Traumatisme laryngotrachéal
Classe de maladie | |||
Anatomie du larynx | |||
Caractéristiques | |||
---|---|---|---|
Signes | Hématome, Apnée, Stridor, Choc cardiogénique, Choc obstructif, Tachypnée , Dysphonie, Déviation trachéale, Bradypnée, Emphysème sous-cutané, ... [+] | ||
Symptômes |
Dysphagie, Dyspnée , Odynophagie, Dysphonie, Toux , Hémoptysies , Douleur au cou , Traumatisme cervical | ||
Étiologies |
Intubation endotrachéale, Inhalation de fumée, Aspiration de corps étrangers, Inhalation de gaz, Inhalation de vapeur, Traumatisme laryngotrachéal contondant, Traumatisme laryngotrachéal pénétrant, Cricothyroïdotomie | ||
Informations | |||
Terme anglais | Tracheal trauma, Laryngeal trauma, Laryngotracheal trauma | ||
Autres noms | Traumatisme trachéal, Traumatisme de la trachée | ||
Spécialités | ORL, Chirurgie vasculaire, Chirurgie thoracique, Médecine d'urgence, Anesthésie | ||
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Le traumatisme laryngotrachéal est un traumatisme qui atteint le larynx et la trachée.
Épidémiologie
Le traumatisme laryngotrachéal est une entité rare avec une incidence de 1 visite sur 250 000 à l'urgence et présente chez 1 patient sur 445 patients admis avec blessure de la tête et du cou.[1][2]
Les hommes (87%) seraient plus fréquemment atteints que les femmes[3]. L'âge médian est de 34,5 ans[3]. Le mécanisme lésionnel est contondant dans 81% des cas, et pénétrant dans le restant des cas. [3]
Il est estimé qu'environ 30-80% des patients avec lésions trachéales vont mourir avant même d'arriver à l'hôpital, d'où une estimation difficile de la réelle incidence de ce type de lésions. Néanmoins, elles comptent environ pour environ 1% des traumatismes. [4][5][6]
Environ les deux tiers des lésions des voies respiratoires supérieures impliquent la trachée au niveau cervical, tandis que le tiers restant sont des lésions laryngées. Le cartilage thyroïdien est la structure la plus fréquemment fracturée. En cas de traumatisme contondant, l'atteinte trachéale se produit dans 80% des cas en distal du cartilage cricoïde et à moins de 3 cm de la carène. [7][4]
Étiologies
Les étiologies des blessures trachéales traumatiques peuvent être classifiées :
- selon leur temporalité (aigues ou chroniques)
- selon le mécanisme lésionnel (contondant ou pénétrant).
Les lésions chroniques/iatrogéniques ne seront pas traitées dans le présent article.
Temporalité | Étiologies |
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Aigu |
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Chronique
(iatrogénique) |
Physiopathologie
Il existe principalement trois mécanismes de lésions laryngotrachéales.
- Les traumatismes laryngotrachéaux contondant ou par strangulation peuvent causer des fractures des cartilages laryngés, la dislocation des cartilages arythénoïdes, des hématomes des cordes vocales, ainsi que des lésions aux muqueuses (pétéchies, hématomes, lacérations). Un écrasement et une perte de la fonction de support des anneaux cartilagineux trachéaux peuvent résulter de ces différents traumatismes. [7][6]
- Les blessures par forces de cisaillement (blessure par flexion / extension) peuvent quant à elle causer déchirures trachéales ou une séparation laryngotrachéale. Cette déchirure est le plus souvent partielle et transverse, mais elle est parfois sagittale et peut s'étaler à une ou aux deux bronches souches. Le mécanisme impliqué en est un d'accélération ou de décélération dans la majorité des cas. Ce type de blessures a tendance à survenir au niveau de la trachée inférieure, près de la carène en raison d'une plus grande fixation des structures carénaires au sein de la cavité thoracique. Dans ce contexte, le parenchyme pulmonaire est souvent atteint de contusions ou de lacérations. [9]
- Les blessures par écrasement thoracique peuvent provoquer des déchirures trachéales et bronchiques, souvent dues à la compression des structures entre le manubrium, ou le sternum, et la colonne vertébrale. Néanmoins, la cage thoracique possède tout de même un rôle de protection important pour la trachée inférieure, le médiastin et les poumons en contexte de traumatisme. [7][9]
- Les blessures pénétrantes par un projectile d'arme à feu ou une arme blanche ont un mécanisme physiopathologique évident.
