Anémie
Classe de maladie | |
Frottis sanguin d'une anémie falciforme | |
Caractéristiques | |
---|---|
Signes | Splénomégalie, Pâleur, Bruits oculaires, Hypotension orthostatique, Souffle de haut débit, Ecchymoses, Pétéchies, Koïlonichie, Neuropathie périphérique, Perlèche, ... [+] |
Symptômes |
Intolérance à l'effort, Acouphène pulsatile, Diminution de la libido, Malaises gastrointestinaux, Dyspnée , Céphalée , Lipothymie , Aménorrhée , Asthénie , Palpitations , ... [+] |
Étiologies |
Hypothyroïdie, Hémorragie, Sphérocytose, Tuberculose, Chimiothérapie, Anémie ferriprive, Thalassémie, Saturnisme, Anémie de la maladie chronique, Aplasie des globules rouges, ... [+] |
Informations | |
Terme anglais | Anemia |
SNOMED CT ID | 271737000 |
Spécialité | Hématologie |
|
Anémie (42-1)
L'anémie chez l'adulte est un abaissement des globules rouges, définie comme une hémoglobine < 140 g/L pour les hommes et < 120 g/L pour les femmes.
Plus précisément, l'anémie est détectée selon l'hémoglobine, l'hématocrite ou la concentration en globules rouges, dépendants de l'âge et du sexe.
Sexe | Hémoglobine | Hématocrite | Concentration en globules rouges |
---|---|---|---|
Hommes | < 140 g / L | < 42% | < 4.5 x 1012 / L |
Femmes (non enceinte) | < 120 g / L | < 37% | < 4 x 1012 / L |
Chez les enfants, les seuils d'anémie varient selon l'âge. Chez la femme enceinte, il existe une anémie physiologique.
Épidémiologie
L'anémie toutes causes est très prévalente. On estime que 8.8% de la population mondiale vit avec une anémie ferriprive et cette dernière est plus commune chez les femmes (9.9%) que chez les hommes (7.8%)[2].
Étiologies et physiopathologie
Les étiologies de l'anémie se classent en trois catégories selon le volume globulaire moyen.[3] Chez l'enfant, la valeur normal du VGM est entre 74 et 91 fL.
Anémie microcytaire ( < 80 fL ) | Anémie normocytaire ( 80 à 100 fL ) | Anémie macrocytaire ( > 100 fL) |
---|---|---|
|
|
Physiopathologie
Une hématie possède une durée de vie d'environ 120 jours, après quoi elle est éliminée par la rate ou le système réticuloendothélial. L'anémie survient lorsque la perte de globule rouge dépasse la capacité du corps à les recréer.
Lorsque l'on a affaire à une anémie de consommation (pertes d'hématiques ou hémolyse), les mécanismes de production sont normaux, mais la perte est trop grande pour être compensée.
Dans le cas des anémies par diminution de la production, qu'elles soient micro, normo ou macrocytaires, c'est la capacité du corps à produire des nouveau globules rouges qui est en cause. Précisément pour l'anémie de maladie chronique/inflammatoire, l'hepcidine est une important régulateur de l'utilisation du fer.[5]
Histoire
Les symptômes de l'anémie sont très peu spécifiques et ne permettent pas de différencier entre les types d'anémies. Ils sont surtout le reflet des mécanismes de compensation du patient face à l'hypoxie tissulaire. Ils seront davantage prononcés chez les patients dont la réserve cardiaque ou pulmonaire est faible ou chez ceux dont l'anémie s'est développée rapidement.[1]
Les symptômes généraux de l'anémie sont l'asthénie, céphalée, lipothymie, faiblesse, malaise intolérance à l'effort, dyspnée et les palpitations. Certains patients se plaindront également d'acouphène pulsatile, d'aménorrhée, de diminution de la libido et de malaises gastrointestinaux.[4][1] Chez ceux souffrant d'hypoxie sévère ou d'hypovolémie, un chocpeut survenir.[1]
Une anémie peut être un processus chronique. À cet effet, un laboratoire récent du patient permettra d'établir si l'anémie est un phénomène récent ou pas. Aussi, l'anémie peut être partie d'une pancytopénie, donc il importe de regarder tout les lignées cellulaires.
Anémie chronique
Les causes d'une anémie chronique sont nombreuses. Il faudra questionner une histoire d'hémorragie, la diète (déficience en fer, B12 ou folates), les habitudes de consommation et les antécédents (anémie de la maladie chronique).
