ce virus comme « VIH « 

1985 et + : Test diagnostique disponible pour diagnostiquer les porteurs du virus

1987 :   Premier médicament (AZT) contre le VIH

1996 :   Trithérapie efficace et utilisée pour tous. HAART (Tx antirétrovirale hautement active)

2008 :   Prix Nobel aux chercheurs ayant découvert le VIH

Épidémiologie du VIH

Évolution du virus

  • Dérive du virus simien (SIV) chez les chimpanzés.
  • Contacts sanguins homme-singe (chasse)
  • Adaptation du SIV aux hommes : VIH s’implante
  • Transmission entre humains du VUH

Dissémination du virus

EnAfrique : Transmission amplifiée par

  • Routes et urbanisation(augmente la densité des populations)
  • Traitement de maladies tropicales par des médicaments injectablesnon stérilisés.
  • Déséquilibre hommes-femmes et multiples partenaires

Tout cela a favorisé transmission hétérosexuelle, prévalente en Afrique et similaire chez hommes et femmes.

En Occident, le virus est arrivé par le tourisme sexuel et a augmenté vers 1970-1980. Surtout communauté homosexuelle et utilisateurs de drogues injectables.

Incidence et prévalence

Depuis 2000 : Incidence diminue de 35%.

Depuis 2004 : Diminution des décès reliés au SIDA de 15%. Causes…

  • Changements de comportement des personnes à risque
  • Meilleur accès à la prévention
  • Augmentation du nombre de personnes en traitement

Fin 2017 :

  • 36.9 millions atteints dans le monde
  • 21.7 millions de PVVIH sont sous traitement antirétroviral
  • 80% des femmes enceintes infectées ont accès à un traitement contre le VIH
  • 1.8 millions nouvelles infections
  • 940 000 décès reliés au VIH (diminution de 34% depuis 2010)
  • 5000 nouvelles infections par jour dans le monde
    • 66% en Afrique sub-saharienne
    • 500 ont <15 ans
    • 43% de femmes adultes
    • 33% sont entre 15-24 ans

Où en sommes-nous face aux cibles 90-90-90 de 2014?

  • 75% des personnes séropositives connaissent leur statut
  • 79% connues sont traitées avec antirétroviraux
  • 81% des patients qui ont accès au traitement ont une infection contrôlée
  • 47% des PVVIH ont une charge virale indétectable

Fin 2014 :

  • 75 000 Canadiens ont le VIH
  • Prévalence : 212/ 100 000 Au Canada
  • Incidence du VIH baisse légèrement au Canada : 7,2 / 100 000
  • 21% des infectés l’ignoraient
  • >26 000 personnes vivant avec le VIH sont décédées depuis le début de l’épidémie

Objectif 2020 : 90-90-90

  • 90% des séropositives connaissent leur statut
  • 90% soient traitées avec antirétroviraux efficaces
  • 90% traitées aient une charge virale non détectable durablement

Objectif 2030 : 95-95-95

Les efforts de l’ONUSIDA ont diminué l’incidence dans les pays à faible revenu et augmentation de la proportion des personnes traitées. Pour augmenter les mesures, on devra s’attaquer à :

  • Pauvreté
  • Inégalités hommes-femmes
  • Manque d’éducation
  • Violence entre partenaires sexuels.

Modes d'acquisition

  • Surtout voie sexuelle (relation anale > relation hétérosexuelle)
  • Usage de drogues injectables
  • Transmission verticale par la mère : Éliminé
  • Transmission par produits sanguins : Diminué

Méthodes diagnostic

Étape 1: Technique ELISA

Simple, rapide, fiable, peu couteuse, analyse automatisée de nombreux échantillons. Permet de détecter les infections précoces et établies. On utilise des tests de 4e génération qui détectent …

  • Ag p24 : protéine interne dans la primo-infection. Disparait avec apparition d’Ac. Non détectable dans les premières années d’infection
  • Anticorps contre le VIH : de 6 à 12 semaines après l’infection.
Étape 2 : Technique Western Blot

Pour confirmer un ELISA positif. Complexe, expertise nécessaire, dans un centre de référence. Confirme la présence d’Ac contre le VIH et diagnostique l’infection.

Pathogénèse

Le Virus
  • Famille des rétrovirus.      
  • ARN simple brin
  • Tropisme pour les cellules sanguines et du SNC
  • Génome complexe : Transcrit ARN viral en ADN avec transcriptase inverse. L’ADN viral peut s’intégrer dans le génome humain avec l’intégrase. L’intégration est ce qui rend impossible l’éradication du virus. Aussi, la transcriptase fait plusieurs erreurs, causant un virus de plus en plus hétérogène.
  • Longue incubation entre infection et manifestations
  • Associé à une immunodéficience

Manifestations cliniques

Primo-infection

  • Acquisition et dissémination du virus.
  • Virus assez homogènes
  • Haute virémie:  Les cellules mononuclées périphériques sont chargées de virus
  • Les CD4 baissent transitoirement

Dommage irréversible au SI. Le traitement par trithérapie limite ces dommages, mais n’éradique pas l’infection.

1-6 semaines après infection : 90% développent un syndrome viral. Symptômes durent 1-3 semaines et sévérité varie selon une évolution moins favorable. L’antigène p24 est présent et les Ac sont absents au début des symptômes, mais apparaissent 6-12 semaines après infection.