Présentation clinique
Questionnaire
Les traumatismes laryngotrachéaux sont associés à des mécanismes lésionnels traumatiques importants. La prise en charge clinique de ces blessures est donc difficile puisque les patients se présentent souvent avec de multiples blessures, une instabilité hémodynamique, ainsi qu'un compromis des voies respiratoires secondaire au traumatisme trachéal. Le clinicien se retrouve également parfois à devoir composer avec l'absence d'histoire ou une histoire rapportée par des témoins.
Les symptômes à rechercher à l'histoire sont[7][10][6]:
- le type de mécanisme traumatique (contondant ou pénétrant) et la description du mécanisme (l'arme/objet contondant impliqué, l'angle de pénétration, la vélocité)
- la dysphonie, l'odynophagie et la dysphagie
- la douleur cervicale antérieure
- la dyspnée, les hémoptysies[note 1] et la toux.
Examen clinique
Dans bien des cas, l'examen physique sera constituée de l'ABCDE selon les principes de l'ATLS: [7][10]
- S'il y a une atteinte des voies respiratoires dans un contexte de traumatisme laryngotrachéal, une intubation endotrachéal doit être rapidement envisagée pour protéger les voies respiratoires. Un compromis des voies respiratoires peut se développer en quelques minutes.l'examen des voies respiratoires (airway) afin d'évaluer la perméabilité des voies respiratoires du patient et d'immobiliser la colonne cervicale si ce n'est pas déjà effectué :
- le stridor, les autres formes de respiration bruyante et la dysphonie
- les lésions buccales et les hémoptysies
- la déformation de la région cervicale antérieure ou de la paroi thoracique pouvant entraver le passage de l'air
- l'emphysème sous-cutané au niveau facial cervical ou thoracique
- l'hématome cervical pouvant entraîner une compression des voies respiratoires (peut témoigner d'une lésion des gros vaisseaux)
- Si on suspecte un traumatisme laryngotrachéal significatif, il faut impérativement rechercher d'autres lésions traumatiques associées (pneumothorax, hémothorax, contusion thoracique, volet thoracique, fracture vertébrale, fracture costale, hémorragie intracrânienne, etc.).l'examen pulmonaire (breathing) :
- la désaturation et la cyanose
- l'apnée, la bradypnée ou la tachypnée
- l'asymétrie du murmure vésiculaire
- le volet costal
- l'examen cardiovasculaire (circulation) à la recherche de signes de choc hémorragique, cardiogénique ou obstructif
- l'examen neurologique
- l'exposition (exposure), en exposant toutes les autres parties du corps à la recherche d'autres lésions. [11]
L'examen cervical est particulièrement important.
- Des souffles carotidiens peuvent orienter vers une atteinte de l'artère carotidienne.
- Une palpation attentive à la recherche de déformation des cartilages laryngés ou trachéaux, une déviation trachéale ou encore d'emphysème sous-cutané sont d'autant plus de signes pouvant faire suspecter une blessure laryngotrachéale.
- En cas de traumatisme pénétrant, une attention particulière doit être portée à l'angle de pénétration, à la profondeur de la lésion, à la propreté de la plaie et aux structures susceptibles d'être endommagées et à la présence de bulles au site d'entrée.
La présence de fractures faciales, d'un volet thoracique, d'une instabilité sternale sont autant de signes pouvant laisser suspecter un mécanisme lésionnel particulièrement violent et une étendue plus importante des dommages non apparents.
Examens paracliniques
La sélection des examens dépendra du contexte clinique, de la disponibilité rapide des investigations et des blessures associées qui sont suspectées. Au final, le recours précoce à des chirurgiens ORL, thoracique et vasculaires est souvent indiqué et permet d'améliorer la sélection des tests en vue d'une intervention chirurgicale [6].
Les investigations suivantes sont souvent indiquées chez les patients avec suspicion d'atteinte laryngotrachéale traumatique.
Examen paraclinique | Indication | Commentaire |
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Nasolaryngoscopie flexible/Laryngoscopie conventionnelle |
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TDM cervicale C+, Angio-TDM thoracique et Angio-TDM cervicale |
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Radiographie cervicale et pulmonaire |
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Approche clinique
Il est à noter que le clinicien devrait d'emblée suspecter des lésions aux structures anatomiques adjacentes selon le mécanisme lésionnel rencontré.
