Retrait de corps étranger intrarectal

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Retrait de corps étranger intrarectal
Procédure

Plusieurs corps étrangers insérés par dissimulation incorporée de haschich (radiographie abdominale)
Procédure
Système Gastro-intestinal
Informations
Terme anglais Rectum Foreign Body Removal
Wikidata ID Q1455127
Spécialités Chirurgie générale, Médecine d'urgence, Gastro-entérologie

Le retrait de corps étranger intrarectal est une procédure qui consiste en l'extraction d'un objet inséré volontairement ou involontairement dans le rectum. Étant donné la grande variété d'objets possiblement insérables dans cet orifice, l'intervention peut nécessiter une chirurgie ou non.

Indications

Le retrait rapide de tous corps étrangers rectaux est essentiel. On veut retirer le plus rapidement possible tout corps étranger pour limiter l'oedème qui rendra l'extraction plus difficile et pour éviter une nécrose par compression prolongée de la paroi digestive. De plus, plus le temps passe, plus l'objet peut migrer en amont et rendre l'extraction transanale plus difficile.

Pour ce faire, deux approches sont possibles, soit l'approche transanale ou l'approche abdominale. [1]

L'extraction transanale doit toujours être tenté en première intention (60% à 75% des corps étrangers intrarectaux sortiront de la sorte)[2].

Les indications pour l'extraction abdominale sont une suspicion de péritonite et un corps étranger intrarectal non accessible ou l'échec de l'approche endorectale.[2]

Contre-indications

Il n'y a aucune contre-indication à l'extraction d'un corps étranger intrarectal. Tous les corps étrangers doivent être retirés. Les contre-indications mentionnées ci-bas sont en lien avec le choix de l'approche transanale.

Absolues

Les contre-indications absolues pour l'approche transanale sont [1][2] :

  1. une péritonite secondaire à une perforation rectale
  2. une septicémie
  3. la présence d'air libre sous le diaphragme
  4. la présence de liquide libre abdominal.

Relatives

Les contre-indications relatives pour l'approche transanale sont [2] :

  1. un objet non palpable au toucher rectal malgré une anesthésie générale et curarisation ou inaccessible par endoscopie sous anesthésie
  2. un corps étranger fixé à cause d'oedème
  3. un corps étranger fragile ou coupant[note 1]
  4. un patient qui ne coopère pas[note 2].

Anatomie

Le rectum consiste en une structure tubulaire continuant le colon sigmoïde. Il débute au niveau de S3 et devient le canal anal au niveau du hiatus anorectal grâce aux fibres les plus internes du puborectalis. Il possède deux concavités principales, à savoir les plis sacré et anorectal. Il a également trois plis transverses (supérieur, moyen et inférieur). Le muscle releveur de l'anus soutient le rectum en distal. Le fascia de Waldeyer fixe le rectum à la courbure du sacrum en postérieur. En latéral, le rectum est soutenu par ses ligaments latéraux. Le fascia de Denonvillers le soutient en antérieur chez les hommes, tandis que c'est le fascia rectovaginal qui le soutient chez les femmes.[2] La paroi rectale est composée d'une muqueuse rouge glandulaire luisante avec un système nerveux autonome. Ce dernier est généralement insensible à la douleur. Le système porte se charge du drainage veineux. Le retour lymphatique du rectum se fait le long du pédicule vasculaire hémorroïdaire supérieur vers les ganglions mésentériques inférieurs et aortiques.[3] En antérieur, il est lié à la vessie, à la prostate, aux glandes séminales chez les hommes. En ce qui concerne les femmes, il est lié à l'utérus et à son col, au vagin et au cul-de-sac de Douglas. Le rectum est lié en postérieur avec le plexus sacré et les troncs sympathiques.[2]

Évaluation

Différents corps étrangers intrarectaux (radiographies abdominales)

L'évaluation consiste à vérifier les éléments suivants.[2]

