ULaval:MED-1221/Connectivite

De Wikimedica
Ce guide d’étude a été élaboré par les volontaires de Wikimedica dans le cadre du cours MED-1221 à l'Université Laval et est basé sur le travail des responsables du cours (Léanne Pilote). Il est fourni comme aide à l'étude et ne constitue pas un document officiel du cours.

Définitions

Auto-immunité sérologique : phénomène pouvant survenir chez la personne en santé et peut ne pas causer de maladie clinique.

Auto-immunité clinique : présence de symptômes ou de signes cliniques provenant d’une activation incontrôlée du système immunitaire et causant une inflammation en présence d’auto-anticorps.

Facteurs associés:

  • Âge plus avancé
  • Sexe féminin
  • Histoire familiale de maladie autoimmune
  • Infection récente
  • Prise de certains médicaments

Auto-anticorps n'égalent pas auto-immunité (anticorps peuvent être détectables 5-10 ans avant).

Pathophysiologie

3 stades de l’auto-immunité clinique

  1. Perte de tolérance du système immunitaire aux antigènes nucléaires
  2. Production d’auto-anticorps contre ces antigènes
  3. Apparition de symptômes et signes cliniques

Élévation des auto-anticorps avant le diagnostic.

Connectivites : groupe de maladies caractérisées par atteinte inflammatoire chronique des tissus conjonctifs.

  • Tissu conjonctif
  • Atteinte multi-systémique
  • Plus chez les femmes
  • Altérations du système immunitaire
  • Chevauchements entre 2 ou 3 maladies sont fréquents
  • Synthèse accrue d’Ig → auto-anticorps → complexes immuns → activation du complément
  • Anomalies de l’immunité cellulaire

Organes de prédilection:

LED → articulations, peau, rein

SCL → peau

PM/DM → peau, muscles

SS → glandes salivaires

MCTD → articulations, peau, muscles

Chevauchement : nommer la maladie selon le tableau clinique prédominant. Si impossible, nomme la maladie un Syndrome de chevauchement.

Connectivite mixte (MCTD) : entité en soi regroupant synovite, myosite, Raynaud et sclérodactylie. Anti-RNP

Symptômes possibles : fatigue, perte de poids, arthralgie, arthrite, Raynaud, aphtes, alopécie, rash, photosensibilité, faiblesse proximale, xérostomie, xérophtalmie, fièvre de cause inconnue, péricardite, pleurésie, convulsion, psychose, cytopénies, hémolyse, glomérulonéphrite, thromboses, fausses couches, antécédents familiaux.

Investigation

  • Histoire et E/P
  • Bilans généraux pour manifestations rénales, hématologiques ou musculaires
  • FSC, dosage créatinine et créatine kinase, VS et analyse d’urine
  • Cesser investigation si clair que pas de connectivite
  • Sinon, tests sanguins plus poussés: FAN, anti-dsDNA, anti-smith, dosage du complément, anti-Scl70, anticentromère, anti-Jo1, anti-Ro, anti-La
  • Tests à la recherche du syndrome antiphospholipides: anticardiolipines IgM et IgG, anti-B2 glycoprotéine 1, anticoagulant lupique

Raynaud

Chez les patients atteints de la maladie de Raynaud, l'ischémie donne une couleur blanche aux doigts.

Changement de coloration épisodique des extrémités, précipité par l’exposition au froid ou à une émotion forte.

Doigts (++), orteils, nez, oreilles.

Physiopathologie : hypersensibilité des petits vaisseaux digitaux à vasoconstriction inappropriée.

Blanc (ischémie secondaire) → bleu (cyanose) → rouge (hyperhémie réactionnelle de reperfusion).

Diagnostic clinique : histoire ou E/P et 2 couleurs sur 3.

Présentation clinique

Primaire : jeunes femmes autour de la ménarche. Symétrique, épargne le pouce. Ischémie moins sévère, pas de lésion. Peut s’associer à des spasmes d’autres artères.

Secondaire : beaucoup moins homogène. Début plus tardif. Asymétrique, épisodes intenses pouvant entrainer ischémie, ulcérations et nécrose.

À l’E/P, peut avoir anomalies capillaires visibles à l’oeil nu (capillaroscopie).

Facteur anti-nucléaire ou autres anticorps

Causes secondaires : connectivites, atteintes traumatiques et occupationnelles, syndrome du défilé thoracique, maladie vasculaire athérosclérotique, thromboses

ou embolies, maladie de Berger, certains Rx ou toxines avec effet vasoconstrictif, syndrome douloureux régional complexe, hyperviscosité sanguine de toute cause.

