Ictère du nouveau-né (approche clinique)

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Ictère du nouveau-né
Approche clinique

Ictère chez une fillette de 6 semaines dû à de l'hypothyroïdisme congénitale
Caractéristiques
Examens paracliniques TSH, Échographie abdominale, Bilan d'hémolyse, Albumine sérique, Bilan de coagulation, Bilan métabolique, Enzymes hépatiques, Bilan septique, Recherche de déficit en G6PD, Recherche de galactosémie, ... [+]
Drapeaux rouges
Irritabilité, Ictère (signe clinique), Asthénie (symptôme), Détresse respiratoire du nouveau-né
Informations
Terme anglais Neonatal jaundice
Autres noms Jaunisse du nouveau-né, Hyperbilirubinémie du nouveau-né
Spécialité Pédiatrie

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[Référence nécessaire]

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Objectif du CMC
Ictère du nouveau-né (49-1)

L'ictère du nouveau-né est une entité clinique très fréquente touchant au delà de 50% d'entre eux. Il peut être physiologique, auquel cas il sera considéré bénin (à moins d'une hyperbilirubinémie), ou pathologique comme manifestation d'une maladie sous-jacente. À l'histoire, il sera important d'établir la temporalité de l'ictère et les différents facteurs de risques de la mère, de l'intra-partum et du nouveau-né, car ceux-ci orienteront vers certaines étiologies. À l'examen physique, il s'agira de mettre en évidence l'ictère lui même et certains autres signes propres à sa cause. Les investigations dépendront du type d'hyperbilirubinémie. Si elle est non-conjuguée (indirecte), on penchera davantage vers des tests hémolytiques tandis qu'on considérera plutôt des investigations hépatiques ou biliaires si elle est conjuguée (directe).

La prise en charge sera causale avec une photothérapie pour les étiologies à l'hyperbilirubinémie non-conjuguée et/ou par exsanguino-transfusion. Au suivi, il sera important d'encourager les parents à reconsulter si l'ictère réapparaît.

L'unique complication de l'ictère et celle que la prise en charge vise à éviter est le kernictère, où la concentration de bilirubine en vient à causer des dommages neurologiques permanents. Comme drapeaux rouges, les signes de kernictère, la concentration en bilirubine ou son taux d'augmentation seront à considérer, mais aussi une survenue brutale (<24 heures) ou tardive (> 2 semaines).

Épidémiologie

Au delà de 50% des nouveau-nés développeront un ictère physiologique dans leurs premières semaines de vie.[1] [Référence à actualiser]Cependant, les ictères pathologiques sont plus rares. Généralement, l'ictère physiologique apparaîtra dans les 3 ou 4 premiers jours de vie et sera auto-résolutif en dix jours. Chez les prématurés, l'ictère sera plus fréquent, plus important et durera plus longtemps.[2]

Étiologies

Les causes de l'ictère néonatal peuvent se diviser en deux catégories selon le fractionnement de bilirubine:

Étiologies de l'ictère néonatal [Référence nécessaire]
Hyperbilirubinémie principalement non-conjuguée (indirecte) Hyperbilirubinémie principalement conjuguée (directe)
Physiologique
  • Déshydratation (ictère de l'allaitement)
  • Ictère du lait maternel
  • Toujours pathologique
Pathologique
Truc mnémotechnique
TORCH (Infections maternelles mettant à risque le nouveau-né)

Les étiologies de l'ictère peuvent aussi être classées selon l'heure où elles surviennent:

Étiologies de l'ictère du nouveau-né selon l'âge[3]
< 24h 24-72h 72-96h > 1 semaine
Toujours pathologique
  • Physiologique ± déshydratation (ictère de l'allaitement)
  • Sepsis

Physiopathologie

Métabolisme de la bilirubine

La bilirubine est le produit de la dégradation de l'hème. Elle arrive par voie sanguine au foie où elle est conjuguée et ensuite relâchée dans les canaux biliaires vers le duodénum pour être excrétée dans les selles. La bilirubine est conjuguée à l’acide glucuronique par l’enzyme glucuronyl-transférase. Un cycle entéro-hépatique permet de récupérer une partie de la bilirubine qui aurait été éliminée dans les selles. [Référence nécessaire]

Chez le nouveau-né, l'ictère physiologique est causé par trois mécanismes:[2]

  1. augmentation de la bilirubine: augmentation de l'hématocrite et destruction des globules rouges
  2. ralentissement de la conjugaison: glucoronyl transférase immature
  3. augmentation du cycle entérohépatique

Lors de l'ictère de l'allaitement, la déshydratation amplifiera l'ictère physiologique. Pour l'ictère du lait maternel, c'est la présence d'un inhibiteur de la glucoronyl transferase qui sera en cause. Dans ces deux cas, c'est la bilirubine non-conjuguée (indirecte) qui augmentera. [Référence nécessaire]