  • Étant donné la nature de la procédure, l'évaluation des patients avec un corps étranger intrarectal doit se faire dans un espace privé.
  • L'examen abdominal permet de rechercher un rebond, une défense volontaire/involontaire ou des contractures abdominales. L'examen périanal et le toucher rectal permettent d'évaluer la prise en charge pour le retrait du corps étranger.
  • En cas de péritonisme, un accès intraveineux de gros calibre est recommandé pour la réanimation liquidienne et les études de laboratoire. Elles comprennent la numération globulaire, les électrolytes, la coagulation, etc.
    • En présence de perforation intrapéritonéale ou de sepsis pelvien, il y a une leucocytose et une acidose métabolique. Dans ce contexte, des antibiotiques à large spectre doivent être administrés, notamment des céphalosporines de 3e génération et du métronidazole.
  • La radiographie abdominale permet d'identifier et confirmer la présence de l'objet intrarectal s'il est radio-opaque. Une vue latérale permet d'évaluer l'orientation de l'objet par rapport à la concavité sacrée. De plus, elle peut évaluer la présence d'air libre provenant d'une perforation.
  • Si l'objet est non radio-opaque, la tomodensitométrie abdominale est indiquée.
  • En ce qui concerne le retrait manuel du corps étranger, une analgésie adéquate et éventuellement des sédatifs doivent être disponibles pour faciliter la procédure.
  • Il faut aussi obtenir le consentement libre et éclairé du patient après avoir discuté des risques et des avantages des procédures à effectuer.

Préparation

Équipement

Le matériel requis pour l'approche transanale est le suivant [2] :

  • des gants chirurgicaux
  • une source de lumière
  • du gel de lidocaïne
  • un spéculum anal, écarteur de Parks
  • un cathéter de Foley
  • un spéculum vaginal pour les femmes
  • un rectoscope
  • une pince à préhension
  • un sigmoïdoscope rigide ou souple si le corps étranger n'est pas palpable.

Personnel

La prise en charge du patient présentant un corps étranger intrarectal se fait en travail d'équipe. L'équipe comprend un chirurgien, des infirmières, un anesthésiste et un assistant de table d'opération.[2]

Technique

Il faut passer des approches les moins invasives aux approches plus invasives. L'approche transanale avec extraction manuelle doit être tentée en premier. Le succès du retrait manuel dépend de la taille de la main du clinicien et de la relaxation du sphincter anal du patient. [4]

Approche transanale afin d'extraire un corps étranger intrarectal[5][2]
Étapes Description de la technique
1 Procéder à l'analgésie et à la sédation du patient. En cas d'échec, l'anesthésie locale peut optimiser l'analgésie et la relaxation sphinctérienne.
2 Demander au patient de se placer en position de lithotomie et d'effectuer une manoeuvre de valsalva. Un assistant peut aider en poussant sur l'abdomen.
3 Procéder à l'extraction du corps étranger à l'aide d'une manipulation digitale. Un objet rigide coincé dans la concavité sacrée ou à l'horizontal entre la symphyse et le sacrum peut être plus difficile à déloger.
4 Faire une rectoscopie rigide ou une sigmoïdoscopie flexible afin d'évaluer les dommages aux muqueuses, les saignements actifs, une perforation ou la présence d'un autre objet.
5 Répéter la radiographie abdominale si un doute persiste.

Plusieurs types d'objet peuvent se retrouver coincés dans le rectum et leurs caractéristiques doivent être prises en compte.