Trouvaille | Penser à ... | Précision |
---|---|---|
Neurologique | ||
Paralysie en gants et chaussettes | Déficience en vitamine B12 | |
Cardiaque | ||
Valve artificielle | Destruction mécanique des globules rouges | |
Digestif | ||
Hématochézie | Saignement gastrointestinal (anémie par perte) | |
Méléna | ||
Hématémèse | ||
Hématologique | ||
Infection récurrente | Pancytopénie | |
Saignement muqueuse | ||
Ecchymoses faciles | ||
Génito-urinaire | ||
Ménorragies, métrorragies | Anémie par perte | |
Autres | ||
Symptômes B |
|
La présence de symptômes B est un red flag |
Pica/pagophagie | Déficience en fer/anémie par perte | Associé avec saignement gastrointestinal[6] |
Âge < 12 mois | Hémoglobinopathies | anémie falciforme, thalassémie majeure |
Anémie aiguë
Les causes de l'anémie aiguë sont plutôt limitées (et souvent graves):
Examen physique
Les signes de l'anémie sont peu spécifiques et auront tendance à devenir évidents qu'en cas d'anémie sévère ou de complications.[1]
- pâleur des muqueuses et des conjonctives (Hb < 90 g/L), pli palmaire (Hb < 75 g/L)
- bruits oculaires (Hb < 55 g/L)
- signes cardiaques: tachycardie, HTO, souffle de haut débit[4]
D'autres signes en lien avec l'étiologie de l'anémie pourraient être mis en évidence:
- ictère / urobilinurie: anémie hémolytique
- lymphadénopathies: leucémie, anémie inflammatoire secondaire à une néoplasie
- splénomégalie: leucémie, sphérocytose
- ecchymoses, pétéchies: causes microangiopathique (CIVD, PTT, SHU, HELPP), pancytopénie
- koïlonichie: anémie ferriprive[7]
- perlèche: déficience en fer, B12 ou en folates
- neuropathie périphérique: déficience en vitamine B12
Investigation
Avant de lancer des investigations concernant l'anémie, il incombe de se demander si sa cause n'est pas dilutionnelle. Autrement, les anémies seront fréquemment de causes mixtes. Si l'anémie se trouve être d'origine ferriprive il faut exclure déficit nutritionnel, maladie digestif, et génito-urinaire.
Test | Quand l'utilisation de ce test est-elle justifiée | Résultats évocateurs |
---|---|---|
FSC | Toujours, car elle permet de statuer sur la gravité de l'anémie. La FSC permettra de déterminer si l'anémie est macro, normo ou microcytaire. |
|
Réticulocytose | Permet de déterminer si la moelle osseuse répond correctement à l'anémie. |
|
Frottis sanguin | Si l'on suspecte une hémoglobinopathie ou une destruction des globules rouges |
|
Bilan martial | Afin d'évaluer les réserves en fer et éliminer une anémie ferriprive | Anémie ferriprive:
Anémie inflammatoire:
Anémie sidéroblastique et Thalassémie:
|
B12 sérique | Dans le cas d'une anémie macrocytaire ou d'une carence suspectée | |
Folates sériques | Rarement fait, la carence en folates est devenue très exceptionnelle. | |
Bilan d'hémolyse | Pour les anémies normocytaires avec réticulocytose > 2% et / ou lorsqu'une hémolyse est suspectée cliniquement. |
Si extravasculaire:
|
Aspiration de la moelle osseuse | Lorsque l'on suspecte un défaut de production par atteinte de la moelle, spécialement ceux non-pancytopénique ou lorsqu'une autre lignées est atteinte (leucopénie, thrombopénie). Elle permettra également d'évaluer les précurseurs des cellules hématopoïétiques.[1] Si il est nécessaire d'évaluer l'architecture de la moelle, il faudra procéder à une biopsie. |
|
Plomb sérique | Lorsque l'on suspecte le saturnisme | > 80 ug/dL[8] |
Hémoglobine electrophoresis | Lorsque l'on suspecte une hémoglobinopathie (thalassemie, anémie falciforme) |
Prise en charge
La prise en charge est essentiellement causale. Voici quelques traitements pour des causes d'anémies fréquentes ou dont la prise en charge est urgence.
