ULaval:MED-1221/Polyarthrite rhumatoïde
Définition
Maladie inflammatoire chronique touchant les articulations. Gonflement articulaire symétrique + manifestations extra-articulaires et complications systémiques.
5 articulations ou + (inflammation synoviale).
Arthrite inflammatoire la + fréquente.
1% de la population, surtout des femmes.
Arthrite : gonflement articulaire (synovite).
Arthralgie : toutes les douleurs au niveau des articulations.
Oligoarticulaire : 2-4 articulations touchées.
Inflammatoire | Mécanique |
---|---|
Douleur prépondérante nuit et matin | Douleur diurne, ↑ après-midi ou soirée |
Raideur matinale > 1 heure | Raideur < 1 heure (« gelling ») |
Amélioré par l’exercice « se réchauffe » | Amélioré par repos |
Gonflement articulaire | Peu de gonflement |
Érythème (goutte, septique) | Pas d’érythème |
Fatigue, asthénie | Peu d’atteinte de l’état général |
Physiopathologie
Facteurs de risque:
- Prédisposition génétique (prévalence accrue chez parents 1e degré, 70% ont HLADR4 ou HLA-DR1)
- Tabac
Investigation
Bilan de base
- FSC
- Sédimentation et/ou PCR
- Créatinine
- Calcium/phosphore
- ALT-AST,
- Phosphatase alcaline
- Acide urique (goutte)
- SMU
- TSH
- HLA-B27 (si SA suspectée)
Bilan immunologique
- Facteur rhumatoïde
- Anti-CCP
- ANA (collagénose)
Radiographies
Mains/pieds, sacro-illiaques (spondylarthropathie suspectée).
Recherche: gonflement tissus mous, déminéralisation para-articulaire, érosions, pincement articulaire, subluxation, ankylose.
Atteints précoces à apophyse styloïde de l'ulna, 2e-3e MCP, 5e MTP.
IRM ou échographie (érosions, détection précoce, oedème moelle osseuse, évaluation de l’activité inflammatoire par doppler).
Laboratoire
Anomalies non spécifiques: anémie inflammatoire, leucocytose, thrombocytose, ↑ VS et PCR.
30-40% auront paramètres inflammatoires normaux initialement.
CCP : anticorps contre la portion cytrullinée des protéines. Sensbilité de 60-70% et spécificité de 97% (doit suivre patient si +).
Facteur rhumatoïde
Séropositif. IgM anti-IgG. Sensibilité de 70% et spécificité de 90%.
5-10 % de la population ont FR +.
Lien avec sévérité et manifestations extra-articulaires.
Positif si connectivites, infections ou états inflammatoires chroniques.
Analyse liquide synovial
Si mono/oligoarthrite aiguë ou chronique, ou polyarthrite + fièvre.
Décompte cellulaire, recherche de cristaux, gram et culture.
Présentation clinique
Mode de présentation
Gonflements polyarticulaires symétriques (insidieux ou aiguë), palindromiques.
Manifestations extra-articulaires (rare).
Souvent, symptômes systémiques + raideur matinale > 1 heure.
Palindrome : mono/oligoarticulaire. Épisodique (quelques heures/jours), avec intervalles asymptomatiques.
1/3 autorésolutif, 1/3 évolue en PAR, 1/3 évolue en une autre pathologie.
Extra-articulaire (< 5%) : péricardite ou épanchement pleural.
Articulations touchées : MCP, IPP, poignets et MTP. Aussi coudes, épaules, chevilles, genoux et hanches.
Pas les IPD ni le rachis (sauf C1-C2) ni sacro-illiaques.
80% auront mains + pieds en présentation initiale.
Autres symptômes
- Ténosynovites/bursites
- Atrophie musculaire par sous-utilisation
- Arthrose secondaire
- Déformations (subluxations, contractures flexion, boutonnière, col de cygne, déviation ulnaire)
- Nodules rhumatoïdes (sous-cutanés, points de friction. À la surface des tendons extenseurs. Granulome)
Diagnostic : score ≥ 6 à la classification
CCP, vitesse de sédimentation et protéine C réactive
Permet de traiter rapidement
Manifestations extra-articulaires
Penser à collagénose ou vasculite.
+ fréquentes chez personnes ayant facteur rhumatoïde sérique positif (40%).
Oeil : kératoconjonctivite sèche, sclérie ou épisclérie, scléromalacie perforante, sclérite antérieure ou nodulaire (empire avec le temps).
Poumons : épanchement pleural, nodules pulmonaires, fibrose (++), pneumopathie organisée cryptogénique, hypertension pulmonaire, pneumoconiose rhumatoïde.
Atteinte pulmonaire est fréquente.
Coeur : péricardite (+), myocardite, trouble de conduction ou dysfonction valvulaire (secondaire à nodule).
Neurologique : neuropathie de compression (tunnel carpien), neuropathie périphérique, mononévrite multiple (cas sévères), myélopathie (subluxation cervicale).
Vasculite : artérites digitales avec ischémie et ulcération des doigts, ulcérations chroniques des MI, Raynaud (rare) + symptômes systémiques.
Complications systémiques : ostéoporose, amyloïde secondaire (rare), syndrome de Felty (PAR + splénomégalie + neutropénie, rare), des manifestations cardiovasculaires systémiques.
