Céphalée médicamenteuse

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Céphalée médicamenteuse
Maladie
Caractéristiques
Signes Aucun signe clinique
Symptômes
Céphalée
Diagnostic différentiel
Céphalée de tension, Céphalée de Horton, Abcès cérébral, Migraine, Hypertension intracrânienne, Apnée du sommeil, Céphalée cervicogénique, Pseudotumeur cerebri, Céphalée tumorale
Informations
Terme anglais Medication-overuse headache, Rebound headache, Drug-induced headache, Medication-misuse headache
Autres noms Céphalée rebond, Céphalée induite par une surconsommation médicamenteuse
Wikidata ID Q1756659
Spécialités Neurologie, Médecine familiale, Médecine d'urgence


La céphalée médicamenteuse, ou céphalée rebond, se produit lorsque des médicaments destinés à soulager une céphalée sont consommés trop fréquemment. Cette surutilisation de médicaments abortifs provoque des céphalées[1][2]. La céphalée se résout à l'arrêt de la prise du médicament abusé[3].

Épidémiologie

Sa prévalence est estimée à 1 % dans le monde (environ 58,5 millions de personnes), ce qui est inférieur à celle de la migraine et de la céphalée de tension[4].

La céphalée médicamenteuse se produit assez fréquemment chez les patients souffrant de migraines chroniques (environ 32 %). La céphalée médicamenteuse est plus fréquente chez les femmes (ratio M:F allant de 2:1 à 5:1) et chez les personnes à faible statut socio-économique[1][4].

Étiologie

Les étiologies sont la surconsommation des molécules suivantes[5][6][7] :

La consommation régulière d'analgésiques sans souffrir de céphalée ne provoque pas de céphalée médicamenteuse.

Physiopathologie

Le mécanisme exact de la céphalée médicamenteuse n'est pas encore complètement élucidé. On suppose que la céphalée médicamenteuse est attribuée à l'épuisement de la 5-HT par une surutilisation de médicaments abortifs contre les maux de tête. Cela conduit à une hyperexcitabilité neuronale dans le cortex cérébral (qui peut conduire à une dépression corticale propagée) et le système trijumeau (qui produit une sensibilisation périphérique et centrale). La diminution des niveaux de 5-HT entraîne une augmentation de la libération de CGRP (peptide lié au gène de la calcitonine) par les ganglions trigéminés, celui-ci étant impliqué dans la sensibilisation ultérieure des neurones nociceptifs du trijumeau[1].

D'autres études démontrent des changements cérébraux structurels et fonctionnels qui se produisent lors de la céphalée de surconsommation. Il existe des changements notables dans le métabolisme de diverses structures cérébrales, comme on le voit sur les scans TEP. Ces changements sont pour la plupart réversibles après le retrait des médicaments analgésiques, à l'exception de l'hypométabolisme persistant observé dans la région orbitofrontale. Cette région particulière est connue pour être impliquée dans la toxicomanie et l'on suppose qu'elle constitue un facteur de risque de rechute ultérieure dans la surconsommation d'analgésiques et de céphalée médicamenteuse récurrente[1].

Présentation clinique

Facteurs de risque

Les facteurs de risque sont[1][3][8] :

Questionnaire

La présentation clinique de la céphalée médicamenteuse varie d'un patient à l'autre et change avec le temps chez le même patient[6]. Il peut y avoir une augmentation de la fréquence des céphalées préexistantes ou une évolution vers un nouveau type de céphalée[note 1][1].

  • La céphalée aura les caractéristiques suivantes :
    • elle sera épisodique, matinale[note 2] et augmentée par rapport à la céphalée de base
    • elle apparaît lorsqu'il y a un délai dans la prise de médicament[6]
    • la surconsommation dépend du type de médicament (> 3 mois)[3]:
      • > 10 jours/mois pour les ergots et les triptans
      • > 10 jours/mois pour les opioïdes
      • > 15 jours/mois pour l'acétaminophène, l'AAS et les AINS
      • > 10 jours/mois lorsque les médicaments sont combinés ou utilisés en alternance
    • la localisation et la qualité de la douleur sont variables.
  • La cervicalgie est fréquente[note 3].
  • Le patient rapportera une diminution en efficacité des traitements usuels de la céphalée.