- En contexte de lésion pénétrante, la mort découle le plus souvent des lésions vasculaires, bien que l'intubation difficile soit aussi une cause de mortalité importante chez ces patients. Globalement, ces patients ont un meilleur pronostic que ceux atteints de traumatismes contondants puisque l'étendue des blessures est souvent moins grande. [7][9]
- En contexte de lésion contondante à l'arbre trachéobronchique, une lésion bronchique est à éliminer. Les forces de cisaillements pouvant perturber les bronches qui sont relativement fixes au sein du parenchyme pulmonaire et au niveau du hile. [12][7]
Une lésion de l'arbre trachéobronchique représente en soi une urgence médicale. Cependant, les signes et symptômes suivants sont particulièrement préoccupants :
- la cyanose
- le stridor
- la désaturation
- les hémoptysies massives, soient des hémoptysies de 150 - 200 mL/24h, ce qui représente un risque de mortalité accru. [13]
Chez le nourrisson le larynx est situé plus haut, environ au niveau de C3 et descendra au cours des 3 premières années de vie pour atteindre le niveau C5. Un traumatisme trachéal risque donc moins de léser le cartilage thyroïdien. En contrepartie, l'orifice laryngé est de plus petit diamètre et la muqueuse est moins adhérente aux structures de soutien. Le risque d'hématome et d'obstruction des voies respiratoires menaçant la vie est donc plus élevé. [10]
Classification des traumatismes
Classifications de Schaefer-Fuhrman
Classe | Critères |
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Classe 1 |
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Classe 2 |
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Classe 3 |
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Classe 4 | Classe 3 sévère avec au moins 1 des suivants :
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Classe 5 |
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Classification de Lee-Eliashar
Type | Degré | Symptômes | Signes (en ordre d'incidence) |
---|---|---|---|
1 | Léger | Changements mineurs de la voix, dyspnée légère, toux. | Hématome mineur, petite lacération, absence de fracture ou de lacération. |
2 | Modéré | Compromis des voies respiratoires, hémoptysies. | Hématome obstructif, oedème, avusion mucosale mineure, fracture(s) non déplacée(s). |
3 | Sévère | Compromis sévère des voies respiratoires, stridor. | Oedème ou hématome massifs, déchirure mucosale profonde, exposition cartilagineuse, aspiration, fracture(s) déplacée(s), immobilisation unilatérale d'une corde vocale. |
4 | Profonde | Obstruction des voies respiratoires imminente | Oedème massif, avulsion mucosale, fragments cartilagineux, aspiration, déplacement des arythénoïdes, immobilité bilatérale des cordes vocales. |
5 | Critique | Obstruction complète des voies respiratoires | Effondrement des structures de support, séparation laryngotrachéale complète. |
Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel des traumatismes laryngotrachéaux comprend les pathologies pouvant entraîner une obstruction des voies respiratoires, un emphysème sous-cutané aiguë ou des hémoptysies :
- le pneumothorax et le pneumothorax sous tension
- les lésions trachéobronchiques
- la perforation oesophagienne
- le pneumomédiastin
- les hémoptysie massive d'origine pulmonaire (selon l'étiologie secondaire)
- l'inhalation d'un corps étranger
- le bouchon de mucus
- toute cause d'altération de l'état de conscience
- la réaction anaphylactique.
Traitement
La prise en charge commence par la sécurisation des voies respiratoires et de la colonne cervicale. Les premières étapes sont donc dirigées vers l'ABCDE tel qu'enseigné dans l'ATLS. Rapidement, un collier cervical doit être installé chez une grande majorité des patients et la perméabilité des voies respiratoires (VR) doit être évaluée. Au moindre doute, les voies respiratoires devront être protégées en raison de l'oedème progressif associé aux lésions laryngotrachéales. [5][7]
De façon simultanée et selon les protocoles de traumatologie en place, les premières étapes sont [7]:
- l'aspiration des sécrétions
- l'installation de voies veineuses de gros calibre
- une réplétion volémique adéquate
- une oxygénothérapie.