La physiopathologie des ictères pathologiques (une partie avec bilirubine conjuguée) est variée et dépend de l'étiologie en cause. [Référence nécessaire]

Approche clinique

Questionnaire

L'histoire devrait en premier lieu établir l'âge du début l'ictère et la présence de signes et symptômes suggérant un possible kernictère (léthargie, problème à l'allaitement pouvant progresser vers la stupeur, l'hypotonie, des convulsions et en dernier lieur de l'hypertonie). Un début dans les premiers 24-48 heures ou après 2 semaines témoignera d'une cause probablement pathologique[note 1]. [Référence nécessaire]

L'allaitement devrait être investigué en profondeur, notamment la fréquence, la qualité et la durée des boires. La production d'urines et de matières fécales doit aussi être questionnée.[1]

Après, il incombe de faire l'histoire de la grossesse et de l'accouchement afin d'établir la présence de facteurs de risque. Il faudra aussi questionner la mère sur les antécédents familiaux afin de possiblement établir une cause génétique.

Facteurs de risque[2][4][5]
Mère Périnataux Néonataux
  • Groupe ethnique (ex: asiatiques et amérindiens) [ex: thalassémie, sphérocytose]
  • Complications durant la grossesse
    • diabète gestationnel
    • incompatibilité Rh ou ABO
    • TORCH
  • Allaitement difficile
  • Histoire familiale
    • maladies génétiques (ex: déficit en G6PD, galactosémie)
    • autre enfant ayant souffert d'ictère ou nécessitant photothérapie
  • Sexe masculin
  • Allaitement difficile
  • Infection (hépatite, sepsis)
  • Nutrition parentérale
  • Facteurs génétiques (ex: déficit en G6PD, galactosémie)
  • Hypothyroïdie congénitale
  • Polycythémie
  • Médicaments interférant avec le métabolisme de la bilirubine (ceftriaxone, sulfonamides, antimalariaux)

La revue des systèmes devra couvrir les manifestations des étiologies potentielles.

Revue des systèmes [Référence nécessaire]
Trouvaille Penser à ...
Fièvre, irritabilité, léthargie Sepsis
Difficulté aux boires et hypotonie Hypothyroïdie ou désordre métabolique
Vomissements répétés Obstruction intestinale

Examen clinique

Premièrement, il incombe de vérifier l'apparence générale et les signes vitaux. Ensuite la peau est inspectée afin de mettre en évidence un ictère. La progression de l'ictère est céphalo-caudale et deviendra visible entre 85 et 120 µmol/L de concentrations sériques de bilirubine. L'ictère peut être mis en évidence plus facilement au niveau de la sclère ou de la pointe du nez avec un éclairage naturel.[2] Une légère pression sur la peau peut révéler la coloration jaunâtre.[1] Autrement, l'examen physique devrait s'orienter selon les étiologies possibles.

Étiologies selon les trouvailles[1]
Trouvaille Étiologie / Facteur de risque
Apparence générale
Pétéchies / écchymoses Anémie hémolytique
Macrosomie Diabète maternel
Léthargie ou irritabilité Sepsis ou infection
Macroglossie Hypothyroïdisme
Tête et cou
Ecchymose ou oedème au scalp Céphalhématome
Poumons
Crépitements, ronchis, diminution du murmure vésiculaire Pneumonie
Abdomen
Distention, masse Hépatosplénomégalie
Douleur à la palpation Obstruction intestinale
Système nerveux
Hypotonie et faiblesse Désordre métabolique, hypothyroïdisme, sepsis

Drapeaux rouges

En présence des situations suivantes, il faudra considérer la présence d'un ictère du nouveau-né pathologique et possiblement amorcer la prise en charge:[1]

  • Ictère dans les premiers 24h de vie
  • léthargie, irritabilité, détresse respiratoire
  • Ictère après 2 semaines de vie
  • Bilirubine sérique totale > 307.8 µmol/L
  • Augmentation de la bilirubine sérique totale > 3.4 µmol/L/heure ou > (85.5 µmol/L/jours)
  • Concentration de la bilirubine conjuguée > 17 µmol/L si la totale est < 85.5 µmol/L ou > 20% de la totale (suggère une cholestase néonatale)

Investigation

La Société Canadienne de Pédiatrie recommande la mesure de la bilirubine sérique totale (BST) chez tous les nourrissons dans les premiers 72 heures de vie, à moins qu'il ne soit nécessaire de l'obtenir plus tôt en raison d'une jaunisse clinique. Si la concentration de BST ne justifie pas d'intervention immédiate, il est indiqué de la transcrire sur le nomogramme prédictif afin d'évaluer le risque d'évolution vers une hyperbilirubinémie problématique. À 72 heures, de vie, il n'est pas encore possible d'objectiver visuellement l'ictère.[4]