Évolution
Poussée-rémissions:
10% rémission pour de bon avec traitement
15-30% poussées avec rémissions assez longues pour arrêt tx
60-75% auront une maladie chronique (traitement long terme)
Facteurs de mauvais pronostic:
- Persistance d’inflammation après un an de traitement
- Limitations fonctionnelles
- Facteur rhumatoïde ou anti-CCP
- Érosions précoces en radiologie
- Manifestations extra-articulaires (incluant nodules)
- Tabac, faible degré de scolarité, faible niveau socio-économique, comorbidités
- Jeune âge au début de la maladie
- Activité élevée de la maladie
- VS ou PCR élevées
Classe fonctionnelle
- Capable de faire toutes ses activités (40%)
- Limité pour les loisirs (50% dans 2 et 3 combinées)
- Limité au travail et dans les loisirs
- Limité dans toutes les activités incluant les soins personnels (10%)
Approche clinique
Établir diagnostic (histoire, E/P, laboratoires, radiologie).
Évaluer degré d’activité.
Préciser diagnostic.
Établir traitement (but à aucune articulation douloureuse).
Traitement
Traitement optimal précoce : on vise d’atteindre notre cible de rémission clinique le + vite possible car si apparition rapide d’une incapacité, lésions articulaires précoces irréversibles, mortalité dans les cas sévères ( ↓ espérance de vie de 5-10 ans).
Bilan avant traitement : biologique, RX poumons, dépistage infection latente, vaccination.
Non-pharmacologique
Éducation : patient et ses proches. Références, différents traitements, évolution et pronostic.
- Groupes d’entraides
- Prédisposition aux infections/précipitation des infections latentes
- Dépister hépatites, vacciner, tuberculose
- Cesser tabac
Modalités physiques : physiothérapie (fonction articulaire), ergothérapie (protection articulaire, conservation énergie, techniques de simplification du travail).
Pharmacologique
Anti-inflammatoires
Pas d’effet sur l’évolution de la maladie, mais soulage.
AINS : inhibition de COX → arrêt production prostaglandines. COX-2 + dans 2e génération. Absorption rapide, métabolisme hépatique, élimination rénale. Demi-vie
variable. Interactions médicamenteuses dues à l’induction du cytochrome P450.
Effets secondaires : ulcus peptique, hémorragies digestives, perforation, HTA, rétention hydrique, IRA, néphrite interstitielle, risque thrombose/IDM/AVC, toxicité hépatique.
FDR complications GI : ≥ 75 ans, ATCD, warfarine.
Coxibs ↑ risques cardiovasculaires.
Corticoïdes : soulagement rapide en cas d’intolérance/inefficacité des AINS.
Traitement pont avant agents de rémission ou traitement temporaire pour crises.
10 mg/jour, favoriser infiltrations.
Effets secondaires : diabète, HTA, ostéoporose, cataractes, glaucome, insuffisance surrénalienne, acné, atrophie cutanée, dépression, psychose, ulcus peptique, myopathie, nécrose avasculaire, syndrome de retrait, prédisposition aux infections.
Agents de rémission non biologiques
À débuter dès le diagnostic.
Antimalariques : sulfate d’hydroxychloroquine (+) ou phosphate de chloroquine.
Très bien tolérés. Toxicité rétienne ou myopathie (très rare), faire suivi ophtalmologique chaque année.
Délai d’action de 3-6 mois
Méthotrexate : traitement de fond le + utilisé. Antimétabolite inhibant la synthèse des purines et de l’ADN des leucocytes. PO ou S/C (+ efficace)
- Délai d’action 4-8 semaines
- Meilleur rapport efficacité/tolérance (meilleur taux de maintenance)
- Effets secondaires : intolérance digestive, aphtes ou stomatite, macrocytose ou cytopénies, pertubations bilan hépatique, fibrose pulmonaire, tératogène
- Ajuster dose pour IR
- Bilans sanguins q 4-8 semaines + acide folique toujours. Limiter alcool
Léflunomide : agent immunomodulateur inhibant la synthèse des pyrimidines. Semblable au méthotrexate.
Sulfasalazyne: Délai d’action de 2-4 mois. Contre-indiqué chez allergiques aux sulfas.
Formule sanguine mensuellement au début du traitement.
Indicateurs réponse sous-optimale
- Nombre d’articulations avec synovites
- Incapacité fonctionnelle
- Persistance des marqueurs inflammatoires
- Progression des dommages radiologiques
Agents de rémission biologiques
- Anti-TNFa (adaliumumab, Étanercept, infliximab,certolizumab, golimumab)
- Inhibiteur IL6 (tocilizumab, sarilumab)
- Modulateur costimulation (abatacept)
- Anti-CD20 (rituximab)
Bénéfices : rémission clinique, prévention dommages structuraux, améliore qualité de vie, maintien de la fonction, diminution de la mortalité et des évènements cardiovasculaires.
Risques : infections sérieuses bactériennes, infections opportunistes, néoplasies (pour l’instant, aucun risque mais pas longtemps que l’étude est fait), autres
occurrences rares. Petite réaction locale → pas grave.
Action rapide, efficaces, réponse durable, tolérance acceptable.
Tous la même efficacité en 1e ligne.
Toujours combiner avec DMARD traditionnel si possible.
Contre-indications Anti-TNF
- Syndromes lymphoproliphératifs
- Maladies démyélinisantes
- Lupus
- Néoplasies récentes
- Infections actives
- Insuffisance cardiaque modérée ou grave
Petites molécules à action biologique : inhibiteurs des JAK. Inhibiteur à action orale.
Tafcitinib → JAK3 et JAK 1 >>> JAK 2
Baricitinib → JAK 1 et JAK 2
Courte demi-vie.
Risque + élevé pour herpes zoster que biothérapies, sinon mêmes efficacité et risques.
Effets secondaires GI, contre-indiqué en IR.