ULaval:MED-1202/Pathologies pleurales

De Wikimedica
Ce guide d’étude a été élaboré par les volontaires de Wikimedica dans le cadre du cours MED-1202 à l'Université Laval et est basé sur le travail des responsables du cours. Il est fourni comme aide à l'étude et ne constitue pas un document officiel du cours.

La plèvre est une membrane métaboliquement active. La composition et la quantité de liquide pleural sont très stables. L’apparition d’un épanchement pleural est le résultat d’un déséquilibre entre la formation et la réabsorption. Lors de l'épanchement pleural, une évaluation clinique associée à l’analyse du liquide pleural devrait suffire pour en déterminer l’étiologie. Comme pathologies fréquentes de la plèvre, l'on compte la pneumonie bactérienne qui se complique dans 40% des cas d’un épanchement pleural, le mésothéliome malin et le pneumothorax.

Physiologie pleurale

La plèvre est une membrane métaboliquement active. Elle est impliquée dans l’homéostasie de l’espace pleural et dans la réponse à l’inflammation. Il existe un espace réel de 20 µm entre la plèvre viscérale et pariétale où on retrouve le liquide pleural (0.3 ml/kg). Les cellules mésothéliales recouvrent les deux surfaces pleurales.Le liquide pleural origine des vaisseaux systémiques des membranes pleurales et a une faible teneur en protéine. L’absorption des liquides pleuraux se réalise essentiellement au niveau des lymphatiques de la plèvre pariétale. La régulation du liquide pleural dépend essentiellement de l’efficacité du drainage lymphatique.

Pathophysiologie de l’épanchement pleural

Schématisation de l'épanchement pleural

La composition et la quantité de liquide pleural sont très stables. L’apparition d’un épanchement pleural est le résultat d’un déséquilibre entre la formation et la réabsorption.

Augmentation de la formation de liquide

  1. Augmentation de la perméabilité
  2. Augmentation de la pression micro-vasculaire (pression veineuse)
  3. Diminution de la pression pleurale
  4. Diminution de la pression plasmatique oncotique

Diminution de la réabsorption

  1. Diminution de la contractilité lymphatique
    • Inflammation
    • Anomalies endocriniennes
    • Infiltration des lymphatiques par le cancer
    • Lésion secondaire à la radiothérapie
    • Anomalies anatomiques
  2. Diminution de la fonction lymphatique
    • Limitation des mouvements respiratoires (paralysie du diaphragme)
    • Compression extrinsèque (fibrose pleurale)
    • Blocage des stomata lymphatiques (cancer)
    • Diminution de la pression intrapleurale

Présentation clinique

Épanchement pleural au TDM
Épanchement pleural gauche

Dans 75% des cas, une évaluation clinique associée à l’analyse du liquide pleural devrait suffire pour déterminer l’étiologie de l’épanchement pleural. L’épanchement pleural peut être secondaire à des maladies locales de la plèvre ou du poumon ou à des maladies systémiques.

Les symptômes principaux à rechercher sont :

L’examen physique peut montrer les anomalies suivantes :

La radiographie pulmonaire est l’examen initial à faire chez tous les patients lorsqu’on suspecte un épanchement pleural. La radiographie standard sera anormale en présence de 250 ml de liquide. Une tomodensitométrie thoracique sera effectuée afin de mieux visualiser la plèvre et le poumon. On peut noter des épaississements pleuraux, des nodularités ainsi que des loculations. L’échographie pleurale est utilisée afin de visualiser les loculations et effectuer une ponction pleurale sous guidance lorsqu’elle est impossible à l’aveugle.

Ponction pleurale

Ponction pleurale

La ponction pleurale reste le premier geste à accomplir devant un épanchement pleural. L’analyse du liquide permet de fournir des informations utiles dans la démarche diagnostique. L’étape initiale de l’évaluation d’un épanchement consiste à déterminer s’il s’agit d’un exsudat ou d’un transsudat. Cette étape est primordiale afin de préciser quel est le diagnostic différentiel et le besoin d’investigation

Voici les critères de Light. Si 1 des 3 critères est présent, il s’agit d’un exsudat :

  1. Contenu en protéine du liquide pleural / Contenu en protéine du sérum >= 0.5
  2. LDH du liquide pleural / LDH du sérum >= 0.6
  3. LDH du liquide pleural > 2/3 de la limite supérieure de la valeur normale.

Si aucun des critères de Light n’est présent, il s’agit d’un transsudat. Un épanchement pleural exsudatif résulte d’une inflammation pulmonaire ou pleurale amenant une fuite protéique. Le drainage lymphatique peut également être diminué. L’exsudat peut également être secondaire à un mouvement de liquide de l’espace péritonéal.

Étiologies

Exsudats

Les exsudats sont causés par une fuite protéique.

Transsudats

Les transsudats sont secondaires à un déséquilibre entre la pression oncotique et hydrostatique. Ils peuvent aussi résulter d’un mouvement de liquide en provenance de l’espace péritonéal. L’insuffisance cardiaque est une cause fréquente de transsudat, quoi qu'elle peut aussi causer des exsudats.