Dessin de l'insertion d'un cathéter Foley afin de retirer un corps étranger intrarectal (ampoule)
Approche transanale selon le type d'un corps étranger intrarectal
Types d'objet Conseils selon les caractéristiques de l'objet
Contondant
  • Briser l'objet en plus petit morceau si possible (ex. fruit).
  • Certains corps étrangers peuvent bénéficier d'une injection d'air en amont pour rompre l'effet de vide créé par l'intéraction entre les dimensions de l'objet et l'oedème de la muqueuse. Placer un cathéter Foley en amont pour ce faire.
  • Pour les bouteilles ou les pots, faire l'inflation d'un tube Blake-More à l'intérieur de l'objet.
  • Certains accessoires peuvent être utiles pour l'extraction : le forceps, les pinces, un aimant pour les objets métalliques et la suce obstétricale (ventouse).
  • Si l'objet est creux, il ne faut pas y couler du plâtre avec une pince ou un abaisse-langue à l'intérieur. En effet, la réaction exothermique du plâtre qui fige peut brûler la muqueuse rectale.
Pointu ou coupant
  • Être excessivement prudent à cause de l'augmentation du risque de lésion lors de l'extraction, autant pour le patient que le chirurgien.
  • Manipuler le corps étranger sous vision directe idéalement.
  • Faire une rectoscopie rigide pour vérifier l'intégrité des structures suite au retrait de l'objet.
Dissimulation incorporée de substances (body pakers)
  • Faire attention de ne pas briser le sac lors de la procédure (risque de décès en cas de déversement de cocaïne dans le colon).
  • S'il est impossible de faire l'extraction, il faut attendre la descente naturelle du sac, on peut accélérer le processus avec des lavements évacuants.
  • Les mules sont un autre sous-ensemble de patients pour lesquels le retrait des RFB doit avoir lieu dans la salle d'opération étant donné la fragilité de l'emballage contenant les médicaments, et le risque de toxicité systémique devrait entraîner le déversement du contenu lors du retrait.[2] Chaque cas est à évaluer selon le type de sac et de marchandise transportée.
Corps étranger dans le sigmoïde
  • Utiliser le sigmoïdoscope pour visualiser le corps étranger
  • Utiliser les lassos de polypectomie (snares) pour extraire le corps étranger coincé au sigmoïde

Si l'approche transanale est infructueuse ou en présence de contre-indications, il faut passer en salle d'opération où quelques options chirurgicales sont possibles.

Approche chirurgicale pour le retrait d'un corps étranger intrarectal[5][6][7]
Types de chirurgie Description de la technique Commentaires
Chirurgie transanale minimalement invasive (TAMIS)
  1. Placer le patient en position de lithotomie.
  2. Insérer un trocar 12 mm dans l'anus afin de créer un joint d'étanchéité pour l'insufflation rectale.
  3. Utiliser deux pinces laparoscopiques mousse afin d'extraire le corps étranger.
Avantages :
  • C'est une technique utilisable pour la majorité des chirurgiens qui disposent de cette technologie au bloc opératoire.
  • Cela permet une inspection de meilleure qualité pour les structures rectales potentiellement lésées.
  • Cette technique ne nécessite pas tous les instruments pour une laparoscopie de base.
Laparoscopie transabdominale
  1. Placer le patient en position Lloyd-Davies.
  2. Stabiliser le corps étranger avec les intruments laparoscopique en appliquant une pression transmurale.
  3. Appliquer une pression sur l'objet pour le faire descendre distalement au rectum (à éviter si l'objet est pointu) et retirer l'objet par l'anus.
  4. En cas d'échec ou d'objets menacant l'intégrité des muqueuses, faire une extraction transpéritonéale.
Laparotomie transabdominale
  1. Placer les jambes du patient dans des étriers, car la procédure nécessite à la fois une approche abdominale et transanale.
  2. Manipuler l'objet dans le rectum moyen ou inférieur à travers le rectosigmoïde sain.
  3. Retirer le corps étranger à la main ou avec des instruments.
  4. En cas d'échec, faire une colotomie sur la paroi antérieure du rectum ou le rectosigmoïde.
  5. Extraire manuellement l'objet.
  6. Réparer la lacération chirurgicale.
  7. Faire une colostomie de dérivation proximale et une fistule muqueuse (la plaie est généralement profonde dans le bassin et ne peut pas être extériorisée) si la qualité des tissus fait craindre une fuite anastomotique potentielle.
  • Souvent, aucune mobilisation du rectum ou du sigmoïde n'est nécessaire.
  • En cas de perforation recto-sigmoïdienne causée par l'objet, la lésion est traitée comme les autres lésions intrapéritonéales du côlon et du rectum.
  • La fermeture primaire seule de la lacération chirurgicale est rarement recommandée, car cela retarde l'opération et une large contusion avec contamination de la cavité péritonéale est généralement associée.