Complications : très rares en primaire. En secondaire, nécrose et ulcérations, propices à l’infection, guérison difficile (ischémie), ATB prolongés et débridement plaie.

Peut tenter prostaglandines IV.

Si échec à tout, amputation.

Investigation

Aucune investigation requise si primaire.

Si secondaire suspecté : bilan sanguin (FSC, fonction rénale et hépatique, dosage FR et complément, facteur antinucléaire), analyse d’urine.

Traitement

Non pharmacologique : cesser le tabac, modalités physiques de réchauffement, parfois doivent changer d’emploi.

Pharmacologique : vasodilatateurs (BCC ou nitro topique). Si échec, blocs nerveux sympathiques.

Sclérodermie

Changement dégénératif et fibreux de la peau à peau raide et indurée.

Peuvent se produire presque partout dans le corps.

Classification

Le syndrome CREST se présente par de la chondrocalcinose, phénomène de Raynaud, « esophageal dismotility », Sclérodactylie et Télangectasies.

Localisée (enfant) : morphée, linéaire et en coup de sabre (dermatologie).

Systémique

  1. Diffuse : atteinte cutanée s’étend proximalement aux coudes et aux genoux. Atteintes d’organes internes à fibrose pulmonaire et crise rénale sclérodermique. Atteinte cutanée débute parfois par oedème des extrémités avec démangeaisons.
  2. Limitée (CREST) : seulement distal aux coudes et genoux. Calcinose, Raynaud, « esophageal dismotility », Sclérodactylie et Télangectasies.

Plus rares → sine sclérodermie, induite par l’environnement, syndromes de chevauchement, pré-sclérodermie.

Physiopathologie

Prédisposition génétique. Élément déclencheur méconnu.

  • Stress oxydatif, radicaux libres → anomalies de l’endothélium et inflammation périvasculaire
  • Persistance du stress oxydatif → mort des cellules endothéliales, prolifération des fibroblastes et cellules musculaires lisses → épaississement de la paroi des vaisseaux
  • Contrôle anormal de la vasoconstriction par débalancement entre les médiateurs de vasoconstriction et de vasodilatation
  • Ischémie des tissus accentue le stress oxydatif → fibrose des tissus par synthèse accrue de collagène par les fibroblastes

Présentation clinique

Cutané :peau indurée et fixe, hypo ou hyper-pigmentée. Perte de pilosité et diminution de sudation. Calcifications cutanées (calcinose).

Vaisseaux : Raynaud (> 95%), télangiectasies.

Musculo-squelettiques : arthralgies ou arthrites symétriques, contractures articulaires (sans inflammation) → atrophie musculaire (non-utilisation). Possible myosite associée.

Gastro-intestinal : pyrosis et RGO (typique) car hypo motilité de l’oesophage et incompétence du sphincter inférieur par fibrose. Malabsorption → pullulation bactérienne intra-intestinale par hypo motilité et dilatation duodénale et jéjunale. Possible incontinence fécale (perte de fonction du sphincter anal).

Cardiaque : effusion péricardique, péricardite constrictive ou tamponnade, fibrose du myocarde.

Pulmonaire : fibrose pulmonaire (diffuse surtout) ou hypertension pulmonaire (CREST surtout).

Rénale : crise rénale sclérodermique (HTA + détérioration de la fonction rénale d’installation rapide), micro-angiopathie thrombotique.

Investigation

Anomalies non spécifiques de l’inflammation.

FAN chez 80-90%.

Anti-centromère dans le CREST.

Anti-Scl70 dans forme diffuse.

Traitement

Surtout symptomatique (aucun traitement vraiment été prouvé).

Méthotrexate pour cutané et articulaire

Vasodilatateurs pour Raynaud

IECA pour crise rénale

Cyclophosphamide pour fibrose pulmonaire évolutive

Évolution : bénigne.

Beaucoup plus morbide que mortelle (mortalité surtout liée à l’atteinte pulmonaire).

Lupus érythémateux disséminé

Maladie inflammatoire chronique, multiples auto-anticorps et atteinte multi-systémique.