Phase de latence

Les CD4 sont >500 :

  • Équilibre entre SI et réplication virale
  • Peu de virus dans les cellules mononuclées périphériques
  • La charge virale baisse et se stabilise dans le sang à un niveau constant : « set point »
  • Pendant ce temps, il y a une activité intense aux ganglions et production de >1 milliard de particules virales par jour.

CD4 entre 200-500 :

  • Architecture du ganglion se détériore
  • Diminution de la capacité des ganglions à contrôler le virus : le virus devient plus important dans les cellules mononuclées àvirémie augmente.

Le patient est souvent asymptomatique ici, et constitue un réservoir de transmission. Il peut avoir des symptômes généraux (fatigue, sudations, adénopathies). Chez les plus âgés, candidose orale, leucoplasie chevelue de la langue, zona et réactivation d’herpès sont possibles. Durée médiane sans traitement : 8-10 ans avant de développer le SIDA. Le risque de développer le SIDA sans traitement est de 4-10%.

SIDA

  • Diminution des CD4 < 200
  • Présence d’une maladie définissant le SIDA

La réplication virale n’est plus contrôlée dans le ganglion et la virémie est importante avec un virus maintenant hétérogène qui a un tropisme pour les lymphocytes. Patient développe des infections opportunistes ou cancers. La diminution des CD4 indique de commencer la prévention de la pneumonie à Pneumocystis jirovecii (1re manifestation du SIDA chez 50% des non traités).

Principes de traitement

But
  • Améliorer état clinique
  • Diminuer mortalité
  • Rendre la charge virale non détectable
  • Augmenter le nombre de CD4 (reconstruction partielle du SI)
En 2018
  • Médicaments antirétroviraux bien tolérés et très efficaces
  • Traiter tôt pour préserver les réservoirs
  • Offrir le traitement à TOUS les patients, indépendamment du stade
  • Le contrôle de l’infection diminue, sans l’éliminer, l’inflammation secondaire à cette infection.
  • Traiter diminue l’inflammation chronique due au vieillissement prématuré et aux mx cardio.

Le plus tôt possible et pour toute la vie!Le patient doit être prêt psychologiquement, car ce traitement se prend toute sa vie. L’observance est très importante pour diminuer le risque d’émergence de résistance. Gestion des effets secondaires (sont rares).

Trithérapie (3 antirétroviraux)
  • Pour contrer les risques de résistance
  • Commencés en même temps pour éviter la résistance
  • Choix du traitement déterminé par l’analyse du génotypage qui détecte les gènes de résistance aux antirétroviraux du virus.

Il faut prendre 3 antirétroviraux de 2 classes différentes. De nos jours :

  • Débute avec 2 inhibiteursnucléosidiques de transcriptase inverse avec inhibiteur de l’intégrase
  • On peut remplacer l’inhibiteur d’intégrase par un non nucléosidique de la transcriptase inverse ou inhibiteur de protéase.

Principales classes d'antirétroviraux

Inhibiteurs de transcriptase inverse Nucléosidiques (terminent la synthèse d’ADH)

Non nucléosidiques (se lient à la transcriptase inverse pour la rendre non fonctionnelle)

Inhibiteur de protéase Empêche enzyme protéase de fragmenter en sous-unités actives la protéine précurseur produite par la réplication virale
Inhibiteurs de l'intégrase Inhibent enzyme intégrase àempêche insertion de l’ADN viral dans le génome humain
Inhibiteurs de l'entrée Inhibent entrée du virus dans la cellule.
  • Antagonistes du CCR5bloquant le co-récepteur CCR5 utilisé par certains virus pour entrer dans la cellule CD4 et empêcher l’entrée du virus dans la cellule
  • Inhibiteur de fusion se lie à la glycoprotéine de l’enveloppe du virus pour empêcher sa fusion avec la CD4 et son entrée

Prévention du VIH

Prévention
  • Éviter les contacts à risque (transmission par les relations sexuelles et par le sang)
  • Éviter les contacts entre les muqueuses et la peau non intact et :
    • Le sang
    • Les sécrétions vaginales
    • Le sperme
  • Pas de transmission dans la maisonnée sans ces expositions
  • Relations sexuelles protégées
  • Le contact d’une muqueuse avec le sang ou sécrétions sexuelles d’une personne infection non traitée constitue le plus fréquent
  • Risque négligeable chez les séropositives traitées qui ont une charge virale non détectable en absence de lésions génitales : Autres ITSS sont encore fréquentes

On accepte que le risque de transmission est inexistant si le patient est fidèle au traitement et son traitement est efficace, et que le patient n’a pas de lésions génitales ou autres ITSS : Peut cesser condom.

Le port du condom est recommandé dans les autres conditions et prévention contre les ITSS.

Prophylaxie pré-exposition
  • Patients à haut risque de contracter le VIH
  • 2 antirétroviraux (ténofovir +emtricitabine) dans un comprimé 1X par jour en continu ou de façon intermittente
  • Réduction importante de la transmission
  • Recommande toujours le port du condom
  • Traiter la mère infectée lors de la grossesse et l’accouchement
Prophylaxie post-exposition
  • Patients avec expositions à risque
  • Traitement de 3 antirétroviraux x 28 jours pour diminuer le risque d’acquisition du VIH
  • Exposition sexuelle ou professionnelle généralement