Jusqu'à 25% des patients présentant un traumatisme laryngotrachéal aigu nécessitant une intervention chirurgicale ne présentent aucun signe physique de la lésion lors de la présentation initiale, et les signes peuvent être retardés de 24 à 48 heures. Un indice de suspicion élevé est donc nécessaire pour éviter de manquer une blessure occulte. Les retards diagnostiques et thérapeutiques sont associés à un moins bon pronostic. [15][7]
Prise en charge des voies respiratoires
La position de décubitus dorsal est à éviter lorsque possible puisqu'elle augmente le risque de collapsus des VR en cas d'écrasement des structures de support laryngé et trachéal. Temporairement, une oxygénothérapie nasale à haut débit peut être utilisée. Les méthodes d'oxygénation accompagnées d'une ventilation à pression positive doivent être utilisées avec précaution chez les patients chez qui on suspecte une lacération trachéale ou une séparation trachéobronchique puisque cette pression pourrait entrainer ou augmenter la présence d'emphysème sous-cutanée et compliquer la prise en charge des VR. L'utilisation de la pression positive pourrait également aggraver un pneumomédiastin pouvant mener à un collapsus cardiovasculaire. [10]
Stabilité | Explications |
---|---|
Voies respiratoires stables |
|
Voies respiratoires instables (stridor, détresse respiratoire) | La ventilation au masque est à éviter puisqu'elle risque d'augmenter l'emphysème sous-cutané et d'ainsi compliquer la prise en charge.
|
Dans les cas d'inhalation d'agents caustiques ou de brûlure, il faut sécuriser les voies respiratoires en raison de l'oedème important pouvant parfois menacer la perméabilité des VR. [7]
Prise en charge générale
Les éléments qui influencent le type prise en charge sont[10]:
- l'intégrité et stabilité de l'os hyoïde et des structures laryngées
- l'état des muqueuses pharyngées et laryngées
- l'état de la jonction laryngotrachéale
- l'état de l'appareil vibratoire de la phonation (arythénoïdes, cordes vocales, commissure antérieure)
- l'état de la jonction laryngotrachéale
- l'état de l'oesophage cervical.
De cette façon, plus de 37 % des patients n'ont pas à subir de chirurgies, et environ 15% additionnels ne nécessitent qu'une trachéotomie. [10]
Stratégie de prise en charge | Explications | |
---|---|---|
Prise en charge générale pour tous les patients |
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Prise en charge chirurgicale | Principes généraux |
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Par voie ouverte |
| |
Par voie endoscopique |
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Suivi
Dans certains cas, notamment en contexte de réparation d'une transection laryngotrachéale, le cou peut être fixé en flexion pour une durée de 1-2 semaines de façon à réduire la traction. Les soins usuels de trachéotomie doivent être prodigués avec une attention particulière aux mouvements de traction. Si mis en place, les stents sont retirés au maximum 10 à 14 jours plus tard afin de diminuer le risque de sténose chronique. Une évaluation endoscopique sériée avec retrait du tissu de granulation et injection de corticostéroïdes en intra-lésionnel sont aussi bénéfiques pour réduire les risques de sténose. [7][6][10]
Un suivi par le chirurgien traitant est ensuite requis pour une période d'au moins 12 mois. [10]
Complications
Phase aiguë
Les complications à redouter sont :
- à la présentation initiale [6][10][17]:
- en phase subaiguë/chronique [7][10][21]:
- la pneumonie d'aspiration et la pneumonie acquise sous ventilation
- la fistule trachéo-oesophagienne
- la sténose trachéale chronique (particulièrement si traitement retardé de > 24h) entraînant une gène respiratoire et une dyspnée de degré variable
- la paralysie de la corde vocale ipsilatérale entraînant de la dysphonie, de la dysphagie et l'augmentation du risque d'aspiration.
Notes
- ↑ Allant de simples crachats teintés de sang à des hémoptysies franches et parfois massives.
- ↑ Contrairement à la majorité des autres conditions médicales pour lesquelles une l'intubation endotrachéale est la méthode de choix
- ↑ Le plus souvent secondaire à un hématome ou à l'oedème, mais parfois directement en lien avec la destruction des tissus de support des VR.
Références
- Cette page a été modifiée ou créée le 2020/11/07 à partir de Tracheal Trauma (StatPearls / Tracheal Trauma (2020/07/10)), écrite par les contributeurs de StatPearls et partagée sous la licence CC-BY 4.0 international (jusqu'au 2022-12-08). Le contenu original est disponible à https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29763191 (livre).
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