Évaluation médicale préopératoire

De Wikimedica
Évaluation médicale préopératoire (Éval Pré-op)
Concept
Informations
Terme anglais Preoperative medical evaluation
Spécialités Médecine interne, anesthésiologie

Page non révisée
__NOVEDELETE__
Objectif du CMC
Évaluation médicale préopératoire (74-3)

L'évaluation médicale préopératoire vise à optimiser l'état du patient étant donné une maladie chronique existante et à cerner des risques liés à la chirurgie[1]. Ceux-ci peuvent être de nature cardiopulmonaire, coagulatoire, anesthésique ou en lien avec l'utilisation d'un médicament[1]. Un plan de prise en charge est à prévoir suite à l'évaluation composé, entres autres, d'une anamnèse et d'un examen physique[1].

Risque des chirurgies

Voici un bref aperçu des chirurgies selon leur risque opératoire:

Risque opératoire de certaines chirurgies[2][3][4]
Risque bas Risque intermédiaire Risque élevé
  • Endoscopies
  • Cure de cataracte
  • Chirurgies du sein
  • Exérèse cutanée superficielle.
  • Endartériectomie de la carotide
  • Chirurgies ORL
  • Chirurgies intrapéritonéales
  • Chirurgies intrathoraciques
  • Chirurgies orthopédiques
  • Chirurgies de la prostate
  • Chirugies intracrânienne et de la colonne vertébrale
  • Chirurgies d'urgence
  • Chirurgies vasculaires
  • Chirurgies prolongées
  • Transplantion d'un rein
  • Transplantion d'un coeur, d'un poumon ou d'un foie (risque très élevé)

L'urgence des chirurgies est classifiée comme suit[5]:

  • très urgente (<6h): menaçant la vie ou un membre (traumas graves, rupture d'AAA)
  • urgente (6-24h): fractures, obstruction intestinale
  • semi-urgente (1-6 semaines): cancers
  • élective (jusqu'à 1 an): arthroplastique du genou.

Approche clinique

L'évaluation est centrée sur les possibles maladies cardiorespiratoires. Des complications liés à ces systèmes sont celle qui causent le plus de morbidité et de mortalité en période périopératoire[6].

Questionnaire

Antécédents médicaux

Les antécédents médicaux pertinents à questionner sont[2][7] :

  • Maladies cardiaques: incluant l'échelle Revised Cardiac Risk Index (RCRI) afin de stratifier le niveau de risque cardiaque. Par contre, certaines pathologies cardiaques pertinentes ne s'y retrouvent pas telle une sténose aortique[8].
Échelle Revised Cardiac Risk Index[8]
Variable Points
Antécédent de maladie cardiaque ischémique 1
Antécédent d'insuffisance cardiaque 1
Antécédent de maladie cérébrovasculaire 1
Insulinothérapie pour diabète 1
Créatinine sérique > 177 mmol/L 1
Chirurgie dans le péritoine, thoracique ou vasculaire (suprainguinale) 1

Un score RCRI plus élevé signifie que la chance d'une complication cardiaque tel un infarctus est plus probable en période post-opératoire. Les risques sur une période de trente jours sont: 6.0% pour un score total de un point, 10.1% pour un score de deux points et 15.0% pour les scores de trois et plus[8].

Les patients à haut risque d’événements cardiaques devraient être évalués en considérant leur capacité fonctionnelle exprimé en terme de Metabolic Equivalents (METs). Ceux dont la capacité fonctionnelle >= 4 METs n'ont généralement pas besoin de test cardiaque, ceux < 4 devraient subir un test à l'effort pharmacologique. Monter deux paliers d'escaliers à une vitesse régulière correspond à 4 METs. Il faut considérer une revascularisation cardiaque préopératoire pour les patients avec des trouvailles durant le test à l'effort.[6]

  • Maladie hépatique Celle-ci pourrait être un signe de problème de coagulation[9].
  • Maladie rénale Celle-ci pourrait anticiper des problèmes avec les électrolytes ou de régulation acido-basique[10].
  • Insuffisance surrénale Il existe un risque de crise surrénalienne en période périopératoire chez ces patients[11].
  • Diabète
  • Maladie respiratoire ainsi que les questions suivantes:
    • Apnée du sommeil
    • MPOC (avec valeurs spirométriques)
    • Infection des voies respiratoires
    • Orthopnée
    • Oxygénothérapie
    • Toux chronique
    • Tabagisme
  • Grossesse
  • Polyarthrite rhumatoïde[6]
  • Maladie neurologique.