Même si la céphalée médicamenteuse est non spécifique, il faut tout de même questionner les éléments suivants :

  • l'anxiété et la dépression co-morbide peuvent contribuer au tableau clinique
  • il n'y a aucun symptôme neurologique
  • il n'y a pas de drapeau rouge de la céphalée[note 4][6]
  • il n'y a pas d'aura migraineuse.

Examen clinique

L'examen clinique est normal :

Examen paraclinique

En l'absence de raison de croire à une autre cause de céphalée[note 4], la céphalée médicamenteuse est un diagnostic clinique[1]. Aucun examen paraclinique n'est nécessaire pour confirmer le diagnostic.

Des examens paracliniques peuvent être nécessaires pour éliminer des diagnostics différentiels.

Diagnostic

La céphalée induite par les médicaments est un diagnostic d'exclusion. Il faut toujours éliminer les causes plus graves de céphalée avant de conclure à ce diagnostic.

Selon les critères ICHD-3b, les trois points suivants doivent être remplis pour diagnostiquer une céphalée médicamenteuse[3].

  1. La céphalée doit survenir ≥ 15 jours par mois chez un patient présentant un trouble de la céphalée précédemment diagnostiqué.
  2. Le patient doit avoir surutilisé un ou plusieurs de ses médicaments abortifs contre les céphalées aiguës pendant > 3 mois.
  3. La céphalée ne peut pas être attribuée à une autre céphalée ICHD-3.

L'ICHD-3b stipule que lorsqu'une combinaison de différents médicaments contre les maux de tête est utilisée, leur fréquence combinée peut entraîner une céphalée médicamenteuse, même lorsque les médicaments individuels ne sont pas surutilisés séparément.[3]

Diagnostic différentiel

Le diagnostic inclut à la fois les causes de céphalées aiguës et chroniques[1] :

Traitement

L'utilisation fréquente de médicaments contre les céphalées aiguës peut être le reflet de céphalées mal contrôlées : ce n'est pas toujours une céphalée médicamenteuse.

Le traitement typique consiste en les stratégies suivantes[1].

  1. Cesser ou sevrer les médicaments surutilisés contre les céphalées aiguës[note 5].
    • Le médicament surutilisé peut généralement être arrêté immédiatement (sauf les opioïdes et barbituriques[5], qui doivent être sevrés sur > 1 mois[6]).
    • Les symptômes de sevrage durent généralement de 2 à 10 jours[6].
    • Étant donné l'aggravation initiale de la céphalée dans les premiers jours de sevrage, les médicaments suivants peuvent être prescrits, à condition que le médicament choisi ne soit pas de la même classe que le médicament causal[6] :
  2. Prescrire un médicament prophylactique pour la céphalée primaire (anticonvulsivants, tricycliques, β-bloqueurs, etc.).
  3. Prescrire un traitement aigu d'une classe différente pour la céphalée primaire[5].
  4. Optimiser la prise en charge non pharmacologique du patient en fonction de la céphalée primaire (sommeil, alimentation, repos, etc.).
  5. Éduquer le patient sur l'importance de limiter l'utilisation aiguë de médicaments pour éviter les récidives.

Complication

Les complications de la céphalée médicamenteuse sont [5]:

Évolution

L'évolution à long terme est très favorable, mais avec un taux de rechute estimé à environ 30 % dans les 6 mois suivants et 50 % après une période de 5 ans[1].

Prévention

La céphalée médicamenteuse peut être prévenue en évitant l'abus d'analgésiques. Les patients sont plus à risque lors du diagnostic initial d'une céphalée chronique.

