ULaval:MED-1222/Maladies de la coagulation sanguine

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Ce guide d’étude a été élaboré par les volontaires de Wikimedica dans le cadre du cours MED-1222 à l'Université Laval et est basé sur le travail des responsables du cours. Il est fourni comme aide à l'étude et ne constitue pas un document officiel du cours.

Déficits héréditaires de la coagulation

Pathogénie

  • Diminution synthèse des facteurs de coagulation
  • Destruction périphérique excessive (spoliation, consommation intravasculaire)
  • Inhibiteur anormal de la coagulation

Déficits héréditaires

Mx héréditaires : déficit de la synthèse d’un facteur de la coagulation

  • La plupart du temps, déficit d’un seul facteur (contrairement aux mx acquises)

2 mécanismes

  • Déficit qté : molécules normales mais synthèse diminuée, donc Ag du facteur et activité biologique sont les deux diminuées
  • Déficit qlé : nombre normal de molécules anormales, donc Ag normal mais activité diminuée

⇒ En pratique, sauf pour vW, on mesure seulement l’activité biologique parce que le mécanisme ne change pas le tableau clinique (qui est du à la ↓ de l’activité biologique)

Sévérité variable

  • Corrélation générale entre la sévérité du déficit et la gravité hémorragique SAUF POUR
    • Déficit XII : TCA très allongé mais sans syndrome hémorragique clinique
    • Déficit XI : allongement des test, mais sx très variables selon les individus

Déficit héréditaire pour les 10 facteurs, mais fréquence variable

Hémophilie A

Diminution de la synthèse du VIII, déficit de la voie intrinsèque de la coagulation

Mode de transmission

Récessif, lié au sexe → seulement les garçons sont affectés, transmission par les femmes

Porteuse de l’hémophilie

Un hémophile ne transmet pas à ses garçons, mais toutes ses filles sont porteuses

Être porteuse implique

  • Risque potentiel de saignement
    • Peuvent avoir des manifestations selon le taux de VIII
  • Possibilité de transmission à ses descendant
Anomalie moléculaire

Anomalie sur le chromosome X

Soit une absence de synthèse, soit une molécule anormale

Manifestations cliniques

Trois formes : sévère, modérée, légère

Importance des manifestations en relation avec le taux de VIII

Sévère

  • VIII : 0-0.01
  • Manifestations hémorragiques dès l’enfance, spontanées

Modérée

  • VIII : 0.01-0.05
  • Manifestations hémorragiques après un traumatisme, parfois spontanées

Légère

  • VIII : 0.05-0.25
  • Manifestations hémorragiques après un traumatisme ou lésions locales
Sévère (VIII : 0-0.01) Modérée (VIII : 0.01-0.05) à légère (0.05-0.25)
Manifestations en bas âge, à la circoncision ou aux premiers pas

Hémarthroses, hémorragies intramusculaires → peuvent amener des complications locomoteurs importantes si non traitées

Hématurie et hémorragie rétropéritonéale spontanées possibles

  • Hémorragie rétropéritonéale peut mimer une appendicite

Complication caractéristique : hématome profond, volumineux, qq h après un déclencheur

  • Danger par compression de structure

Prise en charge par des équipes multi parce que répercussions socio-économiques et psychologiques importantes

Chez l’enfant très jeune, prévenir les traumas majeurs (surtout cérébraux), ensuite encourager les sports sans contact physiques

Éducation très importante (minimiser le plus possible l’absentéisme par saignement), choisir une profession adaptée

Hygiène dentaire préventive très importante

Hémorragie spontanées bcp plus rares
  • Si lésion locale (ulcère peptique, autres)
  • Mx ↓ hémostase
  • Rx ↓ hémostase (aspirine)