Antécédents chirurgicaux et anesthésiques

Les antécédents chirurgicaux et anesthésiques suivants sont questionnés[2][7] :

Médicaments

La prise de ces classe de médicaments doit être questionné [6] :

  • les anticoagulants
  • les antihypertenseurs
  • les antihyperglycémiques
  • les bronchodilatateurs
  • l'insulinothérapie
  • les statines.

Allergies

Passer en revue les allergies du patient, notamment celle aux antibiotiques et produits anesthésiants.

Examen clinique

Classification de Mallampati

L'examen clinique sera composé de:[7]

  • Apparence générale: état mental, état d'hydratation/de nutrition, stabilité
  • Examen cardiovasculaire[1] tel de l'hypertension, un souffle ou des signes d'insuffisance cardiaque[9].
  • Examen des poumons
  • Évaluation de l'IMC
  • Évaluation des voies aériennes:
    • facteurs de risque de ventilation difficile (BONES): Barbe, Obésité, No teeth, Elderly (> 55 ans), Snoring (apnée du sommeil)
    • classification de Mallampati
    • mobilité du cou
    • taille de la langue, prothèses dentaires
    • règle du 3-2-1 (si positif, une intubation difficile est à prévoir)
      • espace thyromentonnier < 3 largeurs de doigts (ou 6 cm)
      • ouverture de la bouche < 2 largeurs de doigts
      • subluxation antérieure de la mâchoire < 1 largeur de doigt.

Classification ASA

La classification ASA du American Society of Anesthesiology[12] se sert des antécédents du patient afin de se faire une idée de possibles risques péropératoires. Par contre, ne prédit pas concrètement les risques. Le score est assigné par un(e) anesthésiologue le jour de l'intervention prévu.[12]

Classification ASA[2]
Classe ASA Description
1 Patient en santé

Ex. En santé, non-fumeur, prise d'alcool minime

2 Patient avec maladie systémique légère

Ex. Fumeur, grossesse, obésité IMC 30-40, diabète et hypertension artérielle (HTA) bien contrôlés, maladie pulmonaire légère

3 Patient avec maladie systémique sévère

Ex. Diabète ou HTA mal-contrôlés, MPOC, alcoolisme, hépatite, pacemaker, fraction d'éjection cardiaque modérément ↓, dialysé, MCAS, histoire d'AVC

4 Patient avec maladie systémique sévère qui menace sa survie

Ex. MCAS ou AVC récent (< 3 mois), valvulopathie sévère, fraction d'éjection cardiaque très abaissée, sepsis, IRC terminale non-dialysée, IRA

5 Patient moribond, espérance de vie < 24h sans la chirurgie

Ex. Anévrysme de l'aorte rupturé, trauma massif, hémorragie intra-crânienne avec effet de masse, ischémie mésentérique avec défaillance organique multiple

6 Patient en mort cérébrale (chirurgie dans le but de don d'organes)
La lettre E est ajoutée après le chiffre s'il s'agit d'une chirurgie urgente (ex. Classe ASA 3E).

Examens paracliniques

Investigations à considérer[13]
Investigation Indications
Formule sanguine complète
  • Importante perte sanguine chirurgicale attendue.
  • Antécédent d'anémie ou de néoplasme malins.
Bilan de coagulation
  • En cas de thérapie anti-coagulante.
  • Antécédents familiaux de coagulopathie.
  • Maladie hépatique.
Électrolytes et créatinine
Glycémie à jeun
  • Patient diabétique.
  • Si prise de glucocorticoïdes.
ECG
  • Patient avec MCAS, MVAS ou arrhytmie.
NT-proBNP
  • Patient âgée de ≥ 65 ans, RCRI ≥ à 1 et/ou patient atteint d'une maladie cardiovasculaire significative[8].
Radiographie pulmonaire
  • Patient atteint d'une maladie cardiopulmonaire (si pertinent pour la conduite).
Test de grossesse (β-hCG)
  • Toute femme en âge de procréer.
HbA1c
  • Patient diabétique.
Échographie cardiaque
  • Ne fait pas partie des recommendations canadiennes pour des chirurgies non-cardiaques[8].
  • Elle peut être réalisée s'il une maladie cardiaque telle une cardiomypathie ou une hypertension pulmonaire artérielle est suspectée.[13]
Radiogaphie du cou
  • Patient avec polyarthrite rhumatoïde[1].