Notes

  1. Si le mal de tête change de forme, il est crucial de ne pas sauter rapidement au diagnostic de la surconsommation et d'éliminer les causes graves de céphalées.
  2. Présumément lié au sevrage survenant pendant le sommeil.
  3. Souvent confondue avec un mal de tête cervicogène, qui à son tour a tendance à résister aux traitements adaptés à la cervicalgie).
  4. 4,0 et 4,1 Les drapeaux rouges sont:
    • signes et symptômes neurologiques focaux (altération de l'état mental, faiblesse, diplopie, papilloedème...)
    • augmentation lors de la toux ou du Valsalva
    • immunosuppression
    • ATCD de cancer
    • méningisme
    • céphalée de novo > 50 ans
    • « thunderclap » (apparition subite et intense / en coup de tonnerre)
    • symptômes d'artérite à cellules géantes (troubles visuels, claudication de la mâchoire, fièvre, perte de poids, sensibilité temporale, myalgies proximales)
    • symptômes systémiques (fièvre, perte de poids)
    • changement du pattern de la céphalée (qui ne va pas en s'améliorant)
    • yeux rouges
    • halos lumineux.
  5. Plusieurs études montrent que le sevrage complet à 100 % des médicaments aigus surutilisés donne les meilleurs résultats par rapport à la poursuite du même médicament aigu responsable de la céphalée de surconsommation mais en limitant la fréquence de son utilisation.
  6. Avec un IPP pour les patients > 40 ans.

Références

__NOVEDELETE__
  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,5 1,6 1,7 1,8 et 1,9 Dmitri Aleksenko, Kushagra Maini et Juan Carlos Sánchez-Manso, StatPearls, StatPearls Publishing, (PMID 29262094, lire en ligne)
  2. Claire H. Sandoe et Christine Lay, « Secondary Headaches During Pregnancy: When to Worry », Current Neurology and Neuroscience Reports, vol. 19, no 6,‎ , p. 27 (ISSN 1534-6293, PMID 31011857, DOI 10.1007/s11910-019-0944-9, lire en ligne)
  3. 3,0 3,1 3,2 3,3 et 3,4 (en) Headache Classification Committee of the International Headache Society (IHS), « The International Classification of Headache Disorders, 3rd edition (beta version) », Cephalalgia, vol. 33, no 9,‎ , p. 629–808 (ISSN 0333-1024 et 1468-2982, DOI 10.1177/0333102413485658, lire en ligne)
  4. 4,0 et 4,1 Theo Vos, Christine Allen, Megha Arora et Ryan M Barber, « Global, regional, and national incidence, prevalence, and years lived with disability for 310 diseases and injuries, 1990–2015: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2015 », The Lancet, vol. 388, no 10053,‎ , p. 1545–1602 (ISSN 0140-6736, PMID 27733282, Central PMCID PMC5055577, DOI 10.1016/s0140-6736(16)31678-6, lire en ligne)
  5. 5,0 5,1 5,2 et 5,3 Luc Lanthier, « Céphalée de rebond ou liée à une consommation excessive de médicaments », sur lanthiermed.com (consulté le 1er juin 2022)
  6. 6,0 6,1 6,2 6,3 6,4 6,5 et 6,6 (en) Andrew Micieli et Jennifer Robblee, « Medication-overuse headache », CMAJ, vol. 190, no 10,‎ , E296–E296 (ISSN 0820-3946 et 1488-2329, PMID 29530871, Central PMCID PMC5849449, DOI 10.1503/cmaj.171101, lire en ligne)
  7. The International Classification of Headache Disorders, 3rd edition (beta version). Headache Classification Committee of the International Headache Society (IHS), Cephalalgia. 2013 Jul;33(9):629-808.
  8. (en) « Medication Overuse Headache - Neurologic Disorders », sur Merck Manuals Professional Edition (consulté le 2 juin 2022)
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