ULaval:MED-1223/Aménorrhée
1 Définition[modifier | w]
1.1 Aménorrhée primaire[modifier | w]
- 15 ans + présence caractères sexuels secondaires normaux
- 13 ans + absence caractères sexuels secondaires
- ≥3 ans depuis thélarche
- 14 + signes d’hirsutisme OU suspicion anomalie/obstruction tractus génital OU suspicion trouble alimentaire/exercice excessif
1.2 Aménorrhée secondaire[modifier | w]
Chez une patiente ayant débuté ses règles
- 3 cycles consécutifs si réguliers
- 6 mois si oligoménorrhée (intervalle de 35 jours et plus - cycle irrégulier)
2 Causes[modifier | w]
2.1 Aménorrhée primaire[modifier | w]
- Anomalies chromosomiques causant dysgénésie gonadique
- Hypogonadisme hypothalamique
- Agénésie mullérienne
- Maladie hypophysaire
- Autres (syndrome d’insensibilité aux androgènes, hyperplasie congénitale des surrénales, SOPK)
2.2 Aménorrhée secondaire[modifier | w]
- Anomalie ovarienne
- Dysfonction hypothalamique
- Anomalie hypophysaire
- Anomalie utérine
- Autre
2.3 Causes physiologiques[modifier | w]
Grossesse, allaitement, ménopause, retard pubertaire constitutionnel (dx d’exclusion).
Investiguer post-contraception : > 6 mois après arrêt CO ou > 12 mois après dépoprovera.
3 Anomalies tractus génital inférieur[modifier | w]
Endocrino: anomalies mullériennes (hymen imperforé, agénésie Mullérienne, septum vaginal transverse, agénésie/dysgénésie cervicale), syndrome d’insensibilité aux androgènes, syndrome d’Asherman, déficit en 5-a-réductase (rare).
3.1 Obstruction tractus génital inférieur[modifier | w]
Histoire de douleur cyclique, hémotocolpos, hématométrie, hémopéritoine, examen clinique et IRM.
Traitement : ouverture et drainage chirurgical par voie basse.
3.2 Hymen imperforé[modifier | w]
Habituellement diagnostiqué durant l’enfance. Peut se présenter à l’adolescence avec douleurs abdominales, aménorrhée, hymen bleuté et bombé à l’E/P.
Traitement : ouverture au bistouri et drainage.
3.3 Agénésie mullérienne[modifier | w]
Malformation congénitale du tractus génital: absence d’utérus et du 1/3 supérieur du vagin (qui proviennent normalement des canaux de Müller) + ovaires normaux.
Note: on peut voir un "dimple", soit une petite faussette a/n de l'entrée du vagin, car le 2/3 inférieur du vagin provient du sinus urogénital. Hymen présent aussi pour la même raison.
Phénotype féminin.
Cause exacte inconnue.
3.4 Syndrome d’insensibilité aux androgènes[modifier | w]
Caryotype 46 XY, phénotype féminin.
Absence d’OGI féminins, descente des testicules vers les canaux inguinaux.
Mais insensibilité des récepteurs donc féminisation des OGE et absence de poils.
3.5 Syndrome d’Asherman[modifier | w]
Synéchies intra-utérines suite à manipulations intra-utérines. Secondaire à destruction de l’endomètre.
Critères diagnostiques
- ≥ 1 de : aménorrhée, hypoménorrhée, infertilité, avortements spontanés répétés, placentation anormale
- Synéchies intra-utérines à l’HSC ou fibrose IU à l’histologie
Traitement : lyse d’adhérences par HSC.
70-80% succès de grossesse.
4 Anomalies de l’ovaire[modifier | w]
4.1 Dysgénésie gonadique[modifier | w]
Malformations des gonades durant le développement embryonnaire → atrophie des ovaires. Aménorrhée primaire ou secondaire.
Syndrome de Turner (50%), mosaïques ou 47 XXX.
4.2 Syndrome de Turner[modifier | w]
Caryotype 45 XO.
Phénotype féminin, stigmates physiques.
4.3 Insuffisance ovarienne précoce[modifier | w]
1% des femmes. Avant 40 ans. Causes génétique (X fragile), auto-immune, infectieuse, galactosémie ou iatrogénique (RadioTx, ChimioTx).
Radiothérapie : peut causer ménopause précoce. Ovaires jeunes sont + résistants.
Penser à suspension des ovaires en dehors du champ irradié (laparoscopie) ou congélation ovules avant le traitement.
