Capsulite adhésive de l'épaule
La capsulite adhésive est une affection inflammatoire caractérisée par une raideur et une douleur à l'épaule. L'American Academy of Orthopedic Surgeons définit la capsulite adhésive comme « une condition de gravité variable caractérisée par le développement progressif d'une limitation globale du mouvement actif et passif de l'épaule en l'absence de résultats radiographiques autres que l'ostéopénie ».[1]
1 Épidémiologie[modifier | w]
La capsulite adhésive a une prévalence d'environ 2 à 5% dans la population générale. L'âge moyen d'apparition est généralement de 55 ans. Il y a une prédominance légèrement plus élevée chez les femmes (1,4: 1). Habituellement, la main non dominante est affectée. Il est intéressant de noter que plusieurs affections auto-immunes comorbides se sont avérées prédisposer les patients à cette affection, notamment les troubles thyroïdiens et le diabète. De plus, les patients atteints de diabète ont généralement de moins bons résultats de traitement en fonction de la durée de leur diabète.[2][1]
2 Étiologies[modifier | w]
L'étiologie de la capsulite adhésive demeure inconnue.
3 Physiopathologie[modifier | w]
La physiopathologie exacte est inconnue. L'hypothèse la plus communément admise stipule que l'inflammation se produit initialement dans la capsule articulaire et le liquide synovial (synovite). L'inflammation est suivie d'une fibrose réactive. En effet, les études histologiques démontrent un processus d'hyperplasie fibroblastique (prolifération locale élevée de fibroblastes) et une production excessive de collagène de type III.[3] Cette fibrose entraîne alors une contracture du complexe capsulo-ligamentaire gléno-huméral. L'inflammation initiale de la capsule entraîne de la douleur, et la fibrose capsulaire entraîne une diminution de l'amplitude des mouvements.[4]
4 Classification[modifier | w]
La capsulite adhésive peut être classée comme étant primaire ou secondaire.
La capsulite primaire a généralement un début insidieux et est idiopathique. Son diagnostic est donc établi par exclusion, lorsqu'il est impossible d'identifier une cause qui puisse justifier son apparition. La capsulite primaire est souvent associée à d'autres maladies telles que le diabète, la maladie thyroïdienne ou l'hypertriglycéridémie.
Une capsulite est dite secondaire lorsqu'il est possible d'identifier une cause qui en justifie son apparition. Elle suit généralement un traumatisme ou des blessures à l'épaule, incluant la tendinopathie de la coiffe des rotateurs, les fractures, les chirurgies ou l'immobilisation.
5 Stades d'évolution[modifier | w]
Les patients atteints de capsulite adhésive présentent généralement une aggravation progressive de la douleur à l'épaule au cours des semaines à des mois, suivie d'une limitation significative du mouvement de l'épaule. La progression de la maladie est décrite en 3 stades cliniques: [4]
- Stade 1: La phase douloureuse. Développement d'une douleur à l'épaule diffuse et invalidante qui est initialement pire la nuit mais évolue ensuite en douleur au repos. La douleur est associée à une rigidité croissante. Peut durer de deux à neuf mois.
- Stade 2: La phase gelée ou rétractile. Cette période est caractérisée par une limitation progressive de la mobilité articulaire dans tous les plans de l'épaule mais avec une douleur progressivement moins prononcée. Peut durer de quatre à douze mois.
- Stade 3: La phase de décongélation ou régressive. La phase de récupération où il y a un retour progressif de l'amplitude des mouvements. Il faut 12 à 24 mois pour le retour complet de la mobilité articulaire.[4]
6 Présentation clinique[modifier | w]
6.1 Facteurs de risque[modifier | w]
Les facteurs de risque sont: [3]
- l'âge entre 40-65 ans
- un antécédent de capsulite controlatérale
- le diabète sucré
- l'hypertriglycéridémie
- les maladies thyroïdiennes
- les AVC
- certains médicaments
- les traumatismes
- une chirurgie récente
- l'immobilisation
- les tendinopathies de la coiffe des rotateurs.
6.2 Questionnaire[modifier | w]
Dans une capsulite adhésive, l'apparition de la douleur est insidieuse et son intensité varie en fonction du stade clinique de la pathologie.