Sinon, saignement dans les chx ou les traumas

Examen de laboratoire

TS : N

INR : N

Temps de thrombine : N

TCA : ↑

Activité coagulante VIII : ↓

Principes de traitement

Deux composantes

  • Tx des saignements aigus
    • Principes : être précoce, viser l’atteinte de niveaux de VIII adéquats p/r à la sévérité du saignement, avoir un tx approprié de la cause (lésion/trauma)
    • Hémorragie légère : amener VIII >0.4
    • Si chx majeure, saignement dans zone à risque, trauma : amener VIII>0.8-1.0
    • Hémophilie légère : DDAVP (desmopressine) pour ↑ temporairement le VIII endogène
    • Modéré-sévère : concentrés de VIII, à partir de plasma humain ou synthétique → répéter q 12-24 h selon la sévérité parce que λ de 8-12 h
    • Tx local
      • Immobilisation du membre
      • Prévention de nouveaux traum et de l’ankylose (physio progressive, attelle de protection articulaire temporaire, réduction des manoeuvres chx dans une plaie)
      • Tx hémostatiques locaux : gel absorbable, rince-bouche avec antifibrinolytique
      • Tx de la dlr : éviter aspirine et AINS, éviter injection IM
  • Prévention des saignements (chez sévère)
    • Quand les hémarthroses se produisent à répétition, l’articulation devient plus vulnérable et les dommages ↑ (destruction progressive de l’articulation)
    • Administration préventive de VIII pour prévenir les saignements pour avoir des taux de VIII comparable à mx modérée/légère (donc pas de saignements spontanés)
    • Concentrés lyophilisés pour administration à domicile
    • Commencer vers 2-3 ans, 1-3X semaine
Complications

Arthropathie → morbidité à long terme

  • Prophylaxie tôt dans l’enfance permet de ↓ les saignements et ↓ les arthropathies
  • 10-25% des hémophiles A développent éventuellement des inhibiteurs contre le facteur VIII → très grave comme complication parce que les concentrés de facteurs VIII ne sont plus efficaces

Pour information seulement, si bien contrôlée, espérance de vie semblable à la moyenne générale; causes de décès : saignement intracrânien, insuffisance hépatique

Hémophilie B

Déficit du facteur IX

Comme l’hémophilie A, sauf pour le tx (DDVAP inefficace) et moins de probabilité de développer un inhibiteur moindre

Maladies acquises de la coagulation

Plus fréquentes que les déficits héréditaires

Habituellement, déficit simultané de plusieurs facteurs de coagulation

Mécanismes

  • Déficit qté ou qlé de production
  • Destruction ↑ des facteurs dans le sang
  • Présence d’un inhibiteur anormal de la coagulation

⇒ Combinaison de plusieurs mécanismes

Carence en vitamine K

Nécessaire pour la synthèse de II, VII, IX, et X → si absente, pas de carboxylation donc non fonctionnelle

Liposoluble

Sources

Alimentation → légumes vert foncé

Synthèse par la flore intestinale (surtout chez nné et jeûne)

Réserves

Hépatiques

Durent 7-20 jours si arrêt de consommation

Hypovitaminose K chez l’adulte

Causes
  • Malabsorption des graisses (obstruction voies biliaires, stéatorrhée)
  • Jeûne de 7-20 jours
  • Pire si atb : stérilisation de la flore, entrave à l’absorption ou utilisation de la Vit K au foie
  • Salicylate : action antagoniste de la Vit K au foie donc ↑ impact du jeûne et des atb
Laboratoire
  • TT N
  • NIR et TCA ↑
  • ↓ VII, IX, X, II → diminution dans l’ordre à cause de la λ
Traitement
  • Corriger la cause de carence
  • 5-10 mg de Vit K PO, répéter selon l‘évolution → si urgence, IV mais lentement
  • Plasma ou concentrés de facteur si hémorragie sévère et besoin de correction rapide

Maladie hémorragique du nouveau-né

Hypovitaminose K peut donner un syndrome hémorragique néonatal

Plus fréquent chez les prématurés mais possibles chez ceux nés à terme

À la naissance, les réserves sont plus faibles, parfois très faibles, le foie peut être immature et la flore intestinale est absente donc déficit des facteurs

S’accentue dans les 1er jours de vie

Si mère a reçu certains rx en fin de grossesse (comme anticonvulsivant), plus de chance d’avoir une carence

⇒ Très rare aujourd’hui parce que tous les nnés reçoivent de la Vit K à la naissance

Maladies hépatiques

Parenchyme hépatique : synthétise la majeure partie des facteurs (sauf VIII)

Donc si mx hépatique sévère, déficit de la synthès de ces facteurs

  • En premier, II, VII, IX, X
  • Si sévère, en plus atteinte du V
  • Si très sévère, atteinte du fibrinogène (et dysfibrinogénémie possible)

Si pt ictérique avec INR ↑ et cause de l’ictère incertaine, donner Vit K → si obstruction biliaire, insuffisance de Vit K donc l’INR va se normaliser avec la Vit K et les facteurs II, VII, IX et X vont se corriger

Possible diminution de l’antithrombine et de l’antiplasmine plasmatique

Aussi, autres anomalies de l’hémostase possibles

  • Thrombocytopénie si HTP
  • CIVD si lésion parenchymateuse en évolution avec nécrose

Manifestations hémorragiques

Plus svt, léger ou modéré (peut être absent)