À différencier de

  • Lupus discoïde (cutané)
  • LED induits par Rx (procaïnamide, quinidine,hydralazine, isoniazide, anticonvulsivants, doxycycline, agents biologiques de la famille des anti-TNFalpha)
  • LED associé à déficit inné du complément

Physiopathologie

Pas complètement élucidée. Plusieurs facteurs impliqués:

  • Prédisposition génétique (HLA-DR2 et DR3)
  • Race noire et asiatiques
  • Implication hormonale (femmes pré-ménopausées ++)
  • Facteurs environnementaux (soleil)
  • Facteurs précipitants → dérégulation des lymphocytes et production d’autoanticorpsmultiples → se lient à des antigènes → formation de complexes immuns → se déposent dans les tissus → activation du complément → réponse inflammatoire systémique

Critères de classification

Le rash malaire dans le lupus épargne les plis nasogéniens.

ACR : la plus utilisée. 11 critères, 4/11 suggèrent diagnostic (mais pas automatique).

  • Rash malaire
  • Rash discoïde
  • Photosensibilité
  • Aphtes
  • Arthrite
  • Sérosites
  • Atteinte neurologique
  • Atteinte rénale
  • Atteinte hématologique
  • Atteinte immunologique
  • Présence d’anticorps anti-nucléaires

Sensibilité et spécificité 96%

Présentation clinique

Rash malaire : épargne plis nasogéniens (forme de masque de soirée).

Rash discoïde : hyperkératose (lésions surélevées).

Photosensibilité : éruption suite au soleil.

Aphtes : palais, non douloureux (rechercher à l’E/P).

Arthrite : arthrite de Jaccoud. Non érosive. 2 articulations au minimum.

Sérosites : inflammation des séreuses. Pleurésie ou pleurite avec ou sans épanchement pleural ou péricardite. Ascite aussi possible.

Atteinte neurologique : 19 sous-types. Seulement 2 utilisés comme critère diagnostique (psychose et convulsion).

Atteinte rénale : néphrite lupique. 6 classes. Critère rempli si protéinurie persistante > 500 mg/24 heures ou > 3+ au bâtonnet ou cylindres cellulaires.

Atteinte hématologique : anémie hémolytique, leucopénie < 4000, lymphopénie < 1500, thrombopénie < 100 000. Secondaires à anticorps. Anémie inflammatoire (pas partie des critères).

Atteinte immunologique : anti-DNA (pratiquement tous les patients. Présent chez 5% des sains) ou anti-smith ou syndrome antiphospholipides + (thromboembolies veineuses ou artérielles ou pertes embryonnaires ou foeales à répétition + test positif x 2 à 3 mois d’écart mais < 5 ans).

Évolution : poussées et rémissions. Fatigue et fièvre, reconnaissent leurs poussées.

Anomalies non spécifiques de laboratoire.

Traitement

Non pharmacologique : éducation sur la photoprotection contre rayons UV, exercice physique, prise en charge des FDR cardiovasculaires et ostéoporotique, adhérence au traitement, suivis réguliers. Contraception et complications possibles.

Pharmacologique : dépend des manifestations.

Hydroxychloroquine : peau, arthrite, sérosites, sang, rein, cerveau.

AINS : arthrite, sérosités.

Prednisone basse dose : peau, arthrite, sérosités.

Prednisone haute dose : sang, rein, cerveau.

Méthotrexate : arthrite, sérosités.

Azathioprine : sang, rein, cerveau.

Mycophénolate mofétil : sang, rein, cerveau.

Cyclophosphamide : sang, rein, cerveau.

Rituximab : sang, rein, cerveau.

Nouveaux traitements : anticorps monoclonal dirigé contre cytokine qui stimule lymphocytes B. B-lymphocyte stimulator. IV, $$$

Pronostic : dépend des organes atteints et de la sévérité. Les pires sont atteinte rénale, atteinte hématologique et atteinte neurologique. Infection peut causer mortalité. 7-15 ans plus tard, maladie cardio-vasculaire.

Polymyosite/Dermatomyosite

Polymyosite : atteinte inflammatoire auto-immune des muscles striés.

Dermatomyosite : quand l’atteinte musculaire s’accompagne d’une atteinte cutanée caractéristique.

Classification

  1. Polymyosite primaire idiopathique
  2. Dermatomyosite primaire idiopathique
  3. Dermatomyosite associée à néoplasie
  4. Dermatomyosite de l’enfant
  5. PM/DM associée à une autre connectivite (Syndrome de chevauchement)

Présentation clinique

Faiblesse musculaire symétrique d’abord proximale puis progresse en quelques semaines/mois.

Surtout muscles fléchisseurs du cou.