Stade 1
Phase douloureuse |
Stade 2
Phase rétractile |
Stade 3
Phase régressive | |
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Douleur |
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Facteurs exacerbants |
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Facteurs atténuants |
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6.3 Examen clinique[modifier | w]
Les particularités de l'examen varient également en fonction du stade clinique de la capsulite.
Stade 1
Phase douloureuse |
Stade 2
Phase rétractile |
Stade 3
Phase régressive | |
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Observation |
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Une dyskinésie scapulaire peut souvent être observée (perturbation du rythme scapulo-huméral). On retrouve classiquement les perturbations suivantes :
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Mouvements |
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Tests spécifiques |
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7 Examens paracliniques[modifier | w]
Aucun examen paraclinique n'est indiqué pour le diagnostic.
Laboratoires |
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Radiographie de l'épaule |
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Test d'injection | Le test d'injection peut être effectué en case de doute sur l'étiologie de la douleur à l'épaule sur la base des antécédents et de l'examen:
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8 Approche clinique[modifier | w]
8.1 En stade I de la capsulite[modifier | w]
La douleur limite souvent un examen complet et approfondi. Il est donc difficile, à ce stade-ci, de préciser le diagnostic et de distinguer, par exemple, une capsulite d'une tendinopathie aigüe de la coiffe des rotateurs. Le diagnostic demeure imprécis.
8.2 En stade II de la capsulite[modifier | w]
Dans la phase rétractile de la capsulite, contrairement à sa phase algique, la douleur est de moins en moins intense et adopte des caractéristiques qui permettent de mieux distinguer la capsulite de la tendinopathie aigüe de la coiffe des rotateurs.
Capsulite adhésive en phase rétractile | Tendinopathie aigüe de la coiffe des rotateurs |
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Douleur en fin d'amplitude
Absence d'arc douloureux |
Présence d'un arc douloureux |
Aucune douleur au retour du mouvement d'élévation de l'épaule | Présence de douleur au retour du mouvement d'élévation de l'épaule en raison de la contraction excentrique du/des tendons atteint |
Un gain d'amplitude en flexion de l'épaule ne peut être obtenu même si le patient dévie légèrement du plan de mouvement, car cette déviation du plan de mouvement ne permet pas de relâcher la tension sur la capsule | Si l'amplitude de mouvement en flexion active de l'épaule est diminuée, un gain d'amplitude peut être obtenu si le patient dévie légèrement du plan de mouvement (déviation d'environ 10 degrés vers l'extérieur), car cela permet de changer les zones de compression sur le/les tendons |
Les mouvements répétés en élévation de l'épaule diminuent la douleur et améliorent l'amplitude du mouvement (même principe que l'effet d'un exercice d'étirement) | Les mouvements répétés en élévation de l'épaule augmentent l'intensité de la douleur et peuvent en diminuer l'amplitude |
Le maintien de la position en élévation maximale de l'épaule permet de diminuer la douleur et d'augmenter l'amplitude de ce mouvement (même principe que l'effet d'un exercice d'étirement) | Difficulté à maintenir la position en élévation de l'épaule en raison d'une augmentation de la douleur |
Une perte d'amplitude articulaire active et passive dans deux plans de mouvement ou plus constitue la caractéristique cruciale pour le diagnostic de capsulite adhésive.[5][6][7][1] Toutefois, une épaule « raide » ne mène pas d'emblée à un diagnostic de capsulite adhésive.
Par exemple :
- Une ou plusieurs parties spécifiques de la capsule gléno-humérale peuvent ankyloser par fibrose suite à n'importe quelle blessure ou traumatisme de l'épaule, ou encore suite à une inactivité/immobilisation.
- Des raideurs musculaires peuvent également limiter la mobilité de l'épaule sans pour autant qu'il y ait présence d'une affection de la capsule.
Le patron capsulaire de l'épaule est donc important dans le diagnostic, tel que décrit dans la section de l'examen clinique. Ainsi, une perte de mobilité de l'épaule qui ne correspond pas au patron capsulaire ne peut pas être considérée comme une capsulite.