Chimiothérapie : agents alkylants et chimiothérapie combinée sont très toxiques pour les ovaires. Peut prédisposer à ménopause précoce.
Penser à cryopréservation des ovules ou du tissu ovarien avant tx.
Suppression ovarienne par aGnRH n’a pas démontré d’effet protecteur, ni CO.
4.4 Syndrome des ovaires polykystiques[modifier | w]
Se manifeste de différentes façons (infertilité, SUA, aménorrhée, hirsutisme). À long terme, diabète, syndrome métabolique, hyperplasie endomètre, MCAS.
Diagnostic : 2 sur 3 critères de Rotterdam
- Oligo ou anovulation
- Hyperandrogénisme clinique ou biochimique
- Ovaires polykystiques à l’échographie (≥ 12 follicules 2-9 mm diamètre/ovaire et/ou volumes ovariens > 10ml/ovaire)
4.5 Anovulation chronique[modifier | w]
Condition nécessitant traitement car risque accru de néoplasie endomètre (estrogènes non opposés).
Biopsie endomètre.
Traitement : si pas désir de grossesse, provera ou COC. Si désir de grossesse, inducteur de l’ovulation.
Poursuivre investigation si pas de réponse aux progestatifs.
4.6 Autres ddx[modifier | w]
Maladie chronique débilitante, chimiotx ou radiotx, hormones exogènes, Rx.
5 Anomalies de l’hypophyse[modifier | w]
Hyperprolactinémie, adénome hypophysaire, déficit isolé en gonadotropine, syndrome de Sheehan.
Hyperprolactinémie : PRL inhibe GnRH. TRH stimule production de PRL. Dopamine inhibe PRL.
Prolactinome ou hypothyroïdie.
6 Anomalies de l’hypothalamus[modifier | w]
Aménorrhée hypothalamique fonctionnelle, syndrome de Kallman, tumeurs cérébrales, maladies chroniques.
Syndrome de Kallman : hypogonadisme hypogonadotrophique congénital. Déficit isolé en GnRH. Anosmie.
Aménorrhée hypothalamique fonctionnelle : diagnostic d’exclusion. Symptômes variables selon la suppression de la GnRH.
Troubles alimentaires, exercice physique, stress.
Anorexie/boulimie : perte poids 25% ou poids 15% < normale, image corporelle perturbée, déni, gestion nourriture inhabituelle, lanugo, bradycardie, hyperactivité, vomissements, aménorrhée, pas de patho médicale, pas d’autres troubles psychiatriques, constipation, hypotension, diabète insipide, hypercaroténémie.
7 Causes surrénaliennes[modifier | w]
7.1 Hyperplasie congénitale des surrénales[modifier | w]
Autosomale-récessive.
Déficit d’une enzyme (21-Hydroxylase) nécessaire à la synthèse surrénalienne du cortisol.
Hypophyse produit plus d’ACTH pour stimuler la surrénale.
Entraîne hyperproduction d’androgènes par surrénale et hyperandrogénisme chez filles.
7.2 Syndrome de Cushing[modifier | w]
Secondaire à une cortisolémie augmentée (ex. prise de corticostéroïdes exogènes).
Visage lunaire, bosse de bison, vergetures, alopécie.
8 Investigation[modifier | w]
8.1 Étape 1[modifier | w]
Questionnaire, E/P, b-hCG, TSH, PRL (> 100 ng/ml), FSH, LH, IRM (si sx neuro ou galactorrhée).
Investiguer si aménorrhée + de 6 mois suivant arrêt CO ou 12 mois après injection depo-provera.
Questionnaire : ATCD familiaux d’anomalies génétiques, ATCD médicaux (ITSS, endométrite, PID…), ATCD obstétricaux, Rx (hormones, cortico, PSN, chimio ou radio), développement pubertaire, croissance ou développement anormal, cycles menstruels, DDM, habitus, pilosité.
- Symptômes psy, symptômes neuro
- Troubles surrénaliens ou thyroïdiens
- Galactorrhée, hirsutisme, troubles visuels, céphalée
- Symptômes de grossesse
- Symptômes vasomoteurs
- Acné, peau grasse, perte cheveux
- Activité sexuelle, contraception
- Grosse maladie chronique (parfois, tellement malade que le corps arrête d’ovuler par protection)
E/P : SV, apparence générale et stigmates, taille, poids, IMC, état nutritionnel, développement pubertaire, thyroïde, galactorrhée, pilosité, peau, tractus génital inférieur.