Dysphagie associée par atteinte du tiers proximal.

Atteinte des muscles respiratoires et cardiaques.

Pas ou peu de douleur.

E/P : muscles peu atrophiés, manifestations dermatologiques caractéristiques:

Rash héliotrope : violacé squameux des paupières.

Papules de Gottron : rash érythémato-squameux sur face dorsale des MCP et IPP.

Shawl sign : rash érythémato-squameux sur partie exposée au soleil au cou du patient, en antérieur et postérieur.

Mechanic’s hands : décoloration brune à noire des mains avec hyperkératose.

Aussi, fibrose pulmonaire et dermatomyosite + tumeurs solides.

Investigation

Prises de sang : dosages d’enzymes musculaires (surtout CK), AST/ALT, inflammation, ANA (80% des cas), anti-Jo1 est spécifique mais pas toujours présent.

EMG : augmentation de l’irritabilité de la membrane, fibrillation de repos, potentiels moteurs polyphasiques de faible amplitude et de courte durée en plus de décharges

complexes répétitives lors des contractions musculaires.

IRM : signes d’inflammation peut aider pour site de biopsie.

Biopsie musculaire : infiltrat lymphocytaire, distribution varie selon PM ou DM. Périvasculaire dans la DM, intra-fasciculaire dans la PM. Nécrose et régénération des fibres musculaires.

Rechercher néoplasie sous-jacente (15-20% des cas).

Poumon, seins, colon, estomac.

Répéter et demeurer aux aguets.

Critères de classification

Critères individuels

  1. Faiblesse musculaire proximale symétrique
  2. Myosite à la biopsie
  3. Augmentation des enzymes sériques
  4. Tracé EMG caractéristique
  5. Rash typique de dermatomyosite

Polymyosite

  • Définitif si critères 1 à 4
  • Probable si trois des 4 premiers critères
  • Possible si 2 critères

Dermatomyosite

  • Définitif si critère 5 + 3 des 4 premiers critères
  • Probable si critère 5 + 2 des 4 premiers critères
  • Possible si critère 5 + 1 des 4 premiers critères

Traitement

Fortes doses de corticostéroïdes.

Agents immunosuppresseurs (azathioprine et méthotrexate).

Syndrome de Sjögren

Le syndrome de Sjogren touche surtout les glandes lacrymales et salivaires.

Inflammation chronique des glandes salivaires et lacrymales d’origine auto-immune.

Théoriquement, toutes les glandes peuvent être atteintes.

Forme primaire + rare.

Le + souvent associé à une autre connectivite (15% PAR).

Pathophysiologie : pas complètement élucidée. Atteinte inflammatoire des glandes, le plus souvent salivaires mineures et majeures et glandes lacrymales → obstruction de la lumière des canaux d’excrétion et diminution de leur sécrétion.

Présentation clinique

Atteinte des yeux : xérophtalmie. Impression de sable dans les yeux et larmoiement.

Kératoconjonctivite sèche.

Atteinte salive : xérostomie. Difficulté à manger des aliments secs, diminution du goût, perte de salive à favorise caries dentaires et ulcérations. Gonflement des glandes parotides et sous-maxillaires.

Poumons : + rare. Sécrétions pulmonaires + épaisses. Atteinte inflammatoire du parenchyme (pneumonite).

Rénale : acidose tubulaire rénale de type 1 à acidose métabolique à anion gap normal (perte bicarbonates niveau urinaire).

Peau : sèche. Purpura palpable des MI + hypergammaglobulinémie

Forme primaire : arthralgies, lymphadénopathies, splénomégalie, cirrhose biliaire primitive et parfois atteinte neurologique (ex. SP).

Investigation

Test de Schirmer : démontre diminution de production de larmes. Papier absorbant entre conjonctive et paupière inférieure. Test anormal si imbibé sur moins de 5 mm à 5 min.

Colorant Rose Bengal : coloration de la cornée pour voir anomalies. Kératite filamenteuse ou ulcérations cornéennes.

Biopsie glandes salivaires mineures : test de prédilection. Désinfection et anesthésie locale à infiltrat lymphocytaire.

Évolution : plus souvent bénin (sauf primaire).

Complication redoutée est lymphome.

Traitement

Avant tout symptomatique

  • Larmes artificielles
  • Bouteille d’eau
  • Agonistes cholinergiques (pilocarpine) pour favoriser sécrétion salive
  • Parfois prednisone ou immunosuppresseurs si atteinte neurologique