Complications

Gros corps étranger intrarectal après son extraction (laparotomie)

Dans tous les cas, le retrait du corps étranger intrarectal doit être effectué rapidement, car une extraction retardée peut entraîner un œdème et une perforation du côlon : une procédure intra-abdominale devient alors nécessaire.[2]

Les complications potentielles de la procédure transanale sont les suivantes [2][8] :

Suivi

Une endoscopie de contrôle permet d'évaluer les dommages suite au retrait du corps étrangers.

Si une approche transanale est choisie, il faut surveiller les signes vitaux et l'abdomen du patient à chaque heure. Effectivement, l'extraction transanale du corps étranger peut causer de petites déchirures et des fuites, donc les professionnels de la santé doivent rester sur leur garde après la procédure.[2]

Notes

  1. Néanmoins, l'approche abdominale ne sera pas moins dangereuse pour le chirurgien ou le patient. Il y aura des précautions à prendre pour la manipulation et la gestion de l'extraction de l'objet. L'orientation de l'objet peut aussi dicter la conduite. Par exemple, un long couteau inséré avec le manche vers le haut sera plus sécuritairement extrait par voie abdominale.
  2. Un examen sous anesthésie générale sera indiqué.

Références

__NOVEDELETE__
  1. 1,0 et 1,1 Kyle G. Cologne et Glenn T. Ault, « Rectal foreign bodies: what is the current standard? », Clinics in Colon and Rectal Surgery, vol. 25, no 4,‎ , p. 214–218 (ISSN 1531-0043, PMID 24294123, Central PMCID 3577617, DOI 10.1055/s-0032-1329392, lire en ligne)
  2. 2,00 2,01 2,02 2,03 2,04 2,05 2,06 2,07 2,08 2,09 2,10 2,11 2,12 et 2,13 Hussain Sajjad et Lauren M. Paish, StatPearls, StatPearls Publishing, (PMID 32491489, lire en ligne)
  3. « Évaluation des troubles anorectaux - Troubles gastro-intestinaux », sur Édition professionnelle du Manuel MSD (consulté le 28 mars 2023)
  4. Joel E. Goldberg et Scott R. Steele, « Rectal foreign bodies », The Surgical Clinics of North America, vol. 90, no 1,‎ , p. 173–184, Table of Contents (ISSN 1558-3171, PMID 20109641, DOI 10.1016/j.suc.2009.10.004, lire en ligne)
  5. 5,0 et 5,1 David E. Beck, Steven D. Wexner et Janice F. Rafferty, Gordon and Nivatvongs' principles and practice of surgery for the colon, rectum, and anus, (ISBN 978-1-62623-430-7 et 1-62623-430-2, OCLC 1080083272, lire en ligne)
  6. (en) Shamir O. Cawich, Fawwaz Mohammed, Richard Spence et Matthew Albert, « Colonic Foreign Body Retrieval Using a Modified TAMIS Technique with Standard Instruments and Trocars », Case Reports in Emergency Medicine, vol. 2015,‎ , e815616 (ISSN 2090-648X, PMID 25945267, Central PMCID PMC4405213, DOI 10.1155/2015/815616, lire en ligne)
  7. Shamir O. Cawich, Dexter A. Thomas, Fawwaz Mohammed et Nahmorah J. Bobb, « A Management Algorithm for Retained Rectal Foreign Bodies », American Journal of Men's Health, vol. 11, no 3,‎ , p. 684–692 (ISSN 1557-9891, PMID 27903951, Central PMCID 5675215, DOI 10.1177/1557988316680929, lire en ligne)
  8. Youssef Shaban, Adel Elkbuli, Vasiliy Ovakimyan et Rachel Wobing, « Rectal foreign body causing perforation: Case report and literature review », Annals of Medicine and Surgery (2012), vol. 47,‎ , p. 66–69 (ISSN 2049-0801, PMID 31645940, Central PMCID 6804320, DOI 10.1016/j.amsu.2019.10.005, lire en ligne)
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