Prise en charge

Un plan de conduite devrait être établi suite à l'évaluation du patient. Ce plan contient des recommendations pour le jeûne, pour la prise de médicaments et contient d'autres points importants.

Jeûne

La prise en charge en lien avec le jeûne[13]:

  • 6 heures suite à l'ingestion d'un repas contenant des aliments solides
  • 6 heures suite à l'ingestion de préparation de lait infantile, de lait enrichi (même si exprimé) ou de lait de source non-humaine
  • 4 heures suite à l'ingestion de lait maternel
  • 2 heures suite à l'ingestion de liquide clair (adulte)
  • 1 heure suite à l'ingestion de liquide clair (nourrisson et enfant).

Médicaments

Certains médicaments doivent être arrêter avant la chirurgie alors que d'autres devraient être pris en continu. La posologie de certains doit être ajustée.

Ajustement des médicaments[14]
Cardiaques
  • β-bloqueurs: continuer
  • Inhibiteur des canaux calciques: continuer
  • α2-agonistes: continuer
  • Statines: continuer
  • Inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IECA): cesser
  • Inhibiteurs des récepteurs de l'angiotensine (ARA): cesser
  • Diurétiques: cesser
Neurologiques et

anesthésiques

  • Analgésique opioïdes: continuer
  • Antiinflammatoires non stéroïdiens: cesser
  • Antiinflammatoires non stéroïdiens sélectifs de la COX-2: continuer
  • Naltrexone: cesser
Respiratoires
  • Agonistes β-2 adrénergiques: continuer
  • Théophylline: cesser
Endocriniens
  • Insuline basale: continuer
  • Insuline à action intermédiaire: à ajuster
  • Insuline à action courte: cesser
  • Hypoglycémiants oraux: cesser (surtout les iSGLT-2, qui mettent le patient à risque d'une acidocétose diabétique euglycémique[5])
  • Dose de stress pour insuffisance surrénale (sauf pour chirurgie mineure)[15]:
    Pour une chirurgie majeure: hydrocortisone 100 mg IV à l'induction suivi de 200mg pour les prochaines 24 heures. Pour chaque 24h suivant nil per os, continuer les doses de 200mg IV. Lorsque le patient peut prendre des médicaments par voie orale, le double de sa dose quotidienne devrait être pris pour 48 heures.
    Pour une chirurgie intermédiaire: hydrocortisone 100 mg IV à l'induction suivi de 200mg pour les prochaines 24 heures. Par la suite, lorsque le patient peut prendre des médicaments par voie orale, le double de sa dose quotidienne devrait être pris pour 48 heures.

Surrénaliens
  • Stéroïdes: continuer (supplémenter avec une dose de stress si nécessaire)
Anticoagulatans et antiplaquettaires
  • À évaluer selon les risques et les bénéfices
Herbes médicinales/produits naturels
  • Arrêt une semaine avant la chirurgie

Autres conseils d'optimisation

Les autres conseils à donner au patient sont[6]:

  • Tabagisme: Abstinence de 8 semaines avant la chirurgie et de 10 jours par la suite.
  • Diabète: Un contrôle stricte la glycémie n'est généralement pas bénéfique mais la taux de glycémie devrait être optimisé avant la chirurgie, les lignes directrices visent entre 5.6 et 10.0 mmol/L. Une insuline à courte durée peut être utilisée pour corriger la glycémie le jour de la chirurgie.
  • Prévention des thromboembolies: L'usage simple de l'ASA n'est pas fondé. L'héparine de bas poids moléculaire est envisageable pour les patients à risque modéré. L'héparine non fractionée est envisageable pour les patients à haut risque.
  • Prévention des endocardites infectieuses (voir Endocardite#Prévention): Pour les chirurgies dont la muqueuse orale va être manipulée, des antibiotiques en prophylaxie sont suggérés si le patient a une valve cardiaque prosthétique ou autre matériel prosthétique dans le coeur. Dans le cas d'antécédent d'endocardite infectieuse, des antibiotiques en prophylaxie sont aussi recommandés.