- anémie ferriprive: Sulfate ferreux 325 mg po die (anémie ferriprive) ou Venofer IV (anémie ferriprive)
- Après avoir corrigé l'anémie, continuer pour ~3 mois jusque la ferritine est corrigée
- insuffisance rénale chronique: EPO (IRC)
- déficience en vitamine B12: B12 (déficience en B12)
- microangiopathies:
- PTT: plasmaphérèse (PTT) + corticostéroïdes (PTT)
- SHU: traitement de support (SHU)
- CIVD: transfusions (CIVD - phase hémorragique) en phase hémorragique et héparine (CIVD - phase thrombotique)
- HELLP: accouchement (HELLP)
Transfusion sanguine
Il a lieu de transfuser:
- Hb < 70 g/L chez un patient asymptomatique
- Hb < 90 g/L chez un patient coronarien, en hémorragie, MPOC ou chez qui la demande en O2 est accrue [11]
- Thalassémie (majeur, intermédia)
Suivi
Il y aura lieu de recontrôler l'hémoglobine peu importe le type d'anémie. Si elle est causée par une déficience (fer, B12, folates), un contrôle quelques semaines après le début de la suppléance pourra être suffisant. Pour l'anémie hémolytique, des contrôles journaliers pourront s'avérer nécessaires. En contexte hospitaliers, étant donné que la FSC ou la Hb/Ht font partie du bilan de base, le suivi d'anémie pourra se faire conjointement. Dans les cas de thalassémie et d'anémie falciforme, une analyse d'électrophorèse est conseillée chez le partenaire avant d'avoir des enfants.
Complications
Un anémie progressant donnera éventuellement lieu à une insuffisance cardiaque en raison de la demande en débit nécessaire à l'oxygénation des tissus ou un état de choc. Dépendamment de la condition de base du patient, l'un pourra survenir avant l'autre.
Drapeaux rouges
- symptômes B, adénopathies: indiquent une cause néoplasique probable
- ictère: indique une hémolyse active assez sérieuse pour entraîner un ictère
- pétéchies, echymoses: dysfonction plaquettaire par envahissement de la moelle ou consommation excessive (CIVD)
- insuffisance cardiaque: hypoxie tissulaire assez sévère pour entraîner un insuffisance cardiaque à haut débit
Notes
- ↑ Les réticulocytes étant plus gros que les globules rouges, la machine indiquera un VGM (une moyenne) augmentée. La présence de réticulocytes peut être indiquées par une différentielle du volume érythrocytaire (DVE) élevée.
Références
- ↑ 1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 et 1,5 (en) Evan M. Braunstein, MD, PhD, « Evaluation of anemia », sur Merck Manual (consulté le 2 mai 2019)
- ↑ (en) « Years lived with disability (YLDs) for 1160 sequelae of 289 diseases and injuries 1990-2010: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2010 », The Lancet, (DOI 10.1016/S0140-6736(12)61729-2)
- ↑ « Anémie - 42-1 », sur Conseil médical du Canada
- ↑ 4,0 4,1 4,2 et 4,3 (en) Tina Binesh Marvasti et Sydney McQueen, Toronto Notes 2018, 34e éd., H6
- ↑ Elizabeta Nemeth, Erika V. Valore, Mary Territo et Gary Schiller, « Hepcidin, a putative mediator of anemia of inflammation, is a type II acute-phase protein », Blood, vol. 101, no 7, , p. 2461–2463 (ISSN 0006-4971, PMID 12433676, DOI 10.1182/blood-2002-10-3235, lire en ligne)
- ↑ W. G. Rector, « Pica: its frequency and significance in patients with iron-deficiency anemia due to chronic gastrointestinal blood loss », Journal of General Internal Medicine, vol. 4, no 6, , p. 512–513 (ISSN 0884-8734, PMID 2585159, DOI 10.1007/BF02599550, lire en ligne)
- ↑ Freedberg, et al. (2003). Fitzpatrick's Dermatology in General Medicine. (6th ed.). McGraw-Hill. (ISBN 0-07-138076-0).
- ↑ (en) « Adult blood lead epidemiology and surveillance (ABLES). »
- ↑ V. Brancaleoni, E. Di Pierro, I. Motta et M. D. Cappellini, « Laboratory diagnosis of thalassemia », International Journal of Laboratory Hematology, vol. 38 Suppl 1, , p. 32–40 (ISSN 1751-553X, PMID 27183541, DOI 10.1111/ijlh.12527, lire en ligne)
- ↑ H. F. Bunn, « Pathogenesis and treatment of sickle cell disease », The New England Journal of Medicine, vol. 337, no 11, , p. 762–769 (ISSN 0028-4793, PMID 9287233, DOI 10.1056/NEJM199709113371107, lire en ligne)
- ↑ (en) Tina Binesh Marvasti et Sydney McQueen, Toronto Notes 2018, 34e éd., H52