S'il y a hyperbilirubinémie, l'investigation dépendra de sa nature. Il faudra en premier fractionner la bilirubine:[3]

Prise en charge

Lorsqu'un traitement spécifique d'une cause pathologique est disponible, ce dernier devra être entrepris sans délai et un spécialiste consulté. L'ictère physiologique pourra être résorbé en encourageant les boires afin de prévenir la déshydratation tandis que l'ictère du lait maternel pourra être traité en nourrissant le nouveau-né à la formule plutôt qu'au sein pour une à deux journée. Pour l'ictère lui-même, aucun traitement n'est nécessaire à moins que le taux de bilirubine ne dépasse un certain seuil, auquel cas il faudra impérativement prévenir le kernictère. À cette fin deux thérapies existent, la photothérapie (seulement pour l'hyperbilirubinémie non-conjuguée) et l'exsanguino-transfusion.[6]

La photothérapie (au moyen d'une lumière bleue-verte et non UV) permet la conversion de la bilirubine non-conjuguée en une forme excrétable par photoisomérisation. La bilirubine devra être contrôlée pendant et immédiatement après la thérapie en raison du risque d'hyperbilirubinémie rebond dû à la réversibilité de la photoisomérisation. La photothérapie est contre-indiquée lorsque l'on a affaire à une hyperbilirubinémie conjuguée en raison du risque de bronze baby syndrome[note 2]. Comme effets secondaires de la photothérapie, l'on note un rash, la diarrhée, des dommages oculaires (d'où l'importante de protéger les yeux de l'enfant) et la déshydratation. L'initiation de la photothérapie devra se faire selon le guide de pratique.

L'exsanguino-transfusion, est indiquée lorsque les niveaux de bilirubine ne sont pas adéquatement contrôlés par la photothérapie (entre 375 µmol/L et 425 µmol/L[4]). L'initiation devra se faire selon le guide de pratique. En attendant l'exsanguino-transfusion (processus qui prend plusieurs heures), il faudra faire autant de prélèvements sanguins que possibles (afin de les soumettre à des analyses pour trouver la cause), continuer la photothérapie (si indiquée), continuer l'hydratation et injecter des IVIg (en cas d'iso-immunisation).[4]

L'allaitement doit autant que possible être poursuivi et au besoin un consultant en allaitement pourra être impliqué.

Suivi

Une fois les niveaux de bilirubine du nouveau-né revenus dans les limites de la normale, il sera important d'informer les parents d'être attentif à de nouveaux signes d'ictères et de s'assurer que les boires se déroulent bien.

Complications

Une concentration de bilirubine supérieure à 340 µmol/L place le nouveau-né à risque de Kernictère, où la bilirubine dépassant la capacité de transport de l'albumine, vient se déposer dans le cerveau (surtout dans les ganglions de la base et le tronc), causant des dommages neurologiques permanents. Chez le nouveau-né en jeûne, hypoalbuminémie, hyperosmolarité plasmatique, sepsis, hémolyse, méningite, hypoxie, acidose, hypothermie, hypoglycémie ou prématurité, le kernictère peut survenir à des concentrations plus basses.[3][6]

Notes

  1. Vu que la plupart des nouveau-nés obtiennent leur congé après moins de 48 heures, beaucoup de cas d'ictère ne pourront être diagnostiqués que hors de l'hôpital, d'où l'importance d'éduquer, les parents.
  2. Seul la bilirubine non-conjuguée peut être photoisomérisée pour être excrétée. Sa forme conjuguée se transformera en métabolite toxique et entraînera le bronze baby syndrome par la coloration résultante de la peau.

Références

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 et 1,4 (en) « Neonatal Hyperbilirubinemia - Pediatrics - Merck Manuals Professional Edition », Merck Manuals Professional Edition,‎ (lire en ligne)
  2. 2,0 2,1 2,2 et 2,3 (en) Tina Binesh Marvasti et Sydney McQueen, Toronto Notes 2018, 34e éd., P64
  3. 3,0 3,1 et 3,2 (en) Tina Binesh Marvasti et Sydney McQueen, Toronto Notes 2018, 34e éd., P65
  4. 4,0 4,1 4,2 et 4,3 Société canadienne de pédiatrie, « Lignes directrices pour la détection, la prise en charge et la prévention de l’hyperbilirubinémie chez les nouveau-nés à terme et peu prématurés (35 semaines d’âge gestationnel ou plus) | Société canadienne de pédiatrie », sur www.cps.ca (consulté le 2 septembre 2018)
  5. (en) « Unconjugated hyperbilirubinemia in term and late preterm infants: Epidemiology and clinical manifestations », sur UpToDate, (consulté le 21 mai 2020)
  6. 6,0 et 6,1 Dictionnaire de pédiatrie Weber, , 3e éd., p. 569
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