8.2 Étape 2[modifier | w]
Afin de vérifier niveau œstrogène endogène et intégrité du tractus génital inférieur
Challenge au Provera (progestérone) "règle des 10" : 10 mg PO x 10 jours, saignement dans les 10 jours (2-14).
- Si positif (sang) : présence d’estrogènes endogènes et tractus génital normal.
Anovulation chronique (SOPK, hyperplasie congénitale surrénales: pour différencier doser 17-OH-progestérone).
Si pas de galactorrhée et TSH + PRL normales → arrêt investigation.
Traitement : CO ou induction ovulation.
- Si négatif : soit le tractus génital inférieur est non fonctionnel, soit il n’y a pas de stimulation estrogénique de l’endomètre → étape 3.
8.3 Étape 3[modifier | w]
Test avec estrogènes + progestatif : estradiol 2 mg DIE ou estrogènes conjuguées 1.25 mg DIE x 21 jours + Provera 10 mg jours 12 à 21 ou CO 1-2 cycles.
Faire 2e mois par prudence si négatif.
- Si négatif : incompétence du tractus génital inférieur
Hymen imperforé, anomalies mullériennes, syndrome d’Asherman, syndrome d’insensibilité aux androgènes.
- Si positif : Tractus génital inférieur fonctionnel. Absence de stimulation ostrogéniques de l’endomètre
Insuffisance ovariennes (↑ FSH-LH) ou causes hypothalamohypophysaire (↓ FSH-LH) à étape 4.
8.4 Étape 4[modifier | w]
Dosage FSH/LH
Si élevés : incapacité ovarienne de production: dysgénésie gonadique ou insuffisance ovarienne précoce.
Si normales ou basses : stimulation insuffisante des ovaires: anomalie hypophysaire ou hypothalamique.
Normale : FSH 5-20 UI/L (2x en pic ovulatoire) et LH 5-20 UI/L (3x en pic ovulatoire).
Molécules biologiquement inactives → insuffisance hypothalamo-hypophysaire.
Hypogonadotropique : FSH et LH < 5 UI//L
Anorexie, large tumeur hypophysaire, tumeur cérébrale, perte poids importante, stress majeur.
IRM ou TDM cérébral avec Gadolinium (hypophysaire vs hypothalamique).
Hypergonadotropique : FSH > 30 UI/L et LH > 40 UI/L
Si < 30 ans à faire caryotype.
Mosaïque avec Y à gonadectomie (risque élevé de tumeurs malignes; gonadoblastome, dysgerminome, choriocarcinome,tumeur sinus endodermique).
10-20% vont retrouver fonction ovarienne normale.
8.5 Étape 5[modifier | w]
Imagerie de la selle turcique.
IRM : préférable au TDM car + précis pour évaluer extension et syndrome de la selle turcique vide.
Avantage: évite radiations.
Inconvénients: + coûteux, souvent moins accessible.
Anormal avec lésion : prolactinome, tumeur compressive.
Normal : hyperPRL, maladie chronique, Sheehan, Kallman, aménorrhée hypothalamique fonctionnelle.
9 Hyperprolactinémie[modifier | w]
Galactorrhée, cycle menstruel normal possible ou saignement prémenstruel, oligoménorrhée ou aménorrhée.
- 1/3 patientes aménorrhée secondaire = adénome hypophysaire
- ½ galactorrhée + aménorrhée secondaire = adénome hypophysaire
Adénome à prolactine : prise en charge conservatrice (tumeurs stables).
Traitement avec agonistes de la dopamine
- Bromocriptine (somnolence, trouble contrôle pulsions, OMI, douleur lombaire, sx pulmonaires, HTO)
- Cabergoline (céphalée, diarrhée, constipation, étourdissements, fatigue, No/Vo)
Traitement chirurgical si pas de réponse au médical ou > 10 mm ne répondant pas aux Rx.
Traitement x 2 ans avec la + petite dose normalisant la PRL. Après, si diminution de l’adénome à arrêt et suivi annuel après (car récidive).
Certains médicaments causent galactorrhée (narcotiques, psychiatriques, anti HTA, hormones, anti émétiques, héroïne, anti épileptiques).
10 Conséquences de l’aménorrhée[modifier | w]
Ostéoporose, fractures de stress, hyperplasie/cancer endomètre (anovulation chronique).
Traitement : hormonothérapie, calcium + vitamine D, exercices avec mise en charge.