9 Diagnostic[modifier | w]
Le diagnostic de la capsulite adhésive est clinique et se fonde sur les antécédents, l'histoire et les résultats de l'examen physique.[8][4]
10 Diagnostic différentiel[modifier | w]
Les diagnostics différentiels sont :
- la tendinopathie de la coiffe des rotateurs
- la tendinopathie de la longue portion du biceps
- l'arthrose gléno-humérale
- la raideur post-traumatique (fibrose capsulaire suite à une fracture, une contusion, une luxation ou une chirurgie)
- la raideur post-immobilisation
- une fracture
- une radiculopathie cervicale
- une tumeur osseuse maligne
- une pseudopolyarthrite rhizomélique.
11 Traitement[modifier | w]
Le traitement est axé sur le soulagement des symptômes et l'amélioration de la mobilité articulaire.[9][10] Il existe peu d'études qui guident la gestion du traitement.
11.1 Traitement conservateur[modifier | w]
Intervention | Commentaires |
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Éducation du patient | L'éducation du patient fait partie des éléments essentiels dans le traitement de la capsulite. L'éducation du patient comprend les éléments suivants :
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physiothérapie | La physiothérapie a des preuves limitées à l'appui de ses bienfaits lorsqu'elle est utilisée seule. Toutefois, lorsqu'elle est combinée à une injection intra-articulaire de corticostéroïdes, les amplitudes articulaires et la fonction sont améliorés plus rapidement qu'avec l'injection seule. Les objectifs de la physiothérapie incluent :
Les interventions en physiothérapie doivent être adaptés selon le stade de la capsulite, car une réadaptation trop vigoureuse en stade I risque d'entraîner une aggravation des symptômes. |
Médication orale |
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injection intra-articulaire de corticostéroïdes |
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arthrographie distensive combinée à l'injection intra-articulaire de corticostéroïdes |
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11.2 Traitement chirurgical[modifier | w]
En règle générale, si les symptômes ne s'améliorent pas avec des mesures conservatrices dans les 10 à 12 mois, il est recommandé de consulter un chirurgien orthopédiste.[1]
Indications |
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Contre-indications |
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La manipulation de l'épaule sous anesthésie est une option thérapeutique réservée aux cas plus réfractaires qui ne répondent pas aux modalités mentionnées ci-dessus. Il existe un risque accru de fractures. Cette manoeuvre est donc contre-indiquée lorsqu'il y a ostéoporose.
La libération capsulaire chirurgicale de l'épaule est réservée aux cas réfractaires.
12 Complications[modifier | w]
Les complications sont [1]:
- la douleur chronique à l'épaule
- la raideur chronique à l'épaule
- la rupture du tendon du biceps
- la rupture du tendon du sous-scapulaire.
13 Évolution[modifier | w]
La capsulite adhésive évolue selon trois stades (voir la description dans la section des stades d'évolution). Ainsi, l'intensité de la douleur et la sévérité de l'invalitidé dépendent du stade de la pathologie. La capsulite adhésive est une maladie avec des taux élevés de récupération spontanée en 18 à 30 mois. Elle est donc une affection qui se limite d'elle-même et, si elle est diagnostiquée tôt, elle a un résultat favorable. Cependant, la physiothérapie doit être un élément clé du traitement pour obtenir des résultats satisfaisants.
Plusieurs études montrent que, à long terme, les patients continuent de ressentir de la douleur et / ou de la raideur après une prise en charge conservatrice. Une incapacité à long terme a été rapportée chez 10% à 20% des patients alors que des symptômes résiduels persistent chez 30% à 60% des patients.
14 Prévention[modifier | w]
Il est recommandé de poursuivre l'exercice pour éviter la réapparition des symptômes.[1]
15 Notes[modifier | w]
- ↑ Mouvement d'élévation de l'épaule initié par l'articulation scapulo-thoracique plutôt que par l'articulation gléno-humérale.
16 Références[modifier | w]
- Cette page a été modifiée ou créée le 2020/07/01 à partir de Adhesive Capsulitis (StatPearls / Adhesive Capsulitis (2019/12/16)), écrite par les contributeurs de StatPearls et partagée sous la licence CC-BY 4.0 international (jusqu'au 2022-12-08). Le contenu original est disponible à https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30422550 (livre).
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