Communication

Il est suggéré de communiquer le risque périopératoire cardiaque au patient de façon explicite. La formule à privilégier est de l'expliquer en terme du taux d'évènement attendu parmi 100 patients ou l'étendu du risque (intervalle de confiance de 95%).[13] Une bonne communication entre les membres du personnel à propos du plan est importante, ceci inclut les changements liés à la prise de médicaments.[1]

Références

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 et 1,5 « Évaluation médicale préopératoire - 74-3 », sur Le Conseil Médical du Canada, (consulté le 17 avril 2023)
  2. 2,0 2,1 2,2 et 2,3 (en) Chowdhury, Sheehan H. et Chowdhury, Jeeshan., Essentials for the Canadian medical licensing exam : review and prep for MCCQE, part I, Philadelphie, Wolters Kluwer, , 758 p. (ISBN 978-1-4511-8688-8 et 1-4511-8688-6, OCLC 932066339), p. 220-221
  3. Laflamme, David, 19, Précis de cardiologie : cardiomedik, Paris, Éd. Frison-Roche, dl2013, 383 p. (ISBN 978-2-87671-560-8 et 2-87671-560-0, OCLC 859437440), p. 310-313
  4. (en) « Risk Stratification Before Elective Surgery », sur UCLA Health, (consulté le 3 mai 2023)
  5. 5,0 et 5,1 « Évaluation préopératoire », sur lanthiermed.com (consulté le 28 avril 2023)
  6. 6,0 6,1 6,2 6,3 et 6,4 (en) J.L. Jameson, Harrison`s Principles of Internal Medicine, États-Unis, McGraw Hill Education, , 3528 p. (ISBN 978-1-259-64403-0), p. 3446-9
  7. 7,0 7,1 et 7,2 (en) Binesh-Marvasti, Tina,, McQueen, Sydney,, Ahmed, Waleed S., et Frankfurter, Claudia,, Toronto Notes 2018 : comprehensive medical reference and review for the Medical Council of Canada Qualifying Exam (MCCQE) Part 1 and the United States Medical Licensing Exam (USMLE) Step 2, Toronto, , 1374 p. (ISBN 978-1-927363-40-9, 1-927363-40-3 et 978-1-927363-41-6, OCLC 1022761837), A1-A4
  8. 8,0 8,1 8,2 8,3 et 8,4 (en) « Canadian Cardiovascular Society Guidelines on Perioperative Cardiac Risk Assessment and Management for Patients Who Undergo Noncardiac Surgery », Canadian Journal of Cardiology,‎ , p. 17-32 (lire en ligne)
  9. 9,0 et 9,1 (en) Mitchell S. King, « Preoperative Evaluation », American Family Physician,‎ , p. 387-396 (lire en ligne)
  10. (en) Mahesh Krishnan, « Preoperative Care of Patients with Kidney Disease », American Family Physician,‎ , p. 1471-1477 (lire en ligne)
  11. (en) « Guidelines for the management of glucocorticoids during the peri-operative period for patients with adrenal insufficiency », Anaesthesia,‎ (lire en ligne)
  12. 12,0 et 12,1 (en) « ​ASA Physical Status Classification System », sur www.asahq.org, (consulté le 25 avril 2023)
  13. 13,0 13,1 13,2 et 13,3 (en) G. Dobson et al., « GUIDE D’EXERCICE DE L’ANESTHÉSIE », Journal canadien d’anesthe´sie,‎ (lire en ligne)
  14. (en) J.P. Wanderer et J.P. Rathmell, « Perioperative Medication Management », Anesthesiology,‎ (lire en ligne)
  15. (en) T. Woodcock, P. Barker, S. Daniel, S. Fletcher, J. A. H. Wass, J. W. Tomlinson, U. Misra, M. Dattani, W. Arlt, A. Vercueil, « Guidelines for the management of glucocorticoids during the peri-operative period for patients with adrenal insufficiency », Anaesthesia,‎ , p. 654-663 (lire en ligne)
Les sections suivantes sont remplies automatiquement et se peupleront d'éléments à mesure que des pages sont crées sur la plateforme. Pour participer à l'effort, allez sur la page Gestion:Contribuer. Pour comprendre comment fonctionne cette section, voir Aide:Fonctions sémantiques.