Saignements graves plus si lésion locale (varices oesophagiennes, ulcère), chx ou trauma OU si les déficit de synthèse sont associés à d’autres anomalies de l’hémostase

Destruction périphérique excessive

Spoliation sanguine

Hémorragie massive demandant >12-15 transfusions/24h

Par déficit de VIII et V parce que le sang est généralement conservé >24h dans la banque de sang donc ↓ des facteurs

Coagulation intravasculaire disséminée (CIVD)

Aussi appelée coagulopathie de consommation

Normalement, le corps limite les réactions hémostatiques au lieu de l’hémorragie avec des mécanismes anticoagulants

Dans la CIVD, les mécanismes anticoagulants sont débordés et les réactions hémostatiques s’étendent → production excessive de thrombine, apparition de plusieurs thrombi dans la micro circulation puis thrombopénie et ↓ de plusieurs facteurs par consommation excessive ⇒ donc syndrome hémorragique

Physiopathologie
  • Activation intravasculaire disséminée d’hémostase
  • Débordement des mécanisme physiologiques d’inhibition de la coagulation intravasculaire
  • Activation 2nd fibrinolyse pour lyser les thrombis mais qui aggrave la coagulopathie

Activation des réactions de l’hémostase : généralement par libération/expression du FT

  • Passage dans le sang de thromboplastines tissulaires
  • Lésions endothéliales extensives
  • Expression du FT par des neutrophiles ou monocytes activés → en réponse à une endotoxine ou à des cytokines inflammatoires
Étiologie
  • Passage de thromboplastine dans le sang
    • Obstétrique : embolie de liquide amniotique, décollement prématuré placenta, rétention prolongé d’un foetus mort
    • Ischémie et nécrose
    • Néoplasie métastatique et leucémie aiguë
    • Hémolyse intravasculaire aiguë
  • Atteinte étendue endothélium
    • Lésions tissulaires étendues : trauma, chx, brûlures
    • Endotoxémie (par activation de l’endothélium)
    • Certaines virémies et rickettsioses
    • Coups de chaleur, brûlures étendues
    • Micro-angéites diffuses
  • Expression du FT par cellules activées
    • Endotoxémies
    • Sepsis et SRIS (syndrome de réponse inflammatoire systémique) (peu importe la cause)
Symptomatologie → Très variable
  • Asx avec tests anormaux
    • Svt pour les formes légères ou subaiguës ou chroniques
  • Hémorragies
    • Variable selon le contexte
  • Lésions viscérales
    • Par les microthrombi dans les artérioles/capillaires/veinules
    • Ischémie et lésions organiques multifocales
    • Éventuellement, insuffisance fonctionnelle
    • Rein, cerveau, coeur, foie
  • Anémie hémolytique
    • Par hémolyse des GR au passage des vaisseaux pathologiques
    • Fragmentation des GR → schistocytes
  • Choc
    • Difficile de préciser si 2nd à la cause ou à la coagulopathie
Diagnostic
  • Thrombopénie ± importante
  • ↓ facteurs : surtout fibrinogène, prothrombine, V, VIII
  • D-dimères
  • Aux tests de dépistage : ↑ INR, ↑ TCA, ↑ TT
Traitement
  • Traiter la cause
  • Traiter l’insuffisance circulatoire
  • Restaurer les taux de plaquettes et de facteurs de coagulation si hémorragies
  • Selon les cas, anticoagulant ou antiplaquettaires possible (si thrombose significative)

Inhibiteur anormal

Présence d’Ac qui détruisent un facteur

Exemple : auto-Ac contre le VIII

  • Post-partum
  • Association avec mx auto-immune
  • Syndrome lymphoprolifératif
  • Gens âgés

Manifestations hémorragiques sévères (saignements profonds, saignements dans les tissus mous)

Complication grave mais rare

Combinaison

Des mécanismes peuvent se combiner pour causer une coagulopathie plus grave : insuffisance de coagulation+hémostase primaire

Par exemple, mx hépatique

  • Déficit de synthèse hépatique
  • Destruction excessive des facteurs par CIVD
  • Thrombocytopénie par HTP ou alcoolisme
  • Fragilité vasculaire par atrophie des téguments
  • Fibrinolyse excessive

Diagnostic pratique

Démarche clinique

Histoire minutieuse

  1. Type d’hémorragie (pétéchies, hématome)
  2. Apparition (spontané ou provoqué)
  3. Fréquence, gravité et moment d’apparition
  4. Diathèse hémorragique familiale (et essayer de trouver le type de transmission)
  5. Médicaments causant déficit de l’hémostase
  6. Causes locales, régionales, systémiques