Caractérisation

Afin de mieux caractériser un exsudat, il y a d’autres paramètres à prendre en considération. La cytologie du liquide pleural ramène un diagnostic de cancer dans 60% des cas. Il s’agit le plus souvent d’un cancer du poumon, mais il peut aussi s’agit d’un cancer du sein, de l’ovaire et de l’estomac. En l’absence de diagnostic après une première ponction, il est utile de répéter une 2e ponction pleurale. Dans 20% des cas, on ne découvre pas l’étiologie de l’épanchement pleural malgré une investigation approfondie. Il est alors justifié de recourir à une évaluation par thoracoscopie. Pour les patients chez qui l’étiologie de l’épanchement pleural demeure indéterminée, il est important de les suivre régulièrement. Il s’agit souvent d’une néoplasie.

La thoracoscopie permet l’exploration complète de la cavité pleurale. Elle permet des  gestes diagnostics (biopsie) et thérapeutiques. Elle est indiquée dans l’investigation de l’épanchement pleural idiopathique. L’avantage de la thoracoscopie est de pouvoir réaliser dans un même temps un talcage pleural afin de diminuer les récidives d’épanchement néoplasique.

Décompte cellulaire

    • Traumatisme
    • Néoplasie

pH

Le pH normal est de 7.6. Si le pH < 7.3, on est possiblement en présence de:

Glucose

Si le glucose < 3.3 mmol/L, on est possiblement en présence de:

  • Pleurésie rhumatoïde
  • Pleurésie tuberculeuse
  • Épanchement parapneumonique
  • Empyème
  • Néoplasie

Amylase

Si l'amylase pleurale est supérieure à la limite supérieure de la valeur sérique normale

Aspect macroscopique

  • Purulent: Empyème
  • Laiteux
    • Chylothorax
    • Pseudochylothorax
  • Hémorragique
    • Hémothorax traumatique
    • Néoplasie
    • Exposition à l’amiante

Cytologie

Adénocarcinome en cytologie du liquide pleural

La cytologie du liquide pleural ramène un diagnostic de cancer dans 60%. Il s’agit le plus souvent d’un cancer du poumon, de métastases, mais il peut aussi s’agit d’une coinfection (pneumonie, pleurésie tuberculeuse, infection virale, infection parasitaire).

Pneumonie bactérienne

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Pneumonie sévère avec épanchement et consolidation

La pneumonie bactérienne se complique dans 40% des cas d’un épanchement pleural, dont 5-10% évolueront vers un empyème. Cela résulte d’une cascade inflammatoire où interviennent plusieurs cytokines de l’inflammation. Une ponction pleurale doit être effectuée lorsqu’il y a plus de 1 cm de liquide sur l'image radiologique faite en décubitus latéral.

Les épanchements parapneumoniques peuvent évoluer en trois phases :

  1. Exsudatif :
    • Épanchement parapneumonique non compliqué
    • Augmentation de la pression liquidienne interstitielle pulmonaire
    • Liquide stérile
    • Prédominance neutrophilique (> 90% des cellules du liquide)
  2. Fibropurulent
    • Épanchement parapneumonique compliqué; empyème
    • Invasion bactérienne dans l’espace pleural
    • Réaction inflammatoire favorisant la déposition de fibrine
    • Loculations (cloisonnement)
  3. Organisée: La plèvre pariétale et viscérale s’épaissit et il y a :
    • Formation d’une coque fibreuse
    • Diminution de l’expansion pulmonaire

On retrouve les mêmes bactéries que celles responsables de la pneumonie.

La persistance de fièvre et l’existence d’une douleur thoracique lors d’une pneumonie peuvent faire craindre une évolution vers un épanchement parapneumonique. Lorsque l’épanchement est infecté par des bactéries anaérobes, les symptômes s’installent de façon progressive.

L’analyse du liquide est l’élément principal afin de caractériser l’épanchement parapneumonique.

  • L’invasion bactérienne de l’espace pleural produit une acidose qui se note par :
    • pH < 7.2
    • Glucose < 2.2
  • La lyse des neutrophiles entraîne une augmentation des LDH
Classification des épanchements parapneumoniques
Anatomie de l’espace pleural Bactériologie Biochimie Pronostic Drainage
A0 : épanchement pleural parapneumonique non compliqué (< 10 mm en débubitus latéral) Bx : Inconnu

+

Cx : Inconnu

+

Très bon Non
A1 : épanchement pleural parapneumonique non compliqué

(> 10 mm et < ½ hémithorax)

B0 : Gram et culture –

+

Co : pH ≥ 7.2

Glucose ≥ 2.2

+

Modéré Non
A2 : épanchement pleural parapneumonique compliqué

EMPYÈME

(≥ ½ hémithorax)

Loculation ou épaississement de la plèvre pariétale

OU

B1 : gram et culture +

B2 : pus

OU

C2 : pH < 7.2

Glucose < 2.2

Modéré

Mauvais

Oui

Traitement

Drainage d'un épanchement pleural

Le traitement de l’épanchement pleural parapneumonique a trois objectifs :

  • Permettre une évacuation complète du pus
  • Traitement de l’infection
  • Favoriser la réexpansion pulmonaire afin de prévenir les séquelles respiratoires

L’épanchement parapneumonique non compliqué (A0 et A1) se résout normalement avec les antibiotiques pour le traitement de la pneumonie. L’épanchement pleural compliqué (A2) nécessite la mise en place d’un drain thoracique afin d’effectuer un drainage complet de l’espace pleural.

Une thoracoscopie est effectuée pour libérer l’espace pleural des possibles loculations. Une décortication est nécessaire lorsqu’il y a échec au traitement ou présence d’une coque fibreuse. Une stérilisation de la cavité pleurale est obtenue avec une antibiothérapie de 4 à 6 semaines.

Mésothéliome malin

Un spécimen de chrysotile
Microstructure de la chrysotile au microscope électronique. Ces fibres posent un danger pour la santé pulmonaire.

Le mésothéliome pleural malin est une tumeur agressive de l’adulte. L’exposition professionnelle aux fibres d’amiantes reste le facteur de risque principal. Parmi les métiers à risque l'on compte :

  • Mines d’amiante
  • Chantier naval
  • Bâtiment
  • Fabrication d’objets en amiante

Une exposition asbestosique est retrouvée dans 70% des cas. Le risque croit avec la durée d’exposition, mais une forte exposition sur quelques semaines peut être suffisante pour être cancérigène. Il existe un temps de latence d’environ 40 ans entre l’exposition et le développement du mésothéliome malin. La fibre d’amiante retrouvée au Québec est la chrysotile. Le tabac n’est pas un facteur de risque. Il existe une prédisposition familiale. 80% des patients sont des hommes, en raison de leur histoire professionnelle

Les patients se présentent avec dyspnée, douleur thoracique et des signes de l’état général. La dyspnée est multifactorielle :

  • Accumulation de liquide pleural
  • Épaississements pleuraux
  • Restriction thoracique

On peut palper des masses à l’hémithorax témoignant d’une progression au niveau de la paroi thoracique. Le mésothéliome malin tend davantage à progresser localement qu’à se propager à distance.

Diagnostic

La radiographie pulmonaire démontre un épanchement pleural lorsqu’on est en début de maladie. L’évolution se fait par la suite avec une perte de volume du poumon qui se retrouve comprimé par la plèvre atteinte. Un exsudat lymphocytaire séro-sanguinolant est ce qu’on retrouve lors de la ponction pleurale. La thoracoscopie est la meilleure méthode pour l’obtention d’un diagnostic définitif.

Il existe 3 types histologiques de mésothéliome :

  • Épithélial: meilleur pronostic
  • Sarcomatoïde: évolution rapide et défavorable
  • Mixte

Le pronostic est réservé : survie médiane de 12 mois. L’âge avancé, une maladie étendue et un mésothéliome de type sarcomatoïde sont des facteurs de mauvais pronostic.

Traitement

Malheureusement, le traitement demeure largement à visée palliative.

Pneumothorax

Page principale: Pneumothorax

Normalement, le poumon adhère à la paroi thoracique grâce à l’existence d’une pression négative entre les 2 feuillets de la plèvre. Lorsque cette pression est abolie par une infiltration d'air, on est en présence d'un pneumothorax. On dénombre différents types de pneumothorax :

  • Primaire
    • Survient sans évènement précipitant et en l’absence de maladie pulmonaire sous-jacente.
    • : tabagisme, sexe masculin, antécédents familiaux de pneumothorax primaire
    • Survient majoritairement dans la vingtaine
  • Secondaire: pneumothorax arrivant sans évènement précipitant, mais en présence d’une malade pulmonaire sous-jacente (MPOC, fibrose kystique, infection pulmonaire, cancer pulmonaire)
  • Traumatique
  • Iatrogénique: pneumothorax survenant suite à certaines procédures diagnostiques

Un pneumothorax peut être sous tension ou non, le premier type étant plus sérieux, car il y a compression des structures du médiastin et du poumon contra-latéral.

Présentation clinique

La présentation classique d'un pneumothorax est une douleur thoracique pleurétique d'apparition subite accompagnée d'une dyspnée. L'examen physique peut mettre en évidence une diminution des murmures vésiculaires et de l,amplitude thoracique. On peut également retrouver de l'emphysème sous-cutané

Les signes suivants se retrouvent dans un pneumothorax sous tension:

  • Tachycardie
  • Hypoxémie
  • Hypotension

Traitement

Appareil de drainage pleural

La prise en charge du pneumothorax a pour objectif de retirer l’air de l’espace pleural et de prévenir la récidive. En présence d’un pneumothorax primaire, la prévention de la récidive devrait être proposée après le 2e épisode de pneumothorax. En présence d’un pneumothorax secondaire, la prévention de la récidive devrait être offerte dès le 1e. La thoracoscopie avec pleurodèse mécanique est l’option de choix pour prévenir efficacement la récidive d’un pneumothorax.