E/P complet

Dépistage d’anomalies de l’hémostase

Certains tests spéciaux complémentaires

Chercher à répondre à 5 questions

  1. Présence ou absence de maladie de l’hémostase
    1. Saignements à de multiples endroits, surtout si simultané
    2. Hémorragies spontanées
    3. Pétéchies, hématomes, ecchymoses importantes, hémarthrose
    4. Épistaxis, ménorragies et saignement GI : plus souvent par causes locales
  2. Héréditaire ou acquis
    1. Héréditaire grave : consultation pendant l’enfance, diathèse familiale +, hx montre des saignements excessifs dans les chx ou trauma, ou saignements spontanés
    2. Héréditaire légère ou modérée : pas de stress hémostase antérieur avant la première chx (amygdalectomie) qui amène saignement excessif
    3. Hx familiale et mode de transmission
      1. Récessif lié au X
      2. Autosomal dominant
      3. Autosomal récessif
      4. Chercher consanguinité
      5. Attention : hx - ne veut pas dire qu’il n’y a pas de mx héréditaire (ex, un garçon qui a seulement des soeurs ou des cousines)
    4. Capacité de l’hémostase dans les traumatismes
      1. Est-ce que le saignement dans les trauma passés était disproportionné
      2. Si chx ou amygdalectomie sans hémorragie excessive, probablement pas héréditaire (même léger ou modéré)
    5. Acquis : généralement manifestations à l’âge adulte, avec mx sous-jacente évidente
      1. En faveur : saignements généralisés, pas d’hx familiale, pas de saignements excessifs dans les trauma/chx antérieurs, début à l’âge adulte, association avec mx
  3. Déficit hémostase primaire ou déficit de la coagulation
    1. Primaire
      1. Hémorragies spontanées (peau, muqueuses), pétéchies, ecchymoses superficielles
      2. Saignement au début de la blessure, peut continuer sans interruption
      3. Quand le saignement est arrêté, il ne reprend pas
    2. Déficit coagulation
      1. Hématomes profonds, volumineux, hémarthroses, hématurie, hémorragies rétropéritonéales
      2. Hémorragies post trauma différées qui peut récidiver dans les 4-6 jours
  4. Gravité de la maladie
    1. Fréquence, importance, spontanéité des saignements
    2. E/P
      1. Nb de pétéchies, présences de lésions purpuriques, nb/importance des ecchymoses
      2. Localisation des lésions
        1. Pétéchies : plus dans les régions avec capillaires qui ont une P hydrostatique ↑ (MI, palais mou) → donc au tronc ou à la tête signe de gravité
        2. Hémorragies aux muqueuses buccales, conjonctivale ou GI et à la rétine
    3. Laboratoire
      1. Hémostase primaire
        1. TS ↑ et coagulation peu perturbée
        2. Thrombopénie
        3. Bilan normal
      2. Coagulation : ↑ INR, ↑ TCA, ↑ TT
        1. INR : facteurs VII, X, V, prothrombine, fibrinogène
        2. TCA ↑ : XII, XI, IX, VIII, X, V, prothrombine, fibrinogène
        3. TT ↑ : anomalie fibrinogène (qlé/qté)
        4. INR ↑ et TT N
          1. TCA N : VII
          2. TCA aN : soit atteinte du V, X, II, soit atteinte de plusieurs facteurs dans les 2 voies (en pratique, INR plus sensible que TCA aux variations des facteurs communs et sera plus allongé en proportion)
        5. TT ↑ et autres tests aN : anomalie du fibrinogène
        6. TCA ↑ et INR N
          1. Déficit précoce voie intrinsèque : VIII, IX, XI, XII
          2. Présence d’héparine → alors, TT ↑
          3. Inhibiteur dirigé : contre facteur (alors, ↑ TCA reflet de la ↓ du facteur) ou contre phospholipides
  5. Nature du déficit et importance qté → par laboratoire

Effets des Ac antiphospholipides sur les tests de coagulation

  • Généralement, TCA ↑ mais INR N parce que plus de phospholipides dans le temps de Quick donc ils ne sont pas tous inhibés
  • Certains hôpitaux utilisent un TCA qui ne réagit pas aux antiphospholipides pour éviter un dépistage chez qqn dont les Ac ne causent pas de problème
  • Si TCA ↑ et sensible à Ac antiphospholipides → faire la dirréfence entre un déficit en facteur de la voie intrinsèque et Ac antiphospholipides
    • 1:1 plasma normal et plasma du pt
      • Si TCA N, déficit en facteur
      • Si TCA reste long, Ac antiphospholipide
  • Présentation clinique : thrombose, TEV, avortements répétés